Qui sortira Peloton de la Bourse ? Avec Amazon et Nike, deux groupes majeurs, lorgnent la marque américaine de vélos d’appartement qui a fait fureur lors de la pandémie. L’action est cependant dans le creux de la vague et d’autres candidats font part de leur intérêt. Que lui trouvent-ils tous ?
Plus dure sera la chute
Peloton a fait fureur aux États-Unis pendant la pandémie : la marque ne se contente pas de vendre des hometrainers, elle a également développé toute une expérience autour de ceux-ci, comme du coaching en ligne et des vidéos d’entraînement. La période de confinement était par conséquent un rêve pour l’entreprise. Avec ses 2,5 millions de membres, l’entreprise a pesé une petite quarantaine de milliards d’euros l’an dernier…
Mais à présent que les salles de fitness ont rouvert, c’est la gueule de bois : l’action a perdu quelque 80 % de sa valeur en un an. Peloton ne vaut plus que sept milliards d’euros en Bourse et la faiblesse de la demande l’a même contrainte récemment à interrompre la production de nouveaux vélos d’appartement et de tapis de course. Des problèmes de sécurité, qui ont provoqué la mort d’un enfant et un rappel de produits, ont également nui à la marque.
Au point que l’investisseur Blackwells a envoyé une lettre ouverte incendiaire à une direction « incompétente » de l’entreprise et préconise la vente de l’action. Amazon et Nike ont immédiatement répondu à l’appel et fait part de leur intérêt, en particulier au cours actuel de l’action.
Un atout pour l’écosystème
Aux yeux d’Amazon et de Nike, une acquisition serait en tout cas intéressante dans le cadre de l’extension de leurs écosystèmes respectifs. Les deux entreprises veulent en effet offrir aux consommateurs une solution complète qui les fidélise autant que possible par de multiples canaux.
Nike, par exemple, ne se définit plus comme un fabricant de vêtements de sport, mais comme une entreprise technologique. Le spécialiste de la basket propose de nombreuses applications, investit sur un programme d’abonnement et veut offrir une foule de services supplémentaires à ses clients. Nike veut ainsi devenir un fournisseur de solutions de sport et une véritable « communauté » pour athlètes – le fait que la marque ait également fabriqué leurs chaussures passant au second plan. Peloton, qui propose à ses membres des équipements de fitness et du contenu, s’inscrit parfaitement dans ce schéma.
De son côté, Amazon se concentre de plus en plus sur les applications et outils liés à la santé, notamment avec le capteur d’activité Amazon Halo et son propre service de pharmacie. Le géant de l’e-commerce ne veut pas s’arrêter là : l’Everything Store de Jeff Bezos veut littéralement tout fournir aux clients, de leur dose quotidienne de films et séries (Amazon Prime Video) aux jeux vidéo (Twitch) en passant par le stockage dans le cloud (AWS). Amazon veut suivre les consommateurs tout au long de leur vie et répondre immédiatement au moindre de leur souhait, y compris lorsqu’ils sont sur leur vélo d’appartement. Jeff Bezos vous apportera-t-il bientôt une boisson de récupération et une barre protéinée ?
Rundle
Peloton intéresse d’autant plus pour les deux géants qu’elle applique un modèle « rundle ». Abréviation de « recurring revenue bundle », rundle désigne les modèles d’abonnement de plus en plus prisés par les marques et autres retailers. En plus d’acheter leur appareil de fitness, les clients de Peloton paient un abonnement pour accéder à des services supplémentaires (le fameux bundle), notamment des vidéos d’instruction, des séances vidéo et d’autres contenus. L’entreprise bénéficie ainsi de revenus récurrents, indépendants des ventes (variables) d’appareils et de leur utilisation réelle. Amazon en fait de même avec ses abonnements Amazon Prime, Nike avec ses applications payantes et ses programmes de fidélité.
Qui emportera le morceau ? Selon le site d’information Protocol, le meilleur « match » est probablement Nike. Le groupe dispose d’une base de clients importante et fidèle, mais ne vend pas encore d’appareils. En outre, les deux entreprises s’adressent déjà au même groupe cible : les gens qui possèdent un vélo Peloton l’utilisent généralement dans leur tenue Nike la plus moulante. Mais rien n’est fait. Le fondateur et la direction de Peloton détiendraient encore 80 % des droits de vote et n’auraient pas l’intention de vendre jusqu’à présent.
Vous voulez en savoir plus sur le modèle « rundle » et découvrir pourquoi les marques et retailers sont de plus en plus nombreux à se définir comme des écosystèmes ? Vous découvrirez bientôt tout ce qu’il faut savoir à ce sujet dans le livre The Future of Shopping : Re-set Re-Made Re-Tail de Jorg Snoeck et Pauline Neerman, à paraître ce printemps.