En Belgique, Ikea sort d’un exercice financier solide dans un contexte compliqué. Le retailer souhaite à présent doubler son chiffre d’affaires dans les cuisines et compte sur des prix bas pour relancer les ventes, explique le country manager André Schmidtgall. Des innovations technologiques doivent permettre de gagner en efficacité.
Les prix les plus bas
« Ces dernières années se sont assimilées à de véritables montagnes russes. Que nous ayons obtenu de si bons résultats dans des circonstances aussi difficiles est tout simplement extraordinaire », s’enthousiasme André Schmidtgall, qui dirige la branche belge de l’enseigne d’ameublement depuis près de trois ans. Le chiffre d’affaires a notamment progressé de 2,8% à 1,037 milliards d’euros au cours de l’exercice qui s’est clôturé le 31 août. Ces six dernières semaines, la chaîne a même enregistré une croissance à deux chiffres en dépit du climat de crise qui règne sur le pays. « Nous pouvons aider nos clients quand la conjoncture est défavorable. Depuis la crise sanitaire, les Belges investissent beaucoup dans leur maison. » Les problèmes d’approvisionnement des magasins sont désormais mieux maîtrisés.
Ikea veut à présent doper les volumes avec des prix compétitifs sur les produits de base. « Nous avions baissé les prix au début de l’année, mais nous avons été contraints de les réaugmenter par la suite. À présent, nous les baissons à nouveau. Le marché est volatil. Pour gagner en volumes, nous misons sur ce que nous appelons nos breathtaking items, nos articles à couper le souffle : des produits attrayants proposés au prix le plus bas. » Le retailer a également réduit de moitié les coûts du « click & collect ». Ikea récupère ensuite des marges en augmentant le prix de ses articles plus chers, comme les canapés en cuir.
Investissements
Ikea nourrit de grandes ambitions sur le marché de la cuisine. « Nos cuisines sont en moyenne 60% moins chères que le marché et jouissent d’une excellente réputation. Nous avons formé plus de 200 employés spécialisés dans la vente de cuisines et nous produisons quelque 11.000 plans de cuisine par an. Nous voulons doubler notre chiffre d’affaires dans ce segment au cours des trois prochaines années. » Actuellement, Ikea vend environ 26.500 cuisines par an ; l’objectif est d’en écouler au moins 50.000.
Le comportement des consommateurs évolue radicalement, observe André Schmidtgall. Les ventes en ligne représentent déjà 16,5% de notre chiffre d’affaires – avant la pandémie, ce n’était que 5%. « Nous évoluons d’un pur cash&carry à une activité de services, et cela requiert des investissements dans les magasins et le personnel. » L’année dernière, ces investissements ont atteint 4,8 millions d’euros. Au cours du prochain exercice, ils seront multipliés par cinq à 22 millions d’euros.
Innovations technologiques
Ikea teste plusieurs concepts innovants : à Gand, le géant du meuble déploie des drones pour contrôler le niveau des stocks. À Hasselt, des robots préparent des palettes pour les employés durant la nuit. À Gand toujours, les étiquettes sont désormais numériques – pour le plus grand bonheur des employés, car remplacer des milliers d’étiquettes papier n’est pas la tâche la plus passionnante. Tous les magasins – à l’exception de Gand – proposent désormais le concept Scan&Go qui permet aux clients de gagner du temps en scannant eux-mêmes leurs achats à l’aide de l’application pour smartphone Ikea, laquelle compte déjà 453.000 utilisateurs. « Cette application est déjà utilisée par 600 clients chaque jour, et les commentaires sont très positifs. »
Ces innovations devraient laisser plus de temps au personnel pour mieux servir les clients. « Nous voulons remplacer les tâches purement transactionnelles par des emplois à plus forte valeur ajoutée. » Le conseil gagne en importance. Les clients peuvent par exemple consulter des conseillers en intérieur et en cuisine. Il y a aussi le « Live Shopping », où le personnel donne des conseils. Pour les achats plus complexes comme les cuisines, les clients peuvent programmer une réunion Teams avec un membre du personnel. « C’est très efficace, parce qu’ils peuvent ainsi montrer la pièce où les meubles seront placés, par exemple. »
Comportement des clients
« Nos clients deviennent authentiquement omnicanaux : 55% d’entre eux effectuent des recherches en ligne avant de se rendre dans un magasin. Mais l’inverse est également vrai : 20% d’entre eux viennent chercher de l’inspiration dans le magasin pour ensuite procéder aux achats en ligne, une fois rentrés chez eux. Nous devons adapter notre organisation du travail à cette évolution du comportement des clients », poursuit André Schmidtgall.
Et les discussions ont parfois été difficiles, car tous les employés ne digèrent pas ces changements de la même manière. Le magasin de Liège a déjà connu une grève l’année dernière, le personnel se plaignant de la charge de travail et de la flexibilité accrue qui leur était demandée. « La CCT qui s’y applique remonte à 1991. Nous voulons l’actualiser pour la rendre à l’épreuve du temps. Aucun licenciement n’est prévu, au contraire : nous avons de nombreux postes vacants. »
Enfin, André Schmidtgall souligne les efforts déployés par Ikea pour réduire son empreinte climatique : elle a diminué de 30,5% sur le dernier exercice. Le gaspillage alimentaire a été réduit de moitié en cinq ans : « L’équivalent de 4,6 millions de nos fameuses köttbullar. » Dans les « Circular Hubs » ou coins de la deuxième chance, des modèles d’exposition et des articles retournés ont droit à une seconde vie : l’initiative concerne 600.000 pièces par an. L’hiver prochain, le thermostat sera abaissé à 19° et le détaillant prévoit de réduire sa consommation d’énergie de 10%.