La crise sanitaire n’a pas que fait des ravages dans l’industrie du luxe, elle l’a surtout redessinée. « Le luxe sort de la crise avec plus de sens et plus dynamique que jamais », sont ainsi convaincus les analystes de Bain & Company.
Un nouveau sens du luxe
Le secteur du luxe sera complètement différent à l’horizon 2030. « Nous ne parlerons plus de l’industrie du luxe, mais du marché de l’excellence culturelle et créative rebelle », explique le bureau de consultance Bain & Company dans un nouveau rapport. Les gagnants seront ceux qui réussiront à conserver leur force opérationnelle en y ajoutant une touche de transgression.
Ils doivent oser réécrire les règles, car la crise sanitaire mondiale va redéfinir le secteur du luxe. Du rôle des boutiques au concept de luxe lui-même : après le Covid-19, le secteur ne sera plus jamais comme avant.
Moins de boutiques physiques
Le virus a déjà accéléré la numérisation de chaque aspect de notre vie. Sur le marché du luxe, les ventes en ligne ont bondi de 33 milliards d’euros à 49 milliards d’euros en un an. Leur part a doublé, passant de 12 % en 2019 à 23 % aujourd’hui.
Toutefois, cette augmentation spectaculaire a fait une victime de marque : le réseau de boutiques physiques des marques de luxe devrait se contracter en 2021. Les acteurs de la mode, en particulier, sont confrontés à une concurrence croissante de marques numériques qui sont très actives sur les médias sociaux et s’adressant directement aux consommateurs.
Nouveaux rebelles
Une vague de transformation inonde ainsi le secteur : comme dans le reste du retail, nous assistons à une polarisation croissante entre les nouveaux acteurs innovants et des valeurs établies qui accumulent du retard. Et la contraction subie en 2020 par tous les segments du luxe personnel en raison de la crise sanitaire ne fait qu’augmenter les enjeux.
L’écart de prix se creuse également : alors que le marché global diminue, les produits d’entrée de gamme enregistrent une croissance dans toutes les catégories. Cette année, ils ont représenté plus de 50 % des volumes de ventes. La quête de pertinence modifie ainsi les règles du jeu : les nouveaux modèles commerciaux offrent un luxe plus accessible, ce qui ne fait qu’accroître la concurrence des nouvelles marques rebelles.
Jets privés et activisme
De plus, la crise sanitaire a un impact durable sur le comportement des consommateurs : les voyages et les services risquent d’être à la traîne tant que le tourisme sera paralysé. C’est dans les biens d’expérience (une catégorie, qui, dans la définition de Bain, regroupe les œuvres d’art, les voitures de luxe, les jets privés et les yachts, les vins, les spiritueux et la gastronomie) que le redressement des activités devrait être la plus rapide, plus encore que dans les articles de luxe classiques. La reprise devrait ainsi être amorcée par les produits qui offrent une expérience.
Outre les questions de durabilité et d’environnement, la diversité et l’inclusion seront également des thèmes forts de 2020. Les jeunes générations en particulier – qui seront à l’origine de la croissance de 180 % du marché du luxe entre 2019 et 2025 – accordent une importance sans précédent à la lutte contre l’injustice sociale et raciale. Ces consommateurs « activistes » recherchent des marques qui correspondent à leur vision et à leurs valeurs.
« Les marques de luxe ont connu une année d’énormes bouleversements, mais nous pensons que le secteur sortira de la crise avec plus de sens et plus dynamique que jamais », conclut Federica Levato, associée chez Bain & Company et coauteur de l’étude.