Ceux qui ont cru qu’Amazon allait doucement cesser sa progression, n’ont qu’à se rhabiller : l’entreprise vaut plus de 500 milliards de dollars. L’ « effet Amazon » entrave les autres retailers et investisseurs. Comment doivent-ils réagir ?
300.000 entrepreneurs
A l’heure actuelle, l’entreprise recherche 50.000 nouveaux collaborateurs. C’est pour cette raison qu’Amazon va organiser une bourse au travail à différents endroits aux Etats-Unis le 2 août. L’entreprise espère y pourvoir la majeure partie de ces nouvelles places vacantes. Ces 50.000 emplois ne racontent pas toute l’histoire. L’entreprise souhaite engager pas moins de 130.000 nouveaux collaborateurs d’ici mi-2018, ce qui ferait grimper le nombre d’employés à près de 300.000, dix fois plus qu’en 2011.
Entre-temps, la valeur d’Amazon ne cesse de croître également. Depuis le début de cette année, elle a déjà progressé de 40 pour cent à près de 150 milliards de dollars (128 milliards d’euros) et il y a peu, l’entreprise a même percé le plafond des 500 milliards de dollars (425 milliards d’euros). Elle vaut deux fois plus que son principal concurrent Walmart qui doit se contenter de ‘seulement’ 235 milliards de dollars (200 milliards d’euros). A titre de comparaison, une entreprise comme AB InBev vaut 195 milliards d’euros.
Panique chez les investisseurs
Cette taille immense a également un effet dissuasif sur d’autres parties. Dès qu’Amazon pointe le bout de son nez, cela a un effet néfaste sur les actions de la concurrence. Ainsi, le gestionnaire de portefeuille Bespoke Investment Group a déjà établi un index ‘Death by Amazon’. Il regroupe les entreprises qui, à l’avenir, seront probablement les plus touchées par la progression continue d’Amazon.
Lorsque la reprise de Whole Foods par Amazon a été annoncée mi-juin, cet index a dégringolé de pas moins de 32 milliards de dollars (27,3 milliards d’euros). Il existe également d’autres exemples plus spécifiques. Lors de l’annonce de Prime Wardrobe, l’action de l’entreprise de mode Nordstrom a fortement chuté. Lorsque la collaboration avec Sears a été dévoilée, Home Depot en a subi les conséquences et lors de reprise de Whole Foods, l’action d’Ahold Delhaize a reculé de près de 10 pour cent. Cela montre bien la crainte des investisseurs lorsqu’Amazon vient se mêler de leurs affaires.
« Le plus marrant c’est qu’au niveau opérationnel, il ne se passe rien », précise l’analyste d’Actiam. « Rien que la crainte de pouvoir être touché par Amazon, provoque un revirement complet du sentiment. Les investisseurs recherchent quand même facilement le battage médiatique. » Avec comme conséquence que les actions se normalisent par la suite et que les investisseurs intelligents peuvent en tirer largement profit.
Le grand avantage d’Amazon par rapport à toutes ces autres entreprises et la raison pour laquelle les investisseurs la craignent tant, ce sont ses faibles marges. C’est ce qui lui permet d’avoir un rôle à jouer dans chaque secteur, mais cela incite également les autres entreprises à réfléchir à leur méthode de travail et à affronter la concurrence. Les entreprises qui réagissent de manière positive à la concurrence d’Amazon sont souvent récompensées par la hausse de leurs actions. Des entreprises comme Sears et Nike, qui ont conclu des accords de collaboration avec Amazon, ont vu leurs actions grimper en flèche.
Le désaccord avec Birkenstock
Malgré tout, il existe encore des entreprises qui ne souhaitent pas faire un pas de côté pour Amazon. L’année dernière, la marque de chaussures allemande Birkenstock a cessé toute forme de vente sur le webshop à cause des nombreuses contrefaçons présentes sur Amazon et le peu d’efforts faits par l’entreprise pour les éradiquer. Une décision très courageuse puisque cela faisait des années qu’Amazon était un des principaux vendeurs de la marque Birkenstock. Il ne s’agit d’ailleurs pas de la seule marque qui subit la progression de la contrefaçon, principalement à cause d’un afflux de vendeurs chinois, mais c’est une des seules entreprises qui a osé se révolter contre le géant Amazon.
Un an plus tard, la relation entre les deux parties semble ne pas s’être améliorée. Amazon aurait contacté des vendeurs de Birkenstock pour pouvoir quand même proposer les fameuses sandales sur leur webshop. David Kahan, le CEO de Birkenstock, n’a clairement pas apprécié.
Dans un mémo qu’il a envoyé à ses vendeurs, il utilise un langage fort pour faire comprendre ce qu’il pense d’Amazon et des vendeurs susceptibles de collaborer. « J’affirme clairement que tout retailer agréé qui pense à collaborer avec Amazon, même en ne vendant qu’une seule paire, sera exclu de manière définitive. Je répète : pour de bon », précise Kahan.
Plus loin dans la lettre, Kahan écrit que, tout au long de sa carrière, il n’a encore jamais rencontré une entreprise de la taille d’Amazon qui travaillait de la sorte, en prenant contact avec des retailers de la marque qui ne souhaite pas vendre sa marchandise chez elle. « Pour être honnête, je qualifie ces agissements d’Amazon de pathétique. Amazon n’arrive pas à se procurer la marque Birkenstock de façon légitime. C’est pour cette raison qu’elle propose monts et merveilles aux retailers qui peuvent ainsi gagner de l’argent rapidement. »
La lettre de Kahan à ses retailers est la preuve qu’il existe des entreprises qui ne sont pas ravies de la croissance d’Amazon et que les retailers qui collaborent avec l’entreprise ne le font pas toujours avec grande conviction. Amazon est souvent considéré comme étant un mal nécessaire.
Plus de la moitié des consommateurs américains utilisent Amazon pour débuter leur recherche d’un nouveau produit. Pour certaines marques, il est quasi inimaginable de ne pas être présent sur ce webshop. Kahan n’est clairement pas du même avis et décrit les pratiques d’Amazon comme étant de la ‘piraterie moderne’ et ‘un bras d’honneur envers toutes les marques, pas uniquement Birckenstock’. Pour l’instant, la chance que Birkenstock change d’avis et retrouve sa place sur Amazon, est extrêmement mince.