De nouveaux ‘flagship stores’ donnent au shopping une dimension artistique : à Londres des marques comme Louis Vuitton ou Vans ouvrent des ‘magasins à spectacle’ qui ressemblent davantage à une galerie d’art qu’à un espace commercial.
Art et spectacle en guise de retaildesign
Une nouvelle tendance émerge dans les rues commerçantes : des magasins où l’art et le spectacle sont omniprésents, où le décor parfait pour une photo Instagram importe davantage que les articles en rayon. Londres, destination de shopping par excellence, donne le ton : rien qu’en octobre, différentes marques de renommée mondiale y ont ouvert de gigantesques magasins porte-drapeau de plusieurs étages.
La célèbre Oxford Street, principale artère commerçante de la capitale britannique, a accueilli deux nouveaux magasins vedettes ce mois-ci : la prestigieuse enseigne de jouets américaine FAO Schwarz y a ouvert un shop-in-shop de 2.000 m² au sein du grand magasin Selfridges, tandis que juste en face le flagship store flambant neuf d’Adidas occupe quatre étages.
Les deux magasins privilégient l’expérience interactive. Chez FAO Schwarz les visiteurs, après avoir été accueillis par des collaborateurs déguisés en soldats de plomb, sont éblouis par d’énormes ours en peluche, un piano au sol, un vaisseau spatial grandeur nature ou encore une clinique d’adoption pour poupées. Le management s’attend à ce que le magasin devienne une véritable attraction touristique.
« Retour de la créativité dans la rue commerçante »
Juste en face Adidas épate la galerie avec son magasin à la pointe de la technologie : le magasin comprend cent ‘touch points’ digitaux, dont des miroirs intelligents équipés d’un système RFID dans les cabines d’essayage et une nouvelle application ‘Bring It to Me’, permettant au client de scanner des produits pour un achat immédiat. L’article, sorti du stock, est remis au client qui peut ensuite quitter le magasin sans devoir passer par la caisse.
A chaque étage des œuvres d’artistes londoniens, créées spécialement pour le magasin, offrent un spectacle étonnant. Parmi ces créations, une œuvre d’art digne d’Instagram, composée de mille drapeaux britanniques, symbolisant la diversité de « la ville des mille nations ». Dans la cave, où par une simple pression sur un bouton les parois et le sol changent de couleur et d’ambiance grâce à un système LED, l’équipementier sportif organise des événements « pour que la créativité revienne dans Oxford Street ».
« Venez pour les vêtements, restez pour l’art »
Le fait que les retailers investissent autant dans de nouveaux magasins peut paraître étonnant, sachant que ces cinq dernières années un magasin sur douze a dû fermer ses portes dans les rues commerçantes britanniques et que 20% des achats s’effectuent en ligne. Pourtant bon nombre de marques semblent considérer cette évolution comme une aubaine : à l’heure où le but premier des magasins n’est plus de vendre des produits, leur rôle devient davantage créatif, littéralement.
A Londres l’art occupe une place prépondérante à chaque ouverture de magasin. Elle Magazine les qualifient de ‘magasins à spectacle’, avec des expériences Instagram comme USP. Les magasins sont à la fois des galeries d’art et des lieux de shopping : « Venez pour les vêtements, restez pour l’art », ou vice versa.
Le nouveau magasin de la marque de streetwear Vans à Covent Garden va même jusqu’à consacrer un étage entier à l’exposition d’œuvres d’artistes émergents qui normalement ne seraient jamais exposées dans de telles quartiers à Londres », explique l’enseigne avec ambition. Chaque exposition durera trois mois.
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Ecran géant et sacs à main en version hyperluxueuse
Le flagship store renouvelé de Louis Vuitton sur New Bond Street offre un spectacle encore plus grandiose : après une rénovation qui aura duré pas moins de quatorze mois, la façade avec sa gigantesque étoile multicolore et l’intérieur aménagé comme une ‘galerie changeante’ font preuve d’un véritable sens artistique.
Le magasin expose des œuvres de 43 artistes, dont neuf pourraient avoir leur place dans les plus grands musées d’art moderne au monde. A l’entrée le regard du visiteur est immédiatement attiré par un gigantesque écran LED de James Turrell, qui a également créé une œuvre pour le nouveau magasin The Row – le label de mode des sœurs jumelles Olsen – situé non loin de là.
Mais comme il faut quand même vendre quelque chose, tous les magasins précités proposent une sélection de produits disponibles exclusivement dans le flagship store. Chez Louis Vuitton il s’agit de versions ‘hyperluxueuses’ de bijoux et de sacs à main. Adidas et Vans pour leur part présentent des articles en édition limitée, issus de collaborations locales.
Des heures de file devant le pop-up store de Pokemon
Les magasins physiques font donc un véritable comeback dans les rues commerçantes, avec parfois un succès retentissant, comme en témoigne le pop-up store de Pokemon dans le centre commercial Westfield London : les visiteurs y font jusqu’à cinq heures de file et une fois entrés dans le magasin se retrouvent souvent devant des rayons vides.
Westfield dit ne pas pouvoir suivre la demande ‘sans égal’ depuis l’ouverture le 18 octobre et affirme que certains produits pourraient être définitivement épuisés avant même la fermeture le 15 novembre. Chaque jour le magasin a été contraint de fermer ses portes plus tôt que prévu, malgré un réapprovisionnement quotidien et une limite de six articles par personne.
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Le magasin physique fait-il réellement son comeback ? L’art, la créativité et les expériences interactives insufflent une nouvelle vie aux magasins. Les enseignes choisissent d’aller encore plus loin que l’expérience en optant pour un réel spectacle : mieux vaut un magasin à spectacle que dix magasins ordinaires, tel est le raisonnement de Burberry. Le label britannique a en effet annoncé la fermeture de dix magasins, mais installe une nouvelle œuvre d’art de deux étages sur Regent Street à Londres.