La crise du coronavirus est le moment idéal pour faire le grand nettoyage, y compris dans le secteur de la mode. Les créateurs, Giorgio Armani en tête, prônent l’adoption d’une mode plus lente, qui s’adapte au rythme et aux besoins du consommateur.
Temps pour une correction
Chez Armani, la collection d’été sera disponible en magasin jusqu’en septembre de cette année – et ce sera le cas chaque année à partir de maintenant. Le créateur de mode Giorgio Armani estime, effet, que le moment est venu de mettre fin au gaspillage et au rythme « criminel » et « absurde » de la fast-fashion. La crise que nous traversons à présent est « une occasion unique de corriger ce qui ne va pas », écrit-il dans une lettre ouverte publiée sur le site du magazine WWD.
La crise financière engendrée par la pandémie du coronavirus soulève de nombreuses questions sur l’avenir, sur la manière dont la consommation va se redresser, sur le moment où elle le fera, ainsi que sur ce qu’attendront les clients des marques et des magasins. L’une des préoccupations du monde de la mode (les petites marques et les marques de luxe en particulier) est de savoir si la crise ne va pas conduire à l’adoption d’une mode plus lente et de créations plus durables. Cela permettrait au moins d’endiguer le massacre actuel dû aux très nombreux stocks superflus, aux commandes annulées ainsi qu’aux collections déjà dépassées (celles du début de printemps et du printemps 2020 ont à peine figuré dans les rayons des magasins).
Les mentalités doivent changer
Giorgio Armani se réjouit, car il le dit depuis des années : « L’offre est certainement trop importante par rapport aux besoins réels. » « La situation idéale serait que nous puissions limiter l’offre et adapter la durée de nos collections en fonction de la demande saisonnière de nos clients ; de cette façon, nous pourrions éviter ou réduire considérablement les réductions », a déclaré le chef de file du luxe.
Par exemple, il est bizarre « de ne trouver que des robes en lin dans les magasins en hiver », alors qu’en été, les vestes en laine d’alpaga colonisent les rayons. « C’est un mauvais état d’esprit et il faut le modifier », continue Armani. La maison de couture étudie une possible suppression des collections préautomne ou cherche du moins à les réduire au minimum. « Nous devrons certainement réévaluer toute la chaîne de valeur de notre modèle d’entreprise », conclut l’Italien. « Nous devrons devoir travailler tous ensemble pour trouver de meilleures solutions. »
Des chemins divergents
Il reste cependant à voir si les géants du fast-fashion suivront. Aujourd’hui encore, les chemins semblent de plus en plus divergents : alors qu’Hermès et Chanel promettent de continuer à soutenir leurs employés pendant la crise sans le soutien de l’État, C&A et Primark annulent massivement leurs commandes auprès des fournisseurs situés dans les pays à bas salaires comme le Bangladesh, et ce, bien qu’elles soient déjà en cours de production.
Les avis divergent également sur les politiques de vente et de réductions. Selon Giorgio Armani, le secteur doit passer à des collections moins nombreuses et plus petites, ce qui signifie aussi des stocks plus limités et donc moins de démarques. D’autres, en revanche, offrent des réductions importantes en ligne pour sauver ce qui peut l’être pendant cette crise du coronavirus.
Même dans un petit pays comme la Belgique, les marques de mode et les détaillants ne sont pas d’accord sur la bonne stratégie à adopter : reporter la période des soldes ou stimuler les consommateurs avec de bonnes affaires. Le monde de la mode s’harmonisera-t-il après la crise du coronavirus ou le fossé ne fera-t-il que se creuser ?