Pourquoi FNG a-t-il perdu plus de 25 millions d’euros en rachetant ses propres actions ? Sur quoi l’Autorité des services et marchés financiers enquête-t-elle encore auprès du groupe de mode déficitaire ? Alors que les questions s’accumulent, les réponses semblent apparaitre au compte-gouttes.
De 32 à 14 euros
Peu avant l’arrêt brutal de la croissance de FNG, le groupe de mode qui détient Brantano et Miss Etam avait racheté 1,4 million d’actions supplémentaires à un prix d’achat de 32 euros chacune. Cependant, la société n’est plus parvenue à négocier les actions à un prix aussi favorable. Au contraire, FNG a finalement dû l’évaluer à 14 euros par action, subissant ainsi une perte de pas moins de 25,2 millions d’euros. C’est ce que rapporte le journal De Standaard, sur la base des propos de l’analyste boursier, Kristoff Van Houte.
« Quelqu’un a donc pu vendre 1,4 million d’actions à 32 euros au groupe FNG, qui a ensuite subi la perte », explique l’analyste boursier, qui craint que ce ne soit pas qu’une malheureuse coïncidence. Qui a pu vendre les actions à un prix si élevé ? De Standaard pointe du doigt les Hollandais Gerardus Pilon et Rens van de Schoor.
Entreprises hollandaises
Van de Schoor a été jusqu’en 2017 l’homme fort de l’ancien PDG, Dieter Penninckx, aux Pays-Bas et gérait la société R&S, avec laquelle FNG aux Pays-Bas a fusionné. Ou plutôt : Van de Schoor a fait le sale boulot (les rachats, la restructuration et la cotation en bourse), après quoi le FNG a fusionné avec R&S.
Cependant, après 2017, Van de Schoor a disparu de la scène, laissant la place à Pilon, d’après De Standaard. Celui-ci serait à l’origine du transfert du paquet controversé de 1,4 million d’actions à FNG, pour les revendre ensuite comme indemnisation (partielle) pour l’acquisition de la plateforme de mode scandinave Ellos. Comment la valeur des actions a-t-elle pu chuter si rapidement de 32 à 14 euros, nous l’ignorons.
Géant de la mode sous dopage ?
De nombreuses autres questions restent sans réponse. Après les « transactions douteuses » que le groupe a été contraint de reconnaître la semaine dernière, la question est encore plus pressante : comment se fait-il que personne n’ait rien remarqué ? Pourquoi personne n’a tiré la sonnette d’alarme ? Des questions ont précédemment été soulevées par rapport à l’approbation des rapports annuels, mais le comité d’audit de la société n’a-t-il pas également constaté une perte de 25,2 millions d’euros ?
De plus, les conseillers financiers manquent tous à l’appel. Fin 2019, le directeur financier et le président du conseil d’administration, Eric Verbaere, ont quitté le navire, tous deux pour des raisons personnelles, suivis par le co-fondateur et PDG, Dieter Penninckx, juste avant que la bombe n’explose. Leur départ s’est accompagné d’une pression croissante de la part de la FSMA, qui a commencé à poser des questions critiques lorsque le FNG a voulu entrer sur la Bourse de Bruxelles, et d’une augmentation de la critique publique.
Si les allégations de Kristoff Van Houte sont fondées et que des irrégularités ont été commises dans le cadre d’un échange de capitaux et d’actions, il s’agit d’une fraude. Par rapport aux autres acteurs de l’industrie de la mode, il s’agirait d’une concurrence déloyale, un géant de la mode se dopant avec des méthodes tout du moins douteuses. Le FNG était-il sous dopage ? Et dans ce cas, qui était le capitaine du peloton ? Les mois à venir ne seront pas de tout repos pour le groupe de mode et, pour les enquêteurs, il y a peut-être encore beaucoup de mystères à lever…