Les mesures contre la propagation du coronavirus touchent de plein fouet le secteur de la mode. Le cabinet de conseil McKinsey a soumis le secteur à un test de résistance. Le résultat est alarmant : nous ne devons pas compter sur une reprise rapide.
Vague de consolidation attendue
Le célèbre cabinet de conseil en stratégie a soumis à un test de résistance 71 entreprises de mode cotées en bourse et réalisant un chiffre d’affaires de plus de 250 millions d’euros. Un examen des chiffres clés livre des résultats peu encourageants : après un mois seulement de fermeture obligatoire des magasins, la plupart des acteurs se retrouvent déjà sous pression, et après deux mois, 90 % d’entre eux connaissent des difficultés financières. En effet, le secteur était déjà vulnérable avant la crise du coronavirus : 40 % des entreprises de mode étaient déjà à court de liquidités.
« Les entreprises de mode possédant des magasins physiques sont soumises à une forte pression en raison des achats en ligne. De plus, les acteurs appartenant au segment intermédiaire du marché éprouvent des difficultés, car, avant la pandémie, le comportement des consommateurs s’était déjà tourné vers le luxe, le luxe abordable et le concept de value », déclarent les experts Achim Berg et Karsten Lafrenz de McKinsey à la revue spécialisée allemande Textil Wirtschaft.
Les fermetures de magasins exacerbent les problèmes : les banques et les investisseurs en capital privé réfléchissent donc actuellement à deux fois avant de continuer à financer une entreprise. Les consultants s’attendent donc à une vague de consolidation : « Certaines entreprises jetteront l’éponge, d’autres seront rachetées. Le commerce physique va diminuer. Les magasins situés à des emplacements de premier choix continueront d’exister, mais de nombreux magasins situés à des emplacements secondaires seront eux mis en vente. »
« Pas de reprise avant Noël »
Pour les experts, le commerce électronique ne peut actuellement pas compenser les pertes, mais à long terme, il sera bien le vainqueur dans cette crise : « À l’heure actuelle, le commerce électronique souffre aussi de la crise du Covid-19. Les acteurs en ligne évoquent une baisse des activités allant de 5 à 20 %. Les clients restent à la maison et passent plus de temps sur Internet, mais se montrent pourtant réticents à faire des achats. Les fournisseurs en ligne se voient par conséquent contraints d’introduire des réductions de prix importantes. À long terme, cependant, le commerce électronique sera le vainqueur de cette crise. »
Les détaillants doivent réfléchir à l’agencement de leurs boutiques en ligne s’ils veulent réussir sur Internet. « Prenez l’exemple du click & collect. De nombreux magasins sont conçus de telle manière que les clients doivent d’abord parcourir toute la boutique avant d’atteindre l’écran tactile avec la fonction “click & collect”. Dans le contexte actuel, il peut être judicieux de déplacer cette fonctionnalité sur la page d’accueil. Beaucoup de consommateurs préfèreront effectivement éviter l’agitation des prochaines semaines par crainte d’être contaminés. »
Car même si la plupart des magasins rouvrent dans quelques semaines, les clients resteront hésitants : les achats seront moins agréables en raison des mesures de protection nécessaires. Les chiffres d’affaires issus des ventes physiques se situeront sans doute à 30 à 40 % en dessous du niveau normal. « Nous ne croyons pas en une courbe de croissance en V. La relance prendra du temps. Ce n’est que lors du trimestre de Noël qu’on pourrait observer un retour à la normale. »