La pandémie constitue un point de basculement pour le commerce : le shopping ne sera plus jamais comme avant. Comment s’explique la domination de market places comme Amazon, et pourquoi la console de jeu est-elle le nouveau centre commercial ? Un nouveau rapport révèle des tendances claires. Gardez aussi un œil sur TikTok…
La nouvelle norme est numérique
L’e-commerce a fait figure de bouée de sauvetage pour de nombreux consommateurs pendant les confinements et tout indique qu’il a radicalement et définitivement modifié leur comportement. C’est l’une des conclusions de la grande étude The Future Shopper Report 2021 publiée par Wunderman Thompson. L’agence a interrogé plus de 28 000 consommateurs sur 17 marchés.
80 % d’entre eux ont déclaré qu’ils avaient modifié la façon dont ils achetaient et 62 % d’entre eux disent qu’ils feront désormais plus souvent appel aux canaux numériques. Leur pourcentage varie toutefois selon les régions : il est plus élevé en Asie et en Amérique latine, plus faible (29 %) en Europe.
Cette évolution s’explique avant tout par le fait que les consommateurs sont désormais plus familiers avec la technologie numérique : une conséquence logique de l’obligation d’utiliser ces outils. Une autre motivation est la peur : 41 % des consommateurs déclarent qu’ils ont toujours peur de se rendre dans un magasin.
L’omnichannel devient la norme
Mais cette évolution ne sonne pas le glas des magasins physiques. Pour 62 % des personnes interrogées, il reste important qu’une marque ait une boutique physique, et ils sont 64 % à préférer les marques présentes à la fois hors ligne et en ligne. En passant, ils attendent de ces marques qu’elles communiquent avec eux de manière transparente sur tous les canaux. Étonnamment, les jeunes semblent particulièrement attachés à cette approche omnichannel : ils attendent un maximum de flexibilité dans la manière et le moment de faire leurs achats.
Les consommateurs sont de plus en plus exigeants : trois quarts (73 %) d’entre eux estiment que les détaillants doivent s’améliorer pour offrir les produits, les services et l’expérience qu’ils souhaitent. Et plus de la moitié (56 %) d’entre affirment qu’ils n’achèteront pas chez quelqu’un qui ne répond pas à leurs attentes numériques.
Market places
Dans le monde entier, ce sont les grandes market places qui montrent la voie : Amazon en Occident, Tmall, Lazada et Taobao en Asie, Mercado Libre en Amérique latine. Les market places sont souvent les premiers endroits où les consommateurs cherchent de l’inspiration en ligne. Leur grande force est de savoir comment attirer et fidéliser leurs clients tout au long de leur parcours, de l’inspiration à l’achat en passant par la recherche. Par exemple, 80 % des clients veulent passer de l’inspiration à l’achat le plus rapidement possible. Une tendance favorable aux market places qui offrent l’expérience tout-en-un ultime.
Sur de nombreux marchés – y compris en Europe –, la recherche d’un produit commence plus souvent sur Amazon que sur Google. Sauf aux Pays-Bas, où elle commence sur d’autres « market places » : inutile de citer de nom. Il faut également noter que les médias sociaux ne cessent de gagner en importance : sur de nombreux marchés, ils constituent déjà la troisième option de recherche préférée.
Amazon, Mercado Libre et les market places asiatiques revendiquent déjà une « part du portefeuille » mondiale de 42 %. C’est en Allemagne que Amazon détient la plus grande part de marché : 33 %. Les supermarchés ont enregistré une énorme croissance en ligne à la suite de la pandémie et représentent déjà une part des dépenses en ligne de 18 %. Et la part du gâteau d’applications de livraison comme Deliveroo ou Uber Eats atteint déjà 11 %.
Direct-to-consumer
Les canaux direct-to-consumer des marques ont beaucoup gagné en popularité pendant la pandémie. Pour ces marques, ce canal est très intéressant : il leur permet de conserver le contrôle des données des clients, de l’expérience d’achat et du service. La demande a beaucoup augmenté depuis que les consommateurs ont rencontré des problèmes de livraison chez les principaux retailers durant le pic d’activité du premier confinement. Dans le secteur alimentaire, par exemple, des marques comme Heinz et Pepsi ont lancé des canaux D2C. Dans la mode, 23 % des achats en ligne ont lieu sur les sites web des marques.
Petit bémol toutefois : quand on leur demande de citer le canal d’achat en ligne qui leur a procuré la meilleure expérience, les consommateurs ne classent le D2C qu’en cinquième position avec un score moyen de 6 %, loin derrière Amazon (29 %) et les market places (23 %), ainsi que les sites web des retailers (11 %). Les marques doivent faire mieux en termes de service, de prix, d’offre et d’options de livraison.
Course à la livraison ?
