L’intelligence des machines dépasse celle des humains, population mondiale et émissions de CO2 augmentent de concert, et une poignée de géants de la technologie s’empare du pouvoir. Il est grand temps d’opérer un Re-set, un Re-made du Re-tail. Jorg Snoeck explique au congrès RetailDetail à quoi pourrait ressembler le futur du commerce de détail.
L’avenir se dévoile déjà
Nous sommes au cœur d’une transformation mondiale : une pandémie, une guerre, une disruption numérique et une course aux ressources ont complètement remodelé le paysage du commerce de détail. Il n’était donc pas trop tôt pour donner une suite à The Future of Shopping, le très primé guide du retail coécrit par Jorg Snoeck et Pauline Neerman. The Future of Shopping: Re-set Re-made Re-tail sera ainsi présenté en avant-première au RetailDetail Congress, dans le cadre d’un exposé exclusif.
Quel est l’avenir du commerce ? Les nombreux indices dont nous disposons déjà permettent de brosser une première ébauche. Jorg Snoeck, fondateur de RetailDetail, lit l’avenir dans quatre événements récents.
1. Ikea et H&M s’unissent dans leur quête de talents créatifs
À Londres, Ikea et H&M apportent un exemple intelligent et inspirant de co-création. Ils ouvrent ensemble une boutique à Livat, le centre commercial d’Ikea à Hammersmith – un quartier créatif et arty de Londres – où les jeunes designers locaux pourront vendre leurs produits. Pour les deux retailers, il s’agit bien sûr d’un moyen de découvrir de nouveaux talents, de trouver de l’inspiration et de rester au plus près des nouvelles tendances.
La co-création, la coopération, voire la coopétition (collaboration avec les concurrents) sont l’avenir du retail et du FMCG. Personne ne peut s’en sortir seul aujourd’hui. Si même des géants comme Ikea et H&M en prennent conscience, le doute n’est plus permis. Les consommateurs sont plus divers que jamais et s’attendent à retrouver cette diversité dans les rues commerçantes. L’approche unique a vécu. Même les acteurs d’envergure mondiale vont puiser leur inspiration ailleurs et s’ouvrent aux autres.
2. Shein vaut 100 milliards de dollars
Shein s’attribue une valeur de 100 milliards de dollars, ce qui en ferait la troisième start-up mondiale. L’efficacité logistique chinoise et à une utilisation tout aussi typiquement chinoise de données permet à la boutique en ligne chinoise combine – en porte-à-faux avec toutes les tendances actuelles en matière de durabilité. C’est déjà l’application de vente au détail la plus téléchargée aux États-Unis, devant Amazon, et Shein ouvre aujourd’hui un pop-up shop avec Klarna à Londres. Preuve qu’ils ont décidé de s’attaquer au consommateur européen.
Le phénomène montre également que les entreprises chinoises sont aux manettes dans le nouveau monde du retail. C’en est fini des pâles copies : désormais, ce sont des innovateurs de premier plan. Tout le monde peut en tirer des enseignements. Ce que Shein réalise avec la fast-fashion polluante peut aussi être accompli de manière durable et qualitative : en optimisant le recours aux données et à la technologie, il est possible de produire exactement ce que les consommateurs souhaitent et achètent, avec beaucoup moins de déchets et de surplus.
3. Fortes hausses des prix et pénuries sont désormais inévitables
Nous vivons en période de pénurie. Les augmentations de prix et rayons vides touchent tous les supermarchés, et depuis l’an dernier, les matériaux de construction et l’électronique nécessitent également plusieurs mois d’attente. Mauvaise nouvelle : l’avenir risque de nous réserver d’autres désagréments de ce type. Pas seulement à cause de la guerre en Ukraine, de la pandémie ou d’autres perturbations temporaires. Une pression structurelle s’exerce sur notre planète et la chaîne d’approvisionnement mondialisée.
Un changement s’impose. Non seulement nous devons privilégier des aliments plus durables et locaux, moins dépendants de transports lointains et polluants, mais le « nearshoring » est également en plein essor dans le secteur non alimentaire. Afin de réduire notre dépendance à l’Extrême-Orient et aux pays à bas salaires – où les salaires ne sont plus si bas d’ailleurs –, la production est relocalisée à proximité de chez nous. Mais cela n’est pas nécessairement plus durable : dans le nord de l’Italie, les ateliers de confection autrefois si réputés de Prato sont aujourd’hui d’authentiques « sweatshops » où des Chinois produisent de la « mode italienne » à la chaîne.
4. Le plus grand Zara au monde ouvre ses portes à Madrid
Un Zara de près de 9 000 m² sur quatre étages : c’est ce que propose Inditex sur la Plaza de España, au cœur de Madrid. Un coup de folie à l’heure du commerce électronique ? Non, mais le rôle et la signification des magasins ont changé. Parallèlement aux mini-stores, aux espaces partagés et les shop-in-shops, les énormes « flagship stores » sont également de retour. Même chez des retailers comme Inditex qui font explicitement le pari de la numérisation et sont fiers de réaliser un quart de leur chiffre d’affaires en ligne.
Le magasin devient un lieu d’expérience et de service plutôt qu’un point de vente. Les clients peuvent y essayer les articles qu’ils ont fait mettre de côté en ligne, fouiner dans les rayons tout en commandant en ligne, et retirer ou retourner sans contact les articles achetés sur Internet. Sur les 9 000 m², il n’y a « que » 5 000 m² de zone de vente effective. Le reste est constitué d’entrepôts, en partie destinés à l’e-commerce.
Sont également à l’affiche du RetailDetail Congress du 28 avril à Anvers : un cocktail de plateformes multinationales et d’entrepreneurs locaux, dont Zalando, Alibaba, Rainpharma, La Bottega, Odette Lunettes et Cameleon. Suivez ce lien pour retrouver de plus amples informations et réserver vos billets.