Come-back après une année sabbatique
Après une période sabbatique, Frans Colruyt fait son come-back dans le monde du retail. Fin janvier, il avait décidé de quitter son poste de patron chez Spar, filiale de Colruyt, pour faire un break. Auparavant il avait déjà occupé diverses fonctions au sein de l’organisation Colruyt, notamment chef de service des entrepôts, acheteur food et directeur des services techniques.
« Durant cette période intermédiaire, j’ai réfléchi à ce que j’aimerais encore faire dans la vie. Au début je me suis posé beaucoup de questions, mais durant ce périple elles ont disparues. J’ai alors fait savoir à Jef par sms que je souhaitais à nouveau être actif dans le retail », témoigne Frans.
Pour Jef, le souhait de son cousin tombait à pic : « L’entreprise a beaucoup grandi : il y avait trop à gérer pour un seul homme. D’autre part mon âge est ce qu’il est : j’ai 54 ans et on ne rajeunit pas. Si Frans ne s’était pas présenté, nous aurions choisi quelqu’un d’autre du groupe. »
Distribution des tâches
Jef Colruyt conserve sa fonction de CEO et de président du conseil d’administration, mais passe la direction opérationnelle des activités retail à son cousin. D’autre part Jef Colruyt continuera à diriger les services de soutien tels que les finances, le personnel, l’informatique et l’immobilier. Il se focalisera également sur les activités non-retail de Colruyt, notamment les stations-service Dats24 ou encore les projets énergétiques et d’imprimerie du groupe.
Désormais Frans Colruyt se chargera donc de la direction opérationnelle des activités retail et sera ainsi le responsable final des activités des magasins opérant sous l’enseigne Colruyt et ses filiales à savoir Okay, Bio-Planet, Retail Partners (Spar Retail), Retail Frankrijk, Foodservice, DreamLand, DreamBaby et ColliShop.
Pour mener à bien cette répartition des fonctions, les deux cousins ont instauré des concertations. Chaque semaine tous deux se réunissent. « Nous analysons les problèmes en tête-à-tête. » S’il s’agit d’un problème concernant le retail, c’est Frans qui en aura la responsabilité finale. Mais s’il s’agit d’un problème relatif à un service de soutien, c’est à Jef de trouver la solution. D’autre part Frans et Jef se concertent mensuellement avec leurs directeurs et un conseil a lieu chaque mois avec tous les directeurs.
Travailler comme un bulldozer
Un duo à la tête d’une entreprise c’est bien, mais que se passe-t-il en cas de conflits ? Jef : « Nous travaillons ensemble depuis plus de vingt ans et je ne pense pas que nous ayons déjà eu de grands désaccords. A long terme nous arrivons toujours aux mêmes objectifs. Parfois l’approche pour atteindre l’objectif est différente, mais ce n’est pas grave. Si nous ne trouvons pas de solutions, nous fermons les portes et nous discutons jusqu’à trouver un accord. »
« Frans a plus d’intuition que moi », estime Jef Colruyt. « Il aborde les choses au feeling. Moi j’ai plutôt tendance à y réfléchir à deux fois, ensuite je prends une décisions et je travaille comme un bulldozer. » De son côté Frans qualifie Jef de « visionnaire qui voit les tendances à long terme. Moi je détecte plus facilement les dangers. »
« Ces derniers mois nous avons énormément travaillé. Nous nous sommes interrogés sur l’essence de notre entreprise : nous sommes retournés aux valeurs de base de notre fondateur et nous nous sommes demandés si elles étaient encore valables aujourd’hui. Après de multiples réunions nous avons défini notre mission : créer ensemble une plus-value durable dans le retail, grâce à un savoir-faire basé sur des valeurs », déclare Jef.
« Nous développons un processus de réflexion stratégique. Que se passera-t-il par exemple si tous les Chinois se mettent à manger de la viande : la valeur de nos produits alimentaires doublera ou triplera. Comment nos fournisseurs doivent-ils réagir face à une telle situation et que pouvons-nous faire, nous ? Devons-nous adapter notre offre ? Ou encore : une grande partie de notre alimentation disparaît dans la poubelle, est-ce normale ? Que pouvons-nous faire en tant que distributeur pour empêcher cela ? »
Bio-Planet par exemple est une chaîne qui répond à la tendance actuelle d’une alimentation saine. C’est pourquoi de nouveaux points de vente seront ouverts sous cette enseigne : en décembre un nouveau magasin ouvrira ses portes le long de la chaussée de Boom à Wilrijk, et ensuite d’autres ouvertures de magasins sont prévues en Wallonie. Sur le long terme la famille Colruyt envisage un réseau de 30 à 40 magasins, une très nette augmentation par rapport aux sept points de vente que comptait l’enseigne à la fin de l’année comptable précédente.
Une réorganisation permanente
Selon Frans « tout est en mouvement. J’ai d’ailleurs l’impression que nous sommes en réorganisation en permanence. C’est pourquoi nous devons être sûrs de ce que nous sommes, de ce que nous voulons représenter et de ce que nous voulons atteindre. Une mauvaise collaboration entraîne une énorme perte d’énergie. »
« Nous avons d’ailleurs mis sur pied un groupe de travail qui a pour mission de repenser les magasins en partant de zéro. Un autre groupe de travail se charge de trouver d’éventuelles solutions pour les magasins où la shopping experience se dégrade parce qu’il y a trop de monde », indique-t-il.
Condamnés d’avance
Pour terminer, le duo a souhaité revenir sur quelques thèmes d’actualité dans le secteur retail, notamment concernant les ententes sur les prix pratiquées jusqu’en 2007 dans certains supermarchés sur des produits de droguerie. « Apparemment nous sommes déjà condamnés. Mais nous attendons le jugement. Nous n’avons rien à nous reprocher. Aujourd’hui je suis sûr que tout est en ordre à 100%. », commente Jef Colruyt.
Les cousins Colruyt ont même fait l’éloge de leur concurrent. « Gérard Lavinay est le premier patron chez Carrefour, qui comprend le marché belge et qui sait comment gérer le dialogue social. », conclut Frans Colruyt.
Traduction : Marie-Noëlle Masure