Après la pandémie, la guerre et l’inflation sont – à nouveau – synonymes de mauvaises nouvelles pour le commerce de détail de la mode. La confiance des consommateurs s’effondre, les comportements d’achat changent : l’occasion et le commerce en ligne se développent au détriment des détaillants de mode spécialisés.
Sensible à la récession
Ces vingt dernières années, les familles ont consacré une part de plus en plus réduite de leur budget à la mode : la part des dépenses de mode dans le budget des ménages est même tombée à 4% en 2020 et le chiffre d’affaires des magasins de mode est tombé bien en dessous du niveau de 2019. Cette situation ne va pas s’améliorer pour l’instant : la guerre en Ukraine fait chuter la confiance des consommateurs et la hausse des prix fait que les ménages voient leur revenu disponible diminuer. Cela aura un impact sur le comportement de dépense, indique un nouveau rapport de l’assureur-crédit Allianz Trade.
La mode, après tout, est très sensible à la récession : c’est l’un des premiers articles sur lesquels les acheteurs économisent, ce qui pourrait réduire les dépenses de mode dans l’UE de quelque 4,85 milliards d’euros en 2022. Selon le rapport, le déclin est surtout ressenti par les détaillants de mode spécialisés, car le comportement des consommateurs a changé. Les acheteurs optent davantage pour les vêtements en ligne, d’occasion, de loisirs et de sport. Les vêtements plus formels sont en perte de vitesse.
Diminution du nombre de magasins de chaussures
L’assureur-crédit souligne que ces nouvelles tendances de consommation ne sont pas transitoires. Les dépenses de mode par habitant continuent de baisser et déjà environ 40 % des dépenses de mode se font en dehors des magasins spécialisés. Seules les ventes dans le segment le plus élevé du luxe sont supérieures aux niveaux de 2019.
Par conséquent, les détaillants de mode sont de moins en moins capables de faire face, déclare Johan Geeroms d’Allianz Trade. Il fait référence au secteur de la chaussure : « On le remarque dans l’augmentation des ventes de chaussures de sport et de baskets, au détriment des chaussures traditionnelles en cuir. » Selon l’organisation sectorielle INretail, le nombre de magasins de chaussures aux Pays-Bas est tombé à moins de mille magasins. En février 2021, il y avait encore 1 364 magasins de chaussures en Belgique, selon un décompte de RetailSonar.
Risque d’insolvabilité
Dans le même temps, l’inflation pèse sur la rentabilité des détaillants de mode. Les prix du coton, des fibres synthétiques et des transports restent élevés, ce qui exerce une pression sur les marges brutes. Après tout, l’achat de marchandises représente pas moins de 50 à 60 % des coûts d’exploitation des chaînes de mode. Elles devront ajuster leur gamme de produits, produire plus près de chez elles, se concentrer sur les articles les plus chers et offrir moins de rabais. Selon une enquête de McKinsey auprès des PDG du secteur de la mode, 67 % d’entre eux s’attendent à ce que les prix augmentent de plus de 4 % cette année.
Ces changements structurels dans l’industrie de la mode augmentent le risque d’insolvabilité : « Il peut aussi s’agir de grandes faillites. Pensez aux chaînes de magasins. Depuis 2016, il y a eu 78 faillites en Europe dans lesquelles des détaillants de mode ayant un chiffre d’affaires annuel supérieur à 10 millions d’euros se sont effondrés. Au total, quelque 14 milliards d’euros de chiffre d’affaires ont ainsi été perdus. » Au passage, les fabricants de vêtements sont également en difficulté : ils doivent faire face à des fermetures d’usines, des pénuries de matériaux, des prix élevés des conteneurs et des problèmes dans la chaîne d’approvisionnement.