La plupart des nouveautés dans le secteur FMCG se limitent à des élargissements d’assortiments sans risque. Heureusement certaines entreprises cherchent à chambouler le monde, mais hélas pas toujours avec succès.
Les flops du marketing
Récemment le ‘Museum of Failure’ (Le musée des échecs) a ouvert ses portes à Helsingborg en Suède. A l’affiche les grands flops du marketing et les innovations ratées : le New Coke des années ’80 est un exemple classique d’un flop FMCG. A l’époque Coca-Cola, face à la concurrence accrue de son éternel rival Pepsi, qui avec Pepsi Challenge tentait d’évincer son concurrent au niveau du goût, a voulu changer sa recette – son plus grand atout – et a lancé New Coke.
Bien que le nouveau cola, avec son goût un rien plus sucré, ait séduit les groupes-cibles lors de la phase pilote, l’introduction du produit sur le marché ne s’est pas déroulé sans embûches. Notamment dans le Sud des Etats-Unis, où les consommateurs se sont rebellés contre le nouveau cola, le considérant même comme une deuxième capitulation en faveur des Yankees.
Un stylo-bille féminin
Autre échec retentissant : le McDonald’s Arch Deluxe, un hamburger de luxe destiné aux consommateurs citadins ayant des revenus supérieurs à la moyenne. Coût de l’opération : 100 millions d’euros. Par contre les revenus n’ont pas suivi car le burger n’a pas réussi à séduire le groupe visé. Pourtant l’idée avait bel et bien du potentiel, car aujourd’hui plusieurs chaînes proposant des hamburgers haut de gamme ont le vent en poupe. Bref, ‘wrong time and wrong place’ pour le burger Arch Deluxe.
Dans la catégorie ‘innovations absurdes’ le stylo BIC ‘Cristal for her’ mérite d’être cité : un stylo-bille rose ou violet qui soi-disant convenait mieux aux mains féminines. Rappelons que le BIC Cristal est l’une des marques de stylos les mieux vendues au monde. Néanmoins en 2012 le management a estimé qu’il y avait encore un potentiel de croissance dans le groupe-cible des femmes. Hélas le produit n’a pas été bien accueilli, pire encore il a été tourné en ridicule sur les réseaux sociaux et sur des sites web comme Amazon.
Sur pilote automatique
Dès lors la question clé qui se pose est de savoir pourquoi certaines nouveautés échouent ? Les raisons sont multiples, mais la réponse à cette question peut également être formulée plus simplement : parce que le marché n’est pas demandeur. Le consommateur n’en éprouve pas le besoin (voir le stylo BIC) ou estime que la nouveauté ne constitue pas une amélioration par rapport à l’ancien produit (voir New Coke). Parfois il s’agit tout simplement d’un mauvais timing ou d’une mauvaise combinaison entre le produit et le groupe-cible, comme pour le hamburger de luxe de McDonald’s.
Le fait est que la majeure partie de notre liste de courses est fixée d’avance. Il s’agit des achats que l’on fait sur pilote automatique. Selon un article du Harvard Business Review (Why most product launches fail, Schneider/Hall, 2011), 85% des courses des ménages américains sont plus ou moins standards. Cela signifie donc qu’il ne reste que 15% à conquérir pour les nouveaux produits. Bref un champ d’action très limité.
Une étude de marché approfondie s’impose
Dès lors il est impératif que les entreprises réalisent une étude de marché approfondie, estiment les auteurs de l’article précité. Toutefois généralement elles se focalisent uniquement sur le développement du produit et le processus de production. Une fois le produit développé, reste alors le marché à définir.
« La réponse classique est : ‘nous n’avons pas encore effectué d’étude de marché, mais nous savons que cela marchera, c’est sûr’. A ce stade nous savons déjà si le lancement d’un produit sera un succès ou non. Et même si une étude a été réalisée, les questions posées ne sont souvent pas les bonnes ou alors certaines réponses sont ignorées », soulignent les auteurs. Parfois les nouveautés, notamment les grands projets comme New Coke, font leur propre chemin et les résultats d’étude sont analysés dans le contexte d’un lancement inévitable.
Deux tiers échouent
Il n’est donc pas surprenant que la majeure partie des nouveautés soient d’avance vouées à l’échec. Le ‘Breakthrough Innovation Report’ de Nielsen de 2014 révèle que deux tiers des 12.000 produits lancés depuis 2011 en Europe, ne se sont pas vendus à plus de 10.000 exemplaires. Trois quarts ont été définitivement abandonnés après un an. Selon Nielsen, le lancement réussi d’un produit sur le marché ne doit rien au hasard.
Johan Sjöstrand, co-auteur du rapport : « Lors de notre étude nous avons constaté que le succès n’est jamais le fruit du hasard. Bien au contraire le succès est le résultat de tentatives réfléchies visant à disrupter le processus d’innovation et à rompre les standards quotidiens, comme l’attitude du consommateur, les convictions fortement enracinés, les mécanismes de lancement et les comportements et structures au sein des organisations. »
Idéalistes
Nielsen formule également quatre règles de base à suivre. La première est sans doute la plus importante : quels sont les besoins des consommateurs ? Est-ce une nouvelle variante de déodorant pour toilette ou des chips sans graisse ? Dans un marché saturé avec des consommateurs quelque peu blasés, il n’est pas toujours facile pour les marketeurs et les développeurs de produits d’innover. Souvent les nouveautés radicales sont mal accueillies, d’autant plus dans des catégories où le consommateur achète sur pilote automatique.
Heureusement il y aura toujours des ‘idéalistes’ cherchant à changer la recette classique du Coca-Cola ou à convaincre le monde entier à rouler en Segway. En cas de succès vous aurez le monde – ou le marché – à vos pieds. En cas d’échec les chercheurs, consultants et journalistes auront de quoi se mettre sous la dent.