Unilever menace de retirer ses publicités sur des plateformes en ligne, qui manquent de transparence et engendrent la division. C’est ce qu’a laissé entendre le responsable marketing Keith Weed lors du congrès pour annonceurs IAB.
« L’écosystème digital est obscur et frauduleux »
Unilever est le deuxième plus grand annonceur au monde – derrière Procter & Gamble – avec un budget marketing annuel de 7,7 milliards d’euros. Environ un quart de ce budget publicitaire est consacré au marketing online. Toutefois Keith Weed, chief marketing officer chez Unilever, a exprimé ses préoccupations concernant la crédibilité des médias en ligne lors du très influent congrès IAB à Londres.
Dans un discours sans détour s’adressant aux géants d’internet comme Facebook, Youtube, Google et Twitter, Weed déplore que « les ‘fake news’, le racisme, le sexisme, les terroristes diffusant des messages de haine, le contenu toxique ciblant les enfants, font qu’une partie de l’internet est à des kilomètres de là où nous l’avions imaginé. » Et d’ajouter : « L’actuel écosystème digital est obscur dans le meilleur des cas, frauduleux dans le pire des cas. »
C’est pourquoi Unilever dit ne plus vouloir investir dans des plateformes qui ne protègent pas les enfants, qui engendrent la division et qui favorisent la colère et la haine. Le géant de l’agroalimentaire veut collaborer uniquement avec des plateformes qui s’efforcent d’avoir un impact positif sur la société et créent une meilleure infrastructure digitale.
Pas un ultimatum, mais une nécessité de concertation
Pourtant le groupe anglo-néerlandais ne veut pas poser d’ultimatum aux médias en ligne, mais dit vouloir travailler à une solution. Pour ce faire Unilever a déjà entamé des discussions avec des partenaires online comme Facebook Snapchat, Twitter et Amazon. Selon Weed, les marques doivent elles aussi prendre leur responsabilité. L’an dernier lors du même congrès Procter & Gamble avait tenu un discours similaire : à l’époque le fabricant avait dénoncé le fait que bien souvent les publicités en ligne étaient inefficaces et que les médias online créaient de fausses attentes par de faux chiffres concernant le nombre de visites. P&G avait ensuite décidé de supprimer chaque trimestre 100 millions de dollars de son budget marketing online.
Toutefois selon Unilever, les consommateurs ne se préoccupent pas tant de faux chiffres de visites, de ce qui rapporte le plus aux annonceurs ou des algorithmes complexes utilisés pour les atteindre, mais plutôt de voir que les marques font de la publicité à côté de contenus favorisant la haine ou exploitant les enfants, d’être obligés de voir cent fois par jour la même publicité et de constater que leurs données sont utilisées à mauvais escient ou volées.
2018 sera soit une année de confiance, soit une année où les gens se retourneront contre les géants d’internet, estime Keith Weed. Le problème ne concerne pas uniquement le secteurs des médias et du marketing, il s’agit d’un problème général qui touche toutes les marques et tous les secteurs. « C’est un problème profond et systématique, une question de confiance qui risque de miner fondamentalement la relation entre les consommateurs et les marques », car « si la confiance du consommateur est entamée, nous en subirons tous les dommages », souligne-t-il.
Keith Weed élu WFA Global Marketer of the Year
Le hasard veut que Keith Weed vienne d’être couronné pour son engagement pars ses collègues marketeurs. Le directeur marketing & communication d’Unilever a été élu ‘Global Marketer of the Year’ de la World Federation of Advertisers (WFA).
Weed a gagné cet award, décerné pour la première fois cette année, avec 36% des voix : 6.000 professionnels du secteur du marketing ont émis leur vote en sa faveur. Parmi les autres nominés figuraient : Marc Pritchard (P&G), Raja Rajamannar (Mastercard), Jane Wakely (Mars), Glory Zhang (Huawei) et Hans-Christian Schwingen (Deutsche Telekom).