Kiabi va ouvrir son premier magasin franchisé en Wallonie cette année – la Flandre suivra en 2025. La chaîne de mode française s’engage de plus en plus dans la circularité, et la Belgique fait office de marché test, explique son directeur général Jerôme Calonne.
Entreprise familiale
Plus de 40 ans après sa création, le leader français de la mode familiale est aujourd’hui présent dans 26 pays – le tout avec environ 650 magasins et 10 000 employés. Quand le retailer est arrivé en Belgique en 2010, c’était en « pure player » : le premier magasin physique n’a ouvert ses portes qu’en 2016. « Nous inaugurerons notre 14e boutique en Belgique très bientôt. Nous prévoyons huit ouvertures au total cette année. Pour nous, il s’agit d’un projet d’expansion important », déclare Jérôme Calonne – actif au sein du groupe depuis 13 ans, il dirige la filiale belge depuis quatre ans.
« Il est agréable de travailler chez nous : Kiabi est une entreprise familiale qui prône une culture humaine. Nous sommes persuadés que si nous prenons soin de nos employés, les clients le ressentiront. Nous avons été élus Great Place to Work pour la troisième année consécutive. Notre fondateur est toujours actif et nous rend souvent visite en Belgique. Ici, nous opérons toujours en mode start-up avec une équipe réduite. Nous utilisons également la Belgique comme marché test pour de nombreux projets. »
Vêtements pour bébés et enfants
Kiabi est une marque de mode pour toute la famille, qui propose un bon rapport qualité-prix-durabilité. Jérôme Calonne : « Les vêtements pour bébés et enfants prennent à leur compte jusqu’à 45 % de notre chiffre d’affaires, et même un peu plus en Belgique. Nous sommes également très présents dans les grandes tailles et les vêtements de grossesse. » Pour les articles de base, le détaillant affiche des prix très compétitifs, comparables à ceux pratiqués par H&M, C&A ou Primark. Les collections plus modernes sont proposées à des tarifs légèrement plus élevés.
En Belgique, la chaîne a ouvert ses premiers magasins dans des centres commerciaux, des lieux à fort passage. L’objectif était de faire connaître la marque. « Aujourd’hui, nous sommes également présents en périphérie, avec des shop-in-shops dans des hypermarchés et dans les centres-villes avec des formats plus petits comme Kiabi Kids. Les centres commerciaux offrent davantage de visibilité, mais la rentabilité y est légèrement plus faible. Nous devons rester très attentifs aux coûts pour maintenir des prix compétitifs. En Belgique, nos magasins s’étendent en moyenne sur 1 000 m². C’est un peu plus petit que les magasins de 1 500 à 2 000 m² que nous avons en France, en Espagne ou en Italie. »
Modèle de franchise omnicanal
Désormais, Kiabi souhaite se développer principalement par le biais de magasins franchisés : le premier ouvrira ses portes en avril à Hannut, sur une surface d’un peu moins de 1 000 m². « Ce sera une vitrine destinée à présenter notre savoir-faire en la matière à d’autres entrepreneurs. En Wallonie et à Bruxelles, nous voulons surtout nous attaquer à des zones secondaires avec nos magasins franchisés – sur des superficies légèrement plus faibles.
Environ la moitié des 650 magasins du groupe Kiabi sont exploités par des franchisés. « C’est un modèle que nous maîtrisons bien. Nous proposons un mélange de filiales et de franchisés dans tous les pays où nous sommes présents. L’avantage de notre modèle est que le risque est très limité pour les partenaires, puisque nous finançons nous-mêmes le stock. Ils ne doivent donc pas acheter les stocks. »
« Une autre particularité de notre concept de franchise tient au fait qu’il s’agit d’un modèle omnicanal : les partenaires franchisés reçoivent une commission sur les ventes en ligne réalisées dans leur zone de chalandise. Pour ce faire, nous utilisons les données de la carte du client : les achats en ligne de chaque client possédant un compte sont attribués au magasin de sa zone de chalandise. »
Anvers, première cible
Une expansion en Flandre n’est pas encore au programme cette année, explique le directeur. « Nous considérons la Flandre comme un pays à part entière et cherchons des partenaires franchisés qui connaissent bien le marché local. Le comportement des consommateurs y est en effet très différent. Nous avons déjà eu un magasin à Bruges, mais il se trouvait dans une zone piétonne du centre-ville touristique, au rez-de-chaussée et au sous-sol d’un immeuble au loyer très élevé. C’était une erreur. Le chiffre d’affaires était correct, mais ce n’était pas le meilleur endroit pour atteindre les ménages flamands. »
En ligne en revanche, le succès est déjà au rendez-vous : la Flandre représente déjà près de 25 % du chiffre d’affaires du Webshop. « Nous avons donc déjà beaucoup de clients flamands qui connaissent la marque. La boutique en ligne nous apprend ce qui marche en Flandre et ce qui a moins de succès. Aujourd’hui, nous nous sentons prêts. Notre première cible serait Anvers, car c’est là que la demande est la plus importante. »
E-réservation
Cette boutique en ligne belge est d’ailleurs très performante : l’e-commerce pèse un peu plus de 30 % du chiffre d’affaires. Mais 35 % des achats en ligne se terminent en magasin. « Nous avons fait nos premiers pas en Belgique en tant que pure player, mais Kiabi ne peut pas être un pure player : le magasin reste un élément essentiel de notre expérience. Nous disposons d’un service de réservation en ligne : les familles choisissent leurs articles en ligne depuis leur domicile, nous les préparons dans le magasin et elles peuvent venir les essayer dans la salle d’essayage familiale. Les clients évitent ainsi une étape stressante du processus d’achat, surtout s’ils ont des enfants. De plus, nous proposons immédiatement une taille supérieure et une taille inférieure, de sorte qu’ils sont sûrs de trouver la bonne taille. »
Kiabi n’est en revanche plus présent sur les market places externes : « Nous avons testé cette solution et cela n’a pas été un succès. Il nous est difficile d’adapter nos tarifs. Mais l’expérience nous a permis de mieux faire connaître notre marque en Flandre. Nous travaillons actuellement à la mise en place d’une market place interne où des articles provenant de vendeurs locaux complèteront notre assortiment. L’ouverture en Belgique est prévue en 2026. »
Sortir des saisons
Malgré l’accent placé sur les petits prix, Kiabi refuse de jouer la carte de la mode rapide agressive. La durabilité est une priorité. « Elle ne nous a pas été imposée d’en haut, c’est plutôt une demande de la base. Nos 10 000 employés comprennent que la mode rapide est un désastre écologique. La production prend à son compte 70 % de nos émissions. Mais nous y travaillons : nous avons réduit l’impact environnemental d’environ 90 % de nos articles. Nous utilisons des matières premières bio, des fibres naturelles ou une coupe optimale pour réduire les déchets, nous limitons les accessoires qui ne peuvent pas être recyclés. Par exemple, nous allons lancer notre première collection de fêtes avec des paillettes recyclées. À terme, nous voulons renoncer au brillant. »
Expansion et durabilité vont de pair chez Kiabi. Le retailer s’oriente vers une plus grande part de collections permanentes aux dépens de collections saisonnières qui changent constamment. En créant des produits conçus à partir de matières reconnues comme moins impactantes pour la planète, nous pouvons à la fois faire baisser les prix et accélérer notre transformation durable. » En d’autres termes, Kiabi souhaite désaisonnaliser son assortiment.
La Belgique est un marché test pour les initiatives circulaires. « Nous constatons que la demande d’articles d’occasion y est particulièrement forte. La taille limitée et la complexité du marché font qu’il se prête bien à des essais à petite échelle. Nous testons par exemple un atelier de réparation et de personnalisation dans notre boutique du Westland Shopping Center. Nous allons également lancer ce service de personnalisation en ligne. »
Vêtements consignés
Kiabi récupère déjà les vêtements usagés et envisage de mettre en place un système de consigne. « Les Belges sont habitués aux consignes pour d’autres produits. Notre rêve est de récupérer 100 % des articles neufs que nous vendons pour les réintégrer dans la chaîne. Nous vendons déjà des vêtements d’occasion dans presque tous nos magasins, et pas seulement de la marque Kiabi. Nous développons également une plateforme Web où les consommateurs pourront s’acheter des produits d’occasion : nous l’ouvrirons en janvier 2025. À l’avenir, l’occasion doit devenir l’entrée de gamme, avec en complément un assortiment d’articles neufs plus durables et plus chers. Nous pouvons ainsi réduire considérablement notre empreinte écologique. »
Et qu’en est-il des articles en fin de vie ? « L’idée est de développer des “fermes à fibres” dans nos pays de production. Les déchets textiles y seront transformés en fibres que nous pourrons utiliser pour fabriquer des vêtements neufs. À peine 1 % du textile vendu dans le monde est recyclé. Mais le recyclage nécessite des produits monomatériau, sans accessoires. Nous commençons déjà à collecter des vêtements pour habituer les clients et éviter que le textile finissent automatiquement à la poubelle. »