Dire que les chaînes d’approvisionnement du commerce de détail sont perturbées est un euphémisme. Depuis la pandémie de coronavirus, tous les secteurs ont été touchés par de fortes fluctuations de la demande et des retards dans la logistique et la production. Pourtant, McKinsey identifie cinq mesures que les détaillants peuvent mettre en œuvre pour rendre leurs chaînes d’approvisionnement résistantes aux chocs.
Jusqu’à 40 % de bénéfices en moins
Lors de la flambée de la pandémie de coronavirus, la consommation a d’abord semblé suspendue : les usines ont fermé, les transports étaient à l’arrêt et les magasins ont dû fermer. Les marques ont annulé leurs commandes, les détaillants ont essayé de réduire leurs stocks autant que possible. Mais c’était sans compter sur le commerce électronique et la nouvelle frénésie d’achat des consommateurs contraints de rester chez eux : au cours des 18 derniers mois, la part des dépenses des ménages consacrée aux marchandises a augmenté pour la première fois en 60 ans aux États-Unis.
Les détaillants et les marques mettent tout en œuvre pour que les produits parviennent aux consommateurs le plus rapidement possible, et c’est précisément ce qui génère le chaos. Le monde entier étant interconnecté, toute perturbation prend instantanément des proportions inédites. L’effet boule de neige n’a peut-être jamais été aussi évident : les coûts de transport s’envolent, les bateaux sont bloqués dans les ports et les pénuries de main-d’œuvre se multiplient… et tout cela alors que l’importante période de fin d’année approche à grands pas.
McKinsey craint des baisses des bénéfices pouvant aller jusqu’à 40 % dans le secteur du commerce de détail si les perturbations dans la chaîne logistique ne sont pas maîtrisées. À long terme également, 15 à 20 % des bénéfices risquent de disparaître à cause de problèmes logistiques. Une nouvelle approche est nécessaire : avec des interventions radicales à court terme d’abord, et en développant de nouvelles stratégies permanentes ensuite.
1. Déléguer depuis une tour de contrôle
Qui détient la visibilité sur la chaîne d’approvisionnement ? Trop souvent, des équipes différentes gèrent des systèmes de données multiples et déconnectés. Par conséquent, les problèmes sont identifiés trop tard, et on ne recherche pas de solutions intégrées. McKinsey recommande plutôt de mettre en place une tour de contrôle centralisée. Cette tour de contrôle devrait connecter les systèmes de données et générer des informations sur l’ensemble de la chaîne. C’est un investissement rentable, car grâce à une plus grande transparence, le taux de remplissage s’améliore de 10 % en moyenne, tandis que le stock excédentaire diminue de 30 %.
La tour de contrôle peut également aider à répartir les stocks. De nombreux commerçants ont dû faire des choix difficiles quant à l’utilisation de leurs stocks pour répondre au mieux à la demande des clients et préserver leur chiffre d’affaires pendant les mois de pic de la pandémie. Ce sont des décisions qu’ils doivent continuer à prendre. Les promotions sont plus faciles à associer aux stocks disponibles et attendus ; savoir quelles régions ou quels magasins privilégier est crucial lors de problèmes de livraison.
2. Traiter différemment avec les fournisseurs
À qui donneriez-vous la priorité en période de pénurie : à un client de longue date ou à quelqu’un qui se lance par opportunisme ? Il en va de même pour les fournisseurs. Essayez d’investir dans des contrats d’approvisionnement à plus long terme (18 à 36 mois), notamment pour le fret maritime et la location d’espaces d’entreposage, de plus en plus coûteux.
Toutefois, cela ne signifie pas que les détaillants doivent mettre tous leurs œufs dans le même panier. Au contraire, ils doivent résister à la tentation de tout miser sur un seul fournisseur pour obtenir des remises sur le volume. Il vaut mieux diversifier ses ressources, afin de pouvoir rapidement augmenter la capacité si la demande fluctue ou si les limites de capacité d’un fournisseur sont facilement atteintes. McKinsey ne pense pas seulement aux fournisseurs de produits, mais également aux prestataires de services logistiques ou même aux services de livraison.
3. L’efficacité est plus importante que jamais
Les pénuries actuelles signifient que chaque maillon de la chaîne d’approvisionnement doit être utilisé de manière optimale. Tirer le meilleur parti de la capacité dont vous disposez est plus important que jamais, y compris dans le secteur logistique. Auparavant, les planificateurs de transport préféraient peut-être les commandes urgentes ou d’autres transports à marge plus élevée, mais ils sont désormais contraints de privilégier l’efficacité.
Il en va de même dans l’entrepôt : à mesure que les coûts de la main-d’œuvre augmentent, la valeur des améliorations de la productivité (telles que le réaménagement de l’entrepôt, la révision des normes de travail et l’investissement dans des opérations moins lourdes) augmente. En mettant l’accent sur ce point, les détaillants peuvent mieux se protéger contre les pénuries, y compris sur le marché du travail.
4. Cartographier le réseau
Pourquoi produire en Extrême-Orient quand on peut le faire plus localement ? N’est-il parfois pas préférable de livrer les commandes en ligne depuis les magasins plutôt que depuis les centres de distribution ? Ce sont des questions auxquelles les détaillants doivent répondre. Les récentes perturbations ont exposé de façon douloureuse les vulnérabilités du commerce de détail international : le réseau actuel ne répond plus aux besoins d’un avenir plus volatil. L’ensemble des fournisseurs, des sites, des zones géographiques et des actifs existants, des magasins aux centres de distribution, doivent être cartographiés.
Il est également grand temps de prendre de décisions sur la planification des achats. Comment les détaillants peuvent-ils mieux coordonner leurs achats, optimiser l’assortiment et faire en sorte que les livraisons soient le moins perturbées possible ? Mieux vaut opter pour la simplicité, recommande McKinsey. Plus tôt les détaillants soumettent leurs commandes, plus ils ont de chance qu’elles soient acceptées. De même, la réduction de la complexité des UGS peut réduire le risque de rupture de stock. En outre, en répartissant les stocks sur un réseau intégré, les détaillants peuvent rapprocher les marchandises de leur destination finale, ce qui réduit les coûts et augmente la probabilité de fournir les niveaux de service promis.
5. Investir dans l’automatisation
L’automatisation ne sert pas seulement à réduire les coûts de main-d’œuvre. Dans le monde actuel, avec un fort taux d’absentéisme et de rotation du personnel, l’automatisation est un moyen d’augmenter les niveaux de service et de réduire le risque de perte de chiffre d’affaires en raison de ruptures de stock. Une enquête de McKinsey réalisée auprès de responsables de la chaîne d’approvisionnement a révélé que 64 % des répondants considèrent désormais l’automatisation des fonctions d’entreposage comme une priorité absolue.
Comme les perturbations de la chaîne d’approvisionnement se poursuivent, l’avenir proche sera encore marqué par la volatilité et l’incertitude. Aucune intervention n’aura un impact immédiat et global, mais les détaillants qui osent transformer leur chaîne d’approvisionnement peuvent obtenir des résultats significatifs, selon McKinsey. Et, tout aussi important, ces efforts permettent de développer une résistance à long terme. Il est temps de se préparer à la nouvelle normalité.