Les végétaliens sont-ils un groupe cible grandissant dont il va falloir tenir compte ? Les supermarchés doivent-ils prévoir des formules ou des divisions végétaliennes ? Nous constatons une hausse prudente des initiatives.
En forte progression
Ce ne sont que quelques exemples de communiqués de presse publiés ces dernières semaines : ‘La glace végétalienne connaît un franc succès’, ‘McDonalds lance le burger végétalien’, ‘Naturalia se met au vegan’, ‘La vente de produits 100% végétaliens a augmenté de 20% chez Delhaize’ … Effectivement, pour de plus en plus de (surtout jeunes) consommateurs, le végétarisme ne suffit pas. Le végétalisme, même s’il s’agit d’une petite niche, est en forte progression. Outre la santé, ce sont surtout la souffrance animale et l’écologie qui sont les principaux moteurs pour les adeptes.
C’est un véritable défi pour les foodretailers. Les végétaliens ne mangent aucun produit d’origine animale, donc pas d’œufs, ni de produits laitiers ou de miel, notamment. Des ingrédients qui sont pourtant présents dans une quantité de produits végétariens : le Quorn contient des protéines de poulet, beaucoup de burgers aux légumes contiennent du fromage, … De plus, le végétalisme au sens strict a également un impact sur les achats non alimentaires comme les cosmétiques (essais sur animaux !), la laine ou le cuir.
Pour les végétaliens purs, il ne reste qu’à lire les tous petits caractères sur les emballages ou à se rendre dans un magasin spécialisé. Le label ‘Vegan’ existe mais il n’est pas utilisé par tous les fabricants. De plus de plus de retailers européens développent des concepts de magasin végétaliens et des concepts in-store pour répondre aux demandes de ce petit mais très intéressant groupe cible en forte croissance. Avec plus ou moins de succès.
Paris et Londres
Naturalia Vegan est l’une des plus récentes formules de magasins végétaliens, une spin-off végétalienne de la chaîne bio française Naturalia qui connaît un grand succès. Elle fait partie du groupe Casino et elle exploite quelque 160 magasins bio. Les premiers points de vente ont ouvert leurs portes l’été dernier à Paris et à Vincennes (à l’est de la capitale). Elles ne vendent que des produits 100% végétaliens et ont environ 2.000 références en rayon. De plus, tous les produits sont d’origine biologique. C’est une première en France.
Le retailer souligne qu’il s’agit d’un test. Etonnant : la direction n’a pas pris cette décision sur base d’une étude de marché, mais suite aux conseils des collaborateurs de magasin qui signalaient une croissance de la demande de produits 100% végétaux. Un concept de magasin végétalien va faciliter la vie des végétaliens, et le groupe cible, bien qu’il soit limité, sera suffisamment motivé pour se déplacer vers un magasin spécialisé, tel est le raisonnement.
Au mois de mai dernier, le premier supermarché végétalien annex webshop a ouvert ses portes à Londres. Greenbay s’était déjà installé à proximité de deux restaurants végétaliens et d’une pizzeria végétalienne dans le quartier huppé de West Kensington. Les clients y trouvent plus de mille références d’origine végétale (l’offre est en développement constant) et les commandes online peuvent même être livrées dans le monde entier. Les initiateurs prévoient d’ouvrir d’autres points de vente à Londres ces prochaines années.
Un havre de paix sûr
Un peu plus loin, en Australie, on trouve The Cruelty Free Shop avec des enseignes à Sydney, Melbourne, Brisbane et Canberra. Ils proposent plus de 3.500 produits végétaliens. Le magasin de Melbourne prétend être le plus grand magasin végétalien au monde.
Cette année, le premier supermarché végétalien a ouvert à Tel Aviv en Israël. Il porte le nom de Gal Hayarok (‘vague verte’) et propose plus de 4.000 produits d’origine végétale sur une superficie néanmoins limitée de 100 m². Il s’agit notamment de fruits et de légumes, d’alternatives aux produits laitiers, de repas, de pâtisseries, de glaces, de snacks, … Les fondateurs Refael Avraham et Eylon Zakzer nomment cet endroit un ‘havre de paix sûr’ pour les végétaliens qui peuvent être rassurés sur la composition 100% végétale des produits proposés. Ils prévoient d’ouvrir cinq autres points de vente d’ici la fin de l’année. Pour lancer leur projet, ils se sont inspirés du pionnier allemand, Veganz.
Facile d’accès
C’est un peu ambigu puisque l’histoire de Veganz ne connaît pas le succès escompté. La toute première chaîne de supermarchés végétaliens au monde a été fondée en 2011 par l’entrepreneur allemand Jan Bredack, avec l’ambition de proposer un style de vie végétalien au plus grand nombre. L’assortiment compte environ 4.500 références, dont de nombreuses sont d’origine biologique. Le retailer souhaite être facile d’accès : 80% des clients ne sont pas végétariens ni végétaliens, mais des consommateurs qui cherchent à limiter leur consommation de viande et de produits laitiers pour des raisons de santé ou d’écologie.
La chaîne s’est rapidement étendue à neuf succursales et, à un moment donné, elle visait même les soixante filiales. Aujourd’hui, il ne reste plus que quatre magasins : trois à Berlin et un à Prague. L’offre végétalienne en croissance dans de nombreux supermarchés a miné la viabilité du concept, selon le fondateur qui a changé son fusil d’épaule. Aujourd’hui, les produits Veganz sont également disponibles dans des magasins comme Globus, Edeka, Spar, Marktkauf, Metro et Albert Heijn.
Nous sommes de toute façon face à une tendance mondiale. Et quelle est la situation chez nous, alors ? En Belgique, le nombre de restaurants végétaliens est en progression, mais nous ne connaissons pas (encore) le nombre de magasins végétaliens. Albert Heijn se profile comme étant la destination la plus prisée des végétaliens. Delhaize suit la tendance. Aux Pays-Bas, la situation est légèrement plus avancée : vous y trouvez par exemple Vegansuper dans la ville estudiantine de Groningen, un projet partiellement financé par crowdfunding. Ou Veggie4u à La Haye et Vegabond à Amsterdam.
Pas bon marché
Jusqu’à présent, on trouve les magasins végétaliens uniquement dans les grandes villes et cela semble logique. Peut-être qu’un concept de magasin entièrement végétalien est trop ambitieux pour un groupe cible si restreint. La chaîne de supermarchés danoise Irma (qui fait partie de Coop Danmark) adopte une approche différente : elle rajoute une division végétale du nom de ‘Det Grønne Måltid’ (‘le repas vert’) dans ses magasins existants. Les clients y trouve nt environ 150 références. L’initiative devrait être rapidement déployée dans tous les quatre-vingts points de vente de la chaîne. La chaîne danoise Meny dispose également d’un rayon ‘sans viande’ dans ses magasins. Et l’entreprise finlandaise Kesko réserve ce que l’on appelle des rayons ‘Vege’ pour ses produits végétaliens. Le département est facilement reconnaissable à la signalisation verte qui attire l’attention. Suite à l’introduction de ce concept, le retailer estime que la vente des protéines végétales a progressé de 50% en deux ans de temps.
Est-ce un marché lucratif ? Quoi qu’il en soit, les végétaliens motivés sont prêts à y consacrer de l’argent. La plupart des produits végétaliens sont tout sauf bon marché. La mayonnaise sans œufs coûte presque deux fois plus cher que la version standard, et cela vaut également pour le fromage végétalien. Vous n’avez donc aucun intérêt à brader les prix de ces produits. De quoi faire de bonnes affaires. Une division végétalienne peut donc être une bonne idée. Quand même une idée à creuser ?