A l’issue d’une enquête où le consommateur a pu faire entendre sa voix, l’exploitant de centres commerciaux Westfield a dégagé cinq grandes tendances pour la décennie à venir. Que veut le consommateur ? Un environnement social où plus de la moitié de la surface commerciale s’articulerait non plus autour des produits, mais autour de l’expérience.
Expérience sans prescription
Dans un nouveau rapport l’exploitant international de centres commerciaux Westfield s’est penché sur ce que souhaitaient les shoppers pour les dix années à venir. Une enquête menée auprès de 15.000 consommateurs de dix pays européens a permis de filtrer cinq grandes tendances sur le long terme, allant du besoin de technologie jusqu’ à la nostalgie.
La première tendance observée est l’aversion des consommateurs à l’égard des expériences shopping ‘prescrites’. Les consommateurs en ont assez que les retailers leur collent une étiquette et leur proposent des suggestions et assortiments ciblés. 56% des répondants se disent frustrés de recevoir des recommandations de produits incorrectes, principalement en ligne. De même d’ailleurs dans les magasins physiques où 60% des consommateurs préfèrent se voir présenter l’assortiment complet, plutôt qu’une sélection.
Les consommateurs déplorent l’utilisation inappropriée des données et préfèrent fureter librement et se laisser tenter par des achats impulsifs. Tout cela fait donc remonter la cote du magasin physique : 80% des répondants – voire même 90% aux Pays-Bas – disent apprécier le shopping dans un environnement physique, à condition que celui-ci parvienne à les surprendre.
Westfield plaide donc pour des magasins caméléons : des boutiques éphémères qui changent et se réinventent continuellement. A noter que les consommateurs européens espèrent trouver parmi ces pop-up shops, des ‘non-commerçants’, comme Netflix (47%) et Spotify (33%).
Les commerçants se font médecins
Malgré leurs critiques concernant les expériences shopping ‘prescrites’, les Européens ne sont opposés ni à l’utilisation des données, ni à la personnalisation. Au contraire, bon nombre d’entre eux sont favorables à une démarche encore plus poussée en ce sens : 31% des personnes interrogées se disent prêtes à partager leur ADN avec des entreprises, afin d’obtenir de meilleurs produits et services sur base de leurs données de santé. Le marché européen des tests ADN est estimé à 18 milliards d’euros. On remarque que plus les consommateurs sont jeunes, plus ils sont ouverts à ce genre d’idée.
Globalement la moitié des répondants (51%) souhaitent pouvoir bénéficier de consultations personnelles en magasin, afin de déterminer quels produits leur conviennent le mieux. Les commerçants deviennent en quelque sorte des médecins, capables par exemple de détecter la maladie d’Alzheimer ou de Parkinson à l’aide de la technologie vocale. Plus de 39% des personnes interrogées pensent qu’il serait intéressant de pouvoir se faire prescrire un régime alimentaire personnalisé en magasin.
La moitié du magasin dédié au fun
D’ici 2025 le modèle du retail sera totalement inversé : la majorité des consommateurs estiment que d’ici là plus de la moitié de la surface commerciale ne sera plus consacrée à la vente de produits, mais à l’expérience. Selon trois quarts des répondants, la transformation sera achevée d’ici 2027. Une aubaine pour les détaillants, car 81% des consommateurs disent être prêts à payer plus pour une bonne expérience shopping.
Consultations santé, workshops, jeux virtuels, … autant d’expériences qui ont leur place dans le magasin de demain. Une tendance qui rejoint l’idée du magasin comme plate-forme locale et surtout sociale. 42% des shoppers ont la nostalgie d’un environnement commercial aux allures de club social, comme des cafés où l’on jouerait des jeux de société ou des magasins où seraient organisés des événements sociaux pour une communauté locale.
Près de la moitié des Londoniens, principalement les jeunes (de moins de 55 ans), rêvent de magasins comme lieu de rencontre pour la communauté locale. Les expériences locales les plus demandées sont le théâtre interactif, les fêtes de quartier et les brocantes, mais également les bars à thème et les cafés pour animaux.
Aujourd’hui déjà les shoppers souhaitent voir 40% de la surface commerciale consacrée à l’expérience. Plus d’un quart des citadins veulent que l’espace réservé au travail et à l’enseignement soit plus important et 28% souhaitent que le retail accorde plus de place aux enseignes débutantes. Ces shoppers multidimensionnels recherchent des espaces aussi diversifiés qu’eux-mêmes, où ils pourront apprendre tout en faisant leur shopping ou en travaillant.
Des magasins-usines
L’une des tendances incontournables de la nouvelle décennie est évidemment la durabilité. Selon Westfield, dans le retail cela se traduira pas des magasins autosuffisants, où le processus de production se déroulera en magasin. Des magasins-usines en somme, avec des fermes sur le toit pour cultiver des ingrédients, des appareils d’impression 4D et une équipe créative instore pour adapter les produits à la demande.
71% des shoppers aimeraient que les produits soient fabriqués en magasin en leur présence ou que les produits préfabriqués soient personnalisés ou achevés sur place. La demande de produits locaux est également très explicite : 51% des consommateurs préfèrent les labels locaux aux labels connus.
La location comme mode de vie
Quoi qu’il en soit l’action est une nécessité, car 85% des clients – 290 millions de consommateurs dans toute l’Europe – exigent que les magasins du futur privilégient l’autosuffisance, tandis que 76% veulent que les détaillants intensifient leurs efforts en faveur du climat. 66% des shoppers disent d’ailleurs être prêts à payer plus pour des produits durables.
La question la plus urgente dans ce domaine, selon les consommateurs, est la problématique du plastique jetable : 60% d’entre eux plaident pour sa suppression. Les jeunes shoppers apprécient également les détaillants soucieux de la qualité de l’air et des produits locaux, tandis que les consommateurs plus âgés (55+) accordent une grande importance à l’aspect durable des produits et leur empreinte carbone.
En outre la location deviendra un véritable mode de vie : 45% des Européens préfèrent louer certains produits, plutôt que de les acheter. Chez les citadins ce pourcentage atteint même 50%. Les catégories les plus prisées pour la location sont l’aménagement de la maison (72%), la technologie (36%), ainsi que la mode et les produits de beauté (30%).