Le pêcheur offline et le chasseur online
« Le retailer physique est un pêcheur, le retailer online est un chasseur », estime le professeur Cor Molenaar. En d’autres termes, l’un est passif, alors que l’autre agit. Un commerçant offline attend que les clients décident de se rendre et d’acheter dans son magasin. Il peut tenter d’appâter le client, en plaçant une annonce dans le journal par exemple, mais cela ne va pas plus loin.
Par contre un pure player online part à la chasse aux clients : le SEO (optimisation pour les moteurs de recherche) permet de lui garantir une visibilité maximale via le moteur de recherche Google, il est très actif dans le domaine de l’e-mail marketing et place des bannières publicitaires pour attirer l’attention des e-acheteurs. Les e-commerçants connaissent parfaitement leur clientèle , savent où la trouver et comment la séduire.
Certes, actuellement les retailers physiques disposent des cartes de fidélité pour connaître leurs clients, mais quel usage en font-ils ? Ils donnent des réductions à la caisse, alors que la transaction a déjà eu lieu. « Ils n’essayent pas de construire une relation avec leurs clients », affirme Molenaar.
Une approche multi-sensorielle
Cor Molenaar s’étonne que les commerçants offline n’utilisent que deux des cinq sens, tout comme leurs concurrents online. C’est précisément dans ce domaine, que les commerçants offline ont un grand avantage. « Sur internet le consommateur utilise tout au plus deux sens : la vue et éventuellement l’ouïe. Le retailer physique ne fait pas mieux, alors qu’il pourrait stimuler tous les sens pour offrir une expérience en magasin bien plus riche. »
C’est pourquoi l’expert en marketing plaide pour une amélioration de l’expérience en magasin : « Ayez recours à des clips audio, des odeurs, des films, … les possibilités sont multiples. Veillez à ce que chaque rayon ait sa propre atmosphère. Le shopping doit être une activité agréable. Le magasin doit donner une impression de fête au client. »
Tout comme l’hôte est en grande partie responsable de la réussite d’une fête, le commerçant lui aussi à une fonction d’accueil à remplir. « Il y a quelques années j’ai lancé la notion ‘Het Nieuwe Winkelen’ (‘Le nouveau mode de shopping’), qui indiquait que le consommateur s’orientait d’abord via internet pour ensuite effectuer son achat soit online, soit offline. Aujourd’hui, on constate que le consommateur souhaite recevoir davantage de conseils du vendeur. Il veut qu’on l’aide dans son achat, car s’il a décidé de se rendre au magasin, c’est signe qu’il hésite encore et qu’il n’a pas osé commander en direct via internet. »
Dans cette optique Cor Molenaar est un fervent adepte d’internet en magasin. Grâce à l’utilisation de tablettes ou de colonnes d’information internet, le personnel peut fournir au client des informations précises et complètes et en même temps plus besoin d’étaler tout l’assortiment dans les rayons. Cela permet d’améliorer l’expérience d’achat en magasin, sans pour autant perdre de vue l’ancienne génération d’analphabètes digitaux.
Un magasin sur trois fermera ses portes
Comment les e-commerçants de leur côté peuvent-ils améliorer cette expérience d’achat ? Certains ouvrent des magasins physiques (pensez à Coolblue), mais celui qui veut garder sa place sur internet a tout intérêt à diffuser moins de textes, mais davantage d’images et de vidéos sur son site. « On peut faire des choses très amusantes avec des petits films vidéos, pour présenter et expliquer le produit. Cela plaira également à l’ancienne génération, car c’est à la fois accessible et informatif. »
Le professeur prétend pourtant qu’un magasin sur trois fermera ses portes ; une affirmation qu’il étaye par le calcul de la part actuelle des ventes en ligne et de la croissance attendue. Actuellement aux Pays-Bas la part de ventes online de courses non-quotidiennes représente 10%, mais on s’attend à ce que ce pourcentage atteigne les 30%. Sur notre marché limité, cela signifie donc qu’un magasin sur trois sera superflu.
Cette tendance est encore renforcée par le fait que de nombreux retailers retirent une partie de leur assortiment de leur magasin pour la placer online. Ainsi les commerçants peuvent se contenter d’espaces commerciaux plus restreint, et au bout compte le nombre de magasins diminuera.
Ce calcul, selon Cor Molenaar, est également valable pour le Belgique. « Bien que le pays évolue plus lentement au niveau de l’e-commerce, il ne faut pas sous-estimer la Belgique ! Actuellement le commerce en ligne représente 7% du chiffre de vente, mais à l’avenir cela évoluera vers les 20 à 25%. »
Innovation outre-Atlantique
Quant à savoir ce que l’avenir nous réserve, il est souvent intéressant de jeter un coup d’œil à l’étranger. Ainsi les Pays-Bas attendent depuis longtemps l’arrivée d’Amazon : le jour où cela arrivera, les grands acteurs actuels en subiront les conséquences. « Ils s’en apercevront très certainement. N’oublions pas qu’Amazon est un véritable innovateur et qu’il est 10% moins cher que les offreurs les meilleur marché en Belgique et aux Pays-Bas. »
Autre tendance qui nous vient d’outre-Atlantique : l’utilisation accrue des médias sociaux. Rien de neuf, direz-vous, mais selon le professeur, une deuxième génération d’utilisateurs de médias sociaux aurait déjà vu le jour. Alors que l’usage de la première génération se limitait à l’envoi de messages et de news feeds, actuellement l’usage des médias sociaux est bien plus poussé. « Une fois ancrés dans notre vie quotidienne, les médias sociaux auront un impact considérable », prédit Molenaar.
Le professeur Cor Molenaar donnera une conférence lors de l’avant-programme ‘Shopper experience marketing’ du Congrès Retaildetail du jeudi 25 avril à Schelle. Découvrez ici le programme dans sa totalité et inscrivez-vous via www.retaildetailcongres.be.
Traduction : Marie-Noëlle Masure