L’un des principaux champs de bataille du commerce numérique est tout sauf numérique : la livraison. Si elle dépendait du consommateur, elle ne serait jamais assez rapide. Trois quarts (76 %) des consommateurs dans le monde s’attendent à être livrés en moins de trois jours, un tiers (30 %) en moins de 24 heures. Outre la rapidité, les clients en ligne attendent davantage d’options de livraison : délais de livraison précis, choix entre plusieurs lieux de livraison (domicile, lieu de travail ou sur la route), davantage de points de retrait, livraison sans contact…
Et le gagnant est… Amazon. Pour 36 % des consommateurs, Amazon arrive en tête en termes de délais de livraison. En Europe, la plate-forme réunit même plus de 60 % des suffrages. La concurrence accuse donc un net retard dans ce domaine. Mais il faut rappeler que la livraison n’est un problème que pour les produits physiques. Et que quelque 33 % des produits et services achetés en ligne sont numériques. Dans ce cas, les clients s’attendent à pouvoir télécharger le produit immédiatement, sans attendre.
TikTok contre Facebook
Le social commerce ne cesse de gagner en intérêt. 44 % des consommateurs interrogés disent avoir déjà effectué un achat sur une plateforme sociale. En Chine, ils sont déjà 69 % à l’avoir fait. Ces pourcentages vont encore augmenter : 56 % des consommateurs affirment qu’ils le feront plus fréquemment à l’avenir. Les jeunes font davantage appel aux médias sociaux.
Mais l’Europe ne semble pas suivre cette tendance. Seuls 22 % des Européens ont déjà acheté sur les médias sociaux et 70 % disent qu’ils ne le feront pas plus souvent. Plus encore : 40 % des consommateurs européens affirment que rien ne pourra les convaincre d’acheter plus souvent sur les médias sociaux à l’avenir. À ce titre, le faible intérêt de l’Europe pour le livestream shopping est révélateur : seuls 5 % des Européens se disent intéressés, contre 17 % des Asiatiques.
Facebook et Instagram sont de loin les canaux les plus populaires. Mais TikTok jouit d’une étonnante popularité en Chine : l’application vidéo prend déjà à son compte 68 % des achats sur les réseaux sociaux et 70 % des consommateurs la considèrent comme le meilleur canal pour le social shopping. Compte tenu de son énorme croissance aux États-Unis et en Europe, l’entreprise pourrait devenir un concurrent de taille pour Facebook et Instagram dans ce domaine.
Magasins numériques
Le futur du commerce sera numérique ou ne sera pas : 66 % des consommateurs attendent davantage d’innovation des marques et des retailers. Là encore, ce phénomène est particulièrement marqué en Asie et en Amérique latine. Quelles sont les innovations attendues ? 60 % des consommateurs sont enthousiastes à l’égard des paiements sans espèces, 62 % sont fans des magasins sans caisse. Les consommateurs s’attendent donc à ce que la technologie numérique soit également disponible dans les magasins physiques. 48 % des consommateurs sont ouverts aux paiements biométriques, par exemple avec identification par empreinte digitale ou scan de l’iris. Les générations plus âgées sont cependant nettement moins enthousiastes.
76 % des consommateurs sont prêts à partager l’historique de leurs achats et leurs préférences personnelles avec des entreprises en échange d’échantillons gratuits. 44 % se disent même intéressés par des achats « d’outre-tombe ». Le concept est simple : vous reliez un avatar basé sur l’IA à votre compte bancaire afin de continuer à faire des achats après votre décès et donc de prendre soin de vos proches… Une idée qui est beaucoup plus acceptée en Asie qu’en Europe.
Le gaming est le nouveau shopping
Les consommateurs passent de plus en plus de temps en ligne et utilisent des identités numériques ou des avatars pour interagir dans le monde virtuel. Nous l’observons déjà dans le monde des jeux vidéo. Le jeu vidéo est plus que jamais une activité sociale : les joueurs s’y font de nouveaux amis dans le monde entier, et ils ont eu tout le temps de jouer pendant les confinements.
Conséquence ? Ils deviennent aussi un canal de vente : 59 % des joueurs dépensent de l’argent par le biais des plateformes de jeux qu’ils utilisent. Et il ne s’agit pas seulement d’achats in-app liés au jeu lui-même : 56 % des joueurs déclarent vouloir dépenser de l’argent pour des produits destinés à leur avatar, leur moi numérique, comme des tenues et accessoires virtuels, par exemple. Un nouveau marché est en train de s’ouvrir.
Technologie et abonnements
L’acceptation des nouvelles technologies s’est également accélérée. Les achats par commande vocale sont en hausse : 38 % des consommateurs ont déjà utilisé des assistants intelligents comme Alexa ou Google Home pour effectuer des achats en ligne. Et ils sont 21 % à envisager de le faire à l’avenir. L’adoption est particulièrement élevée aux États-Unis, plus faible en Europe. L’abonnement à Amazon Prime constitue ici un facteur essentiel : 47 % des abonnés utilisent la commande vocale.
Après un démarrage compliqué, les achats automatiques – comme Instant Inkt de HP ou le réapprovisionnement en capsules de café Nespresso – commencent également à se généraliser, notamment chez les jeunes consommateurs. Les formules d’abonnement sont en revanche en déclin : seuls 38 % des consommateurs dans le monde sont encore abonnés à un à trois services. Il y a un an, ils étaient encore 56 %.
Vous trouverez de plus amples informations sur le Future Shopper Report 2021 de Wunderman Thompson ici.