À l’heure où de nombreux secteurs suppriment les intermédiaires, les importateurs et distributeurs se targuent de jouer un rôle de plus en plus important dans le secteur FMCG. « Nous nous considérons comme le prolongement de notre donneur d’ordre. »
Investir dans la croissance
Importateur, distributeur, agent, courtier… autant d’appellations plus ou moins synonymes. Le dénominateur commun ? « Nous sommes des créateurs de marques et de marchés. Nous possédons une connaissance pointue de nos catégories de produits. Nous restons aussi à l’affût des tendances à l’œuvre dans le monde entier et les transposons sur nos marchés locaux », explique Ludo Sleurs, administrateur délégué du courtier en denrées alimentaires PAB Benelux, qui distribue des marques telles que Tabasco, Kikkoman, Maille, Hero Baby, Panzani, Weight Watchers ou encore William Saurin.
L’entreprise a démarré ses activités dans l’épicerie sèche avant d’élargir son terrain d’action aux produits frais, avec des marques comme Benecol et Innocent. « Notre rôle va bien plus loin que de veiller à ce que les produits se retrouvent en rayon », raconte-t-il. « En tant qu’importateur, nous prenons aussi des risques. Nous investissons dans le marketing, le développement produit, la vente… Nous contribuons ainsi à la croissance des marques. Nous accordons toujours la priorité au consommateur et l’approchons via différents canaux. Il est parfois préférable de lancer une marque dans le canal horeca avant de s’attaquer au retail. C’est notamment la stratégie adoptée pour un produit comme Tabasco. »
De vrais partenaires
Nous nous entretenons avec Ludo Sleurs et David O’Neill, CEO de l’ESMA, l’association européenne de vente et marketing (voir encadré). Tous deux sont convaincus que les importateurs et les distributeurs ont un bel avenir devant eux. Leur manière unique de collaborer avec les producteurs et retailers ou grossistes présente une foule d’avantage pour tous les intéressés.
Tant les retailers que les fabricants ont besoin des importateurs ou des distributeurs, affirme M. O’Neill. Les courtiers suivent l’évolution des tendances de consommation de près, y compris au-delà des frontières. Les modes apparaissant en Asie ou aux États-Unis arrivent de plus en plus vite en Europe. Malheureusement, les acheteurs et responsables de catégories sont souvent trop absorbés par la gestion courante des catégories existantes. En mettant l’accent sur le prix le plus bas, ils passent parfois à côté d’opportunités en matière d’innovation.
« Les retailers ont aussi déjà tellement de fournisseurs qu’ils ne veulent pas ajouter encore plus de complexité. C’est pourquoi ils dirigent parfois eux-mêmes les marques innovantes de moindre envergure vers un courtier. Nous sommes de vrais partenaires pour eux. On pourrait comparer le succès des courtiers à celui de la franchise dans le retail : un modèle qui implique également davantage de flexibilité et des coûts plus bas. »
Modèle de coûts variable
Pour les fabricants de taille modeste ou locaux, les importateurs représentent la voie d’accès la plus rapide à de nouveaux marchés. Souvent, ces organisations ne disposent pas des connaissances ni des ressources nécessaires pour créer leurs propres divisions à l’étranger. Les multinationales font elles aussi appel aux brokers pour certaines de leurs marques, lorsque le marché est trop restreint ou trop spécialisé pour s’en occuper elles-mêmes, ou tout simplement parce qu’elles ne peuvent pas se concentrer sur plusieurs centaines de marques à la fois.
« Les grands fabricants remettent constamment leur modèle d’affaires et leur structure de coûts en question », témoigne David O’Neill. « Il arrive qu’ils se rendent compte qu’il est préférable de passer d’un modèle de coûts fixes à un système de coûts variables, auquel cas ils se mettent en quête de partenaires. Un groupe comme Nestlé a plus de 2 000 marques en portefeuille à l’échelle mondiale. Autant dire qu’il est impossible de toutes les gérer avec la même diligence. Le groupe s’occupe donc lui-même de ses marques phares, mais sous-traite la gestion des autres. Les importateurs ne sont donc pas de simples intermédiaires. Ils sont réellement le prolongement de l’entreprