Dans le dossier FNG, le tribunal d’Anvers a décidé d’ouvrir une enquête sur la société néerlandaise FIPH. Ce véhicule financier de l’ancien directeur de FNG Rens Van de Schoor serait impliqué dans un carrousel d’actions d’une valeur 110 millions d’euros.
Bas de laine invisible
Entre 2016 et 2020 110 millions d’euros au total auraient été transférés de FNG à FIPH, et personne n’a d’explication. Il n’existe ni document ni justification, a découvert le tribunal d’Anvers, alors que les ordres de transfert auraient été passés par la direction FNG en personne. Et toutes les tentatives de rapatrier l’argent – provenant notamment de prêts obligataires et de l’investisseur Jos Sluys – cet été, juste avant la faillite, ont échoué, rapporte De Standaard.
Le juge d’instruction Theo Byl a donc décidé d’examiner l’implication de FIPH dans le dossier de fraude. Mais la société derrière laquelle se trouve Rens Van de Schoor n’était pas la destination finale de cet argent : depuis Kapelle, les fonds ont en effet été transférés à une fondation (STAK) de FNG à Amsterdam. Le groupe de mode utilisait cette fondation comme (gros) bas de laine pour procéder rapidement à de nouvelles acquisitions ou payer les actionnaires qui souhaitaient sortir du capital. Geert Noels, Urbain Vandeurzen et Van de Schoor, notamment, se sont par exemple retirés du groupe à un moment donné.
La direction de FNG voulait éviter de passer par la Bourse chaque fois que de nouveaux capitaux étaient nécessaires ou y attendre que de nouveaux investisseurs veuillent racheter les parts des sortants, un processus lent et difficile. Selon De Standaard, les volumes de transactions en Bourse s’étaient en effet effondrés. Penninckx et son équipe ont donc décidé de prendre le taureau par les cornes avec l’aide d’hommes de paille.
Hommes de paille
L’épisode est une nouvelle confirmation de ce que RetailDetail affirmait avant que le groupe fasse faillite. Il explique aussi la disparition de 25,2 millions d’euros à l’automne 2019 : à l’époque, FNG avait racheté 1,4 million d’actions propres à Van de Schoor – ou à son successeur Gerardus Pilon – au prix de 32 euros par action. Peu de temps après, le cours de Bourse chutait à 14 euros, le groupe essuyant ainsi une perte de 25 millions d’euros. Les analystes craignaient qu’il ne s’agisse pas d’un accident isolé.
Un autre homme de paille aurait été Kristoff Sel : le spécialiste des achats ayant des connexions en Asie avait rapidement constitué une participation de 11% dans FNG en juillet 2018, participation qui a subitement diminué de plus de moitié en novembre de la même année. Moins d’un an plus tard, son nom disparaissait de la tête de la société d’achat qu’il dirigeait auparavant. Le nom de Rens Van de Schoor a lui aussi formellement disparu de la liste des actionnaires en 2017, bien que FIPH soit restée présente dans le capital.
Avec le produit de la vente de ses actions, le médecin d’entreprise a repris un peu plus tard McGregor en faillite, mais la relance des activités a rapidement échoué. Marcel Boekhoorn, l’ancien propriétaire de Hema, comptait parmi les coactionnaires dans la tentative de relance. Il en est désormais simple créancier. Martijn Rozenboom, l’actuel propriétaire de ce qui reste de FNG – Miss Etam et Steps –, était lui aussi impliqué dans cette reprise.
Plate-forme d’achat à Hong Kong
Les noms de Sel et Van de Schoor sont également liés de près aux « dollars hongkongais » de FNG, les centrales d’achat en Suisse et à Hong Kong où 94 millions d’euros ont également dû être passés par pertes et profits à la suite de transactions obscures et de constructions opaques. C’est d’ailleurs par l’intermédiaire de Rens Van de Schoor que FNG a rejoint la plate-forme d’achat : en 2014, le groupe de mode belge a non seulement racheté Steps et Superstar par l’intermédiaire de Coltex, le holding de Van de Schoor, mais aussi l’organisation d’achat qui y était associée. Avec Van de Schoor – et Wouter Torfs –, le CEO Dieter Penninckx acquerra plus tard Brantano, cette fois par l’intermédiaire de la société belge Mogali.
On ne sait pas encore si l’enquête judiciaire s’étendra effectivement aux Pays-Bas et si Rens Van de Schoor sera personnellement impliqué. Mais si le juge d’instruction Theo Byl veut réellement mettre à nu tous les montages et comprendre où les choses ont mal tourné chez FNG, les enquêteurs devront inévitablement franchir la frontière.