Il existe aujourd’hui 690 magasins bio en Belgique, la majorité étant tenus par des commerçants indépendants. Ils gagnent des parts de marché sur les supermarchés, mais doivent rechercher des économies d’échelle : « La consolidation est inévitable. »
De grandes différences régionales
Le bio est un marché en pleine croissance : le chiffre d’affaires a grimpé à 779 millions d’euros en 2019. Si bien que le bio représente une part de marché de 3,4 % en Belgique. En Wallonie, cette part est même de 4,9 %. Les magasins bio sont également de plus en plus nombreux : on en compte actuellement 690, selon une récente étude menée par le spécialiste du géomarketing Sirius Insight en collaboration avec le consultant Sales4Bio. « Le développement du marché bio a jusqu’à présent beaucoup reposé sur le ressenti et l’opportunisme. Mais la pression concurrentielle augmente : il est temps de prendre des décisions plus réfléchies, basées sur des chiffres », déclare Karolien Sottiaux de Sirius Insight.
À peine 30 % des magasins bio font partie d’une chaîne comme Bio-Planet, Färm, Origin’o ou Ekivrac. Près de la moitié sont en Wallonie. « Il existe d’énormes différences entre la Flandre et la Wallonie. Non seulement les consommateurs flamands sont moins intéressés par les produits bio, mais ils disposent également de moins de magasins et ont moins tendance à combiner différents magasins. Pourtant, le marché est là : la population est plus nombreuse, le pouvoir d’achat est plus élevé. La catégorie des utilisateurs occasionnels est importante : sept consommateurs sur dix achètent parfois des produits bio. Il s’agit maintenant de convaincre et de fidéliser ce groupe de clients. Et cela ne doit pas non plus coûter trop cher. C’est la raison pour laquelle les marques hollandaises ont plus de succès en Flandre qu’en Wallonie : elles sont moins chères. »
Prise de conscience
Il convient de souligner que les magasins indépendants gagnent des parts de marché sur les grands supermarchés, qui misent pourtant aussi beaucoup sur les produits bio. « En 2018, 60 % des consommateurs de produits bio achetaient leurs produits bio exclusivement dans les supermarchés, tandis qu’ils sont 53 % en 2020. Plus de consommateurs combinent les achats au supermarché avec les achats en magasin spécialisé : ce pourcentage est passé de 25 à 30 %. »
Comment expliquer cette évolution ? « Nous assistons à un changement de comportement des consommateurs, qui a été renforcé par le confinement : les gens veulent acheter localement, consommer différemment, savoir d’où viennent les produits… Ils font une distinction entre le label bio et l’éthique bio », explique Mélanie Longin de Sales4Bio. « Ils savent que le commerçant local achète ses produits à proximité. Il y a une véritable prise de conscience. » Les détaillants alimentaires tels que Carrefour et Delhaize s’efforcent désormais d’inclure de petites marques biologiques locales dans leur offre. Cela pose un dilemme aux producteurs, car les magasins bio ne se réjouissent évidemment pas de voir leurs marques exclusives de produits bio exposées dans les supermarchés.
Croissance des systèmes de franchise
La capacité des commerçants indépendants en produits bio est-elle suffisante ? « En France, la plupart des magasins bio font désormais partie d’une chaîne », explique Longin. Une consolidation est également attendue en Belgique : « Je suppose que les systèmes de franchise vont continuer à se développer : pensez à Ekivrac en Wallonie, à Färm… Grâce à la force de leur enseigne, ils peuvent convaincre des magasins indépendants de s’associer avec eux pour réaliser des économies d’échelle. Le secteur de la vente en gros derrière ces magasins bio se consolide également. Le grossiste Hygiena fait désormais partie du groupe français Compagnie Biodiversité. Pensez aussi à la récente fusion du hollandais Udea avec Biofresh : tous les magasins Origin’O deviendront à terme des Ekoplaza. Bio c’ Bon et La Vie Claire viennent de France. »
La crise du coronavirus a-t-elle généré une croissance ? Le constat est mitigé : « Le confinement a été intense, mais les mois suivants ont été très calmes. Les magasins bio ont certes attiré de nouveaux clients, mais seul peut-être 10 % ont été fidélisés. À Bruxelles, plusieurs magasins sont en grande difficulté : les bureaux sont vides, les gens travaillent à domicile, il n’y a pas de passage… »
Pourtant, nos interlocuteurs soulignent qu’il y a du potentiel : « Le nombre de personnes qui achètent des produits biologiques augmente d’année en année. On peut s’attendre à ce que les petits magasins spécialisés dans le bio évoluent davantage vers le franchisage et que les grands supermarchés se transforment également progressivement. Il y a encore de la place sur le marché, il y a encore des manques : dans certaines provinces, l’offre est encore insuffisante. »
Image ; répartition géographique des chaînes bio en Belgique (Source Sirius Insight)