Le progrès est la seule option
« La digitalisation de la société, l’e-tail, l’utilisation de la technologie en magasin sont source d’inquiétude, qui plus est pour les retailers », observe Herman Konings. Les commerçants craignent que le client avec son smartphone s’adonne au showrooming (le client se rend au magasin pour découvrir les produits et les prix, mais achète ailleurs online), que les grands ‘pure players’ online ne détruisent leur business et ainsi de suite.
Pourtant nous n’en sommes qu’au début de cette révolution digitale : « L’avenir nous réserve des surprises qui, il y a quelques jours encore, auraient pu passer pour un bon poisson d’avril », estime Herman Konings. Lorsqu’on voit ce qui se passe au niveau de la recherche et du développement, notamment en Asie et dans d’autres pays émergents, c’est phénoménal. A l’avenir nous nous familiariserons de plus en plus avec des technologies surprenantes.
D’autre part l’application de cette technologie devient très intuitive : les gens utilisent tous ces gadgets sans avoir à lire le mode d’emploi. Avec un smartphone en poche, tout un chacun – indépendamment de son niveau de formation ou de connaissance – peut obtenir une réponse immédiate à toute question et l’ajout de toutes sortes d’applis lui permet un contrôle encore plus poussé.
« Les applications ‘personal health monitor’ en sont un bon exemple dans le retail. Le consommateur peut ainsi vérifier au supermarché les substances contenues dans les produits alimentaires », explique Konings. « De toute manière nous devrons vaincre nos craintes. Nous devons aller de l’avant et accueillir à bras ouverts les évolutions technologiques, car on ne pourra pas y échapper. »
Lassitude face à la technologie : sleep texting et vibrations fantômes
En même temps, nous devons prendre en compte l’impact émotionnel de tous ces ‘bits & bytes’. Selon Konings, la psychologie clinique constate de plus en plus de syndrômes suite au développement de la technologie : des phénomènes comme le ‘sleep texting’ (l’envoi de SMS durant son sommeil) ou encore les vibrations fantômes (l’impression que son GSM vibre, alors qu’il n’en est rien) sont de plus en plus courants et s’expliquent par la pression provoquée par l’omniprésence de la technologie.
L’électronique fait partie intégrante de notre vie quotidienne, mais on constate néanmoins qu’une certaine lassitude face à la technologie commence à s’installer. « Ce n’est pas pour rien qu’on surnomme la nouvelle génération, ‘la génération HD’. Les initiales HD ne signifiant pas ‘high definition’, mais ‘head down’ : ils semblent toujours avoir la tête baissée sur leur appareil mobile », ironise Konings.
Cette nouvelle attirance vers l’analogique est donc une conséquence du trop-plein de technologie : « C’est un phénomène connu dans le domaine de l’économie et de la psychologie : ce qui risque de devenir rare, suscite un regain d’intérêt. » Le consommateur ressent à nouveau le besoin de créer quelque chose de ses propres mains, quelque chose d’analogique.
Ainsi en 2012 le fabricant de machines à coudre Singer a vu son chiffre d’affaires augmenter de 15% par rapport à l’année auparavant. Durant le premier trimestre 2013 l’entreprise a déjà vendu plus de machines à coudre que durant tout le premier semestre 2012. Le succès d’autres initiatives, telles que ‘De Invasie’ en passant par ‘Madame ZsaZsa’ jusqu’aux programmes culinaires, dont celui de Jeroen Meus, ne font que confirmer cette tendance vers l’analogique.
Le nouvelle dimension analogique offre de belles perspectives au retail
Cette tendance, selon Herman Konings, ne doit certainement pas être interprétée comme un retour en arrière. A contraire, il s’agit d’un nouvelle dimension analogique : les gens ne veulent pas se passer du confort que leur offre la technologie, mais de temps en temps ils ont besoin de s’évader, loin de toute cette agitation digitale.
D’où la devise ‘forward to basics’ : « Le consommateur n’a nullement l’intention de sombrer dans la nostalgie. Il ne s’agit pas non plus de sexagénaires qui regrettent le temps passé, mais principalement des vingtenaires à la recherche d’équilibre. »
Le retailer peut tirer avantage de cette situation, estime l’observateur de tendances. Pour le retailer physique surtout, l’analogique peut à nouveau jouer un rôle crucial. Certes, la technologie en magasin est un must, mais Konings conseille de la mettre en place de façon subtile et quasiment invisible.
Suite à l’évolution technologique rapide chez les fabricants, les derniers gadgets deviennent de plus en plus accessibles et meilleur marché, mais également plus subtiles et plus discrets au niveau du design. Il est important en tant que retailer de tirer profit de cette évolution, car cela permettra de se consacrer davantage à l’aspect analogique dans l’aménagement du magasin. Dans ce contexte, le contact personnel avec le personnel en magasin sera à nouveau très apprécié par les clients.
Pas pour l’épargne, mais pour le bien-être
Mais cette tendance vers l’analogique n’est-elle pas dictée par la crise et de ce fait un phénomène temporaire ? A cette question Herman Konings répond par la négative. Bien entendu le consommateur cuisine davantage chez lui et bricole parce que c’est plus avantageux pour son porte-monnaie, mais ce n’est pas seulement une question d’épargne.
« Certes, le rôle de la crise dans ce phénomène n’est pas négligeable. La stagnation de l’économie et les préoccupations écologiques sont en partie responsable de cette tendance, mais ce ne sont pas des conditions déterminantes. » En effet, même en ces temps difficiles, chacun veut partir en vacances, s’acheter une tablette… Le consommateur a besoin de confort, malgré la crise.
Par contre les conditions nécessaires pour faire de cette nouvelle dimension analogique une véritable tendance, sont d’une part le besoin évident qu’ont les gens de se soustraire à la pression de l’univers digital – bien que ce besoin soit souvent inconscient et non-exprimé – et d’autre part l’effet viral d’une sensibilisation à ce sujet. Plus l’on conscientisera les gens de la pression qu’exerce sur eux la technologie et de la nécessité de s’en évader de temps en temps, plus les gens en ressentiront le besoin.
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Traduction : Marie-Noëlle Masure