Les retailers d’aujourd’hui se trouvent devant un choix très simple : soit ils accélèrent l’expérience en magasin, soit ils la ralentissent, affirme Cate Trotter d’Insider Trends, qui sera l’une des oratrices au RetailDetail Congress du 27 avril.
Etes-vous d’accord sur le fait qu’aujourd’hui les magasins sont plutôt des outils de marketing que des points de vente ?
C.T.: « Dans certains cas c’est certainement vrai. Songez à certains flagship stores, comme celui de Samsung à New York, où vous ne pouvez rien acheter, même si vous le vouliez. C’est en quelque sorte la cathédrale du retail axée sur l’expérience en magasin. Cette orientation extrême sur l’expérience est l’une des manières d’améliorer le vécu en magasin.
Une autre piste consiste à rendre le shopping plus rapide et plus efficace. Je pars toujours d’un cadre simple : le parcours client comprend un enchaînement de moments. Il vous faut donc déterminer quels sont les moments qui apportent ou non une valeur ajoutée. L’expérience client, qui plus est dans les magasins physiques, doit être débarrassée de tous les moments qui n’ajoutent pas de valeur, comme par exemple le fait de devoir chercher le produit que vous souhaitez, porter vos sacs ou encore faire la file.
En tant que retailer vous avez alors deux options : soit vous accélérez le processus, soit vous le ralentissez. Soit vous mettez l’accent sur les moments agréables, enrichissants et lents durant le shopping, soit vous rendez les moments ennuyeux aussi rapides et commodes que possible. Mais soyez très clair quant à l’expérience que vous promettez.
Certains retailers très malins misent sur cet aspect de commodité, comme la chaîne d’électronique Argos au Royaume-Uni : ils ouvrent des micro magasins et des points de vente de format plus réduit qui servent de points de retrait. Au Royaume-Uni 80% des ventes se font encore via des magasins physiques, qui ont donc encore toute leur raison d’être. En dotant les magasins de points de retrait, vous en ferez à nouveau des points de vente.
Les magasins peuvent également offrir tant l’option rapide que l’option lente, tout en servant le même client. Il ne s’agit pas de différents types de consommateurs, car le même client peut parfois avoir envie de faire tranquillement son shopping, alors qu’à d’autres moments il préfère le faire rapidement. Les marques intelligentes proposent donc les deux options, comme le nouveau Starbucks à Londres par exemple : l’établissement comprend une zone avec des places assises où des serveurs vous servent à table, ainsi qu’un comptoir pour les clients pressés, qui viennent retirer leur commande qu’ils ont déjà payée via l’appli. »
Le retail orienté sur l’expérience client est une tendance très présente actuellement. Cette tendance persistera-t-elle ou non ?
C.T.: « Je ne pense pas que cette tendance disparaîtra, il n’y aura pas de retour en arrière. Il y a aujourd’hui tant de technologies dont nous ne pouvons plus nous passer. Je crois en un ‘digital first retail’ : le rôle du magasin va changer, c’est indéniable. Les magasins qui ressemblent à des entrepôts sont voués à disparaître. Dans 10 à 15 ans ce type de magasins classiques n’existera plus. »
Pourriez-vous donner des exemples de retailers qui, selon vous, sont prêts pour l’avenir ?
C.T.: « J’essaie de ne pas toujours parler d’Amazon, mais on ne peut ignorer Amazon … La manière dont ils expérimentent et l’audace de leurs idées garantissent leur pérennité. Il ne s’agit pas tant de ce que vous faites maintenant en tant que retailer, mais plutôt d’un état d’esprit, d’un mode de pensée ! Chez Amazon ils pensent ‘en grand’, c’est incroyable.
La chaîne de bricolage Lowe’s aux Etats-Unis fait de même : bien qu’il s’agisse d’une ancienne enseigne DIY bien établie, avec de grands magasins traditionnels avec des contrats de bail de longue durée, la direction met tout en œuvre pour dynamiser la chaîne. Tout comme chez Amazon, ils réfléchissent à toutes sortes de technologies et à la manière de les implémenter dans leur business.
Ainsi dans le département ‘Lowe’s Innovation Labs’ ils expérimentent des technologies – qui pour l’instant ne sont pas encore assez au point ou trop chères pour être déployées dans les magasins – et les testent déjà en interne afin d’en déterminer les possibilités futures. Dans certains de leurs magasins à la Côte Ouest des USA il y a par exemple des robots qui vous indiquent où se trouve le produit que vous recherchez, qui peuvent vous adresser la parole en différents langues et qui peuvent scanner des produits. Pour l’instant cela ne leur rapporte peut-être pas une masse d’argent, mais à l’avenir cela pourrait devenir un avantage très concurrentiel. »
Pensez-vous qu’à l’avenir les robots remplaceront le personnel dans les magasins ?
C.T.: « Jusqu’à un certain point oui. Il y a déjà des magasins entièrement automatisés sans personnel, nous les appelons les automates de vente. A l’avenir il y aura certainement plus de machines et moins de gens dans l’ensemble de l’écosystème. A terme les tâches répétitives, qui n’ajoutent pas de valeur pour les clients, seront prises en charge par le hardware et le software. L’aspect du retail qui s’accélérera, sera automatisé. Selon moi, dans le futur les supermarchés discount par exemple fonctionneront sans personnel. »
Comment les petits commerçants peuvent-ils améliorer leur magasin moyennant un budget raisonnable ?
C.T.: « Je pense que pour un commerçant indépendant local il est intéressant notamment de s’affilier à une plateforme locale, où les consommateurs peuvent consulter votre stock. A Londres il existe l’appli Nearstreet, accessible à tous, qui permet de s’informer où un produit est disponible. Car rien n’est plus frustrant que de ne trouver nulle part le produit que vous recherchez.
Autre idée : faire en sorte que les clients puissent vous contacter, afin de faire mettre un article de côté. Par exemple : un client vous envoie un message pour vous dire qu’il est en route et viendra chercher un paquet de papier à imprimer. Préparez-le à la caisse, pour qu’il n’ait pas à chercher un parking et à parcourir tout le magasin. Ainsi vous améliorerez la rapidité et la commodité pour le client.
Comme déjà dit, il y a deux pistes : accélérer ou davantage de vécu. Ajoutez donc également des services qui apportent une plus-value et du vécu, comme des événements en magasin par exemple. Un partenariat avec d’autres marques peut également s’avérer très efficace : collaborez avec une ligne exclusive et vous vous promouvrez mutuellement.
Faites en sorte de toujours proposer des produits innovants et surprenants. Ayez toujours une longueur d’avance sur le client en lui proposant des choses qu’il ne connaît pas et qui l’intriguent. L’enseigne d’électronique Best Buy en est une bonne illustration : ils recherchent de nouvelles start-ups en technologie et leur donnent un espace dans leurs magasins. Ainsi les clients découvrent de nouveaux gadgets passionnants.
Mais savez-vous ce qui marche très bien aussi ? C’est tout simplement de demander à vos clients ce qu’ils attendent de vous ! Demandez à vos clients ce qu’ils recherchent dans votre magasin ou votre marque et vous obtiendrez des conseils surprenants. Découvrir leurs besoins est un réel enrichissement. »
Cate Trotter prendra la parole lors du programme principal du RetailDetail Congress 2017, qui se tiendra le 27 avril. Pour vous inscrire et pour obtenir de plus amples informations, cliquez ici.