La forte présence d’Alibaba à l’aéroport de Liège est néfaste pour la Belgique, selon le professeur Jonathan Holslag de la VUB. L’export florissant promis aux entreprises belges ne s’est pas concrétisé, tandis que le gouvernement rate des millions d’euros de taxes à l’importation.
Pion du gouvernement chinois
Alibaba a été accueilli en fanfare à l’aéroport de Liège en 2018. Le géant chinois du commerce électronique s’est vu attribuer une plate-forme logistique européenne et une base d’atterrissage littérale sur place. Il était censé apporter de nouveaux emplois et de l’activité à la région, mais selon le professeur de la VUB Jonathan Holslag, il a surtout apporté un cheval de Troie. Dans son nouveau rapport, Holslag confirme certaines des conclusions des auteurs de RetailDetail, Jorg Snoeck et Pauline Neerman, dans leur livre The Future of Shopping.
Comme toutes les grandes entreprises chinoises, Alibaba est en partie un pion du gouvernement chinois, et sa plateforme logistique à Liège joue un rôle clé dans la stratégie « Belt and Road » du président Xi Jinping, qui veut faire revivre l’ancienne route de la soie avec des routes commerciales mondiales. Seulement, il ne s’agit pas seulement d’échanges de produits, et le trafic ne se fait pas toujours dans les deux sens.
Quasi exclusivement à sens unique
Dans une question parlementaire antérieure, le ministre de la Justice Van Quickenborne lui-même a dû admettre que l’espionnage et la fuite des données personnelles des citoyens via le hub d’Alibaba à Liège sont plus que probables. Après tout, toute entreprise chinoise doit donner au gouvernement l’accès à ses installations et à ses données.
Bien qu’Alibaba fasse régulièrement appel à des marques et des fabricants belges pour vendre sur ses plateformes en Chine, son trafic B2C serait lui aussi presque exclusivement constitué d’importations. Dans le rapport, les douaniers affirment que « presque aucune entreprise belge n’exporte par le biais des plateformes de commerce électronique d’Alibaba ».
Ce sont surtout les industries pharmaceutiques et chimiques qui utiliseraient l’aéroport pour leurs exportations, tandis qu’à l’inverse, pas moins de 650 millions de colis sont arrivés de Chine en 2021. Le poids à vide était supérieur de 21 % au poids en charge, selon l’étude.
Une parcelle sur cinq contrôlée
La vérification et le traitement de ces 650 millions de colis posent également des soucis, estime Holslag. Les services douaniers seraient absolument incapables d’assurer la sécurité et une taxation correcte. Plus encore, les fonctionnaires des douanes consultés estiment que « le trafic de l’e-commerce chinois est encore plus difficile à gérer que le commerce illégal de cocaïne, et les entreprises chinoises plus ingénieuses que la mafia de la drogue ». Par exemple, des produits sont mal étiquetés ou emballés pour donner l’impression qu’ils valent moins cher ou pour cacher le fait qu’il s’agit de contrefaçons.
Les douaniers, en sous-effectif, ne peuvent pas faire face : en 2022, à peine 19 % des colis d’Alibaba ont été contrôlés physiquement. Les colis d’une valeur inférieure à 150 euros sont encore moins souvent contrôlés. Ainsi, le gouvernement belge pourrait manquer des centaines de millions d’euros de droits d’importation chaque année. Lors d’une action de zèle durant qu’une journée, les amendes et les taxes se chiffraient déjà en millions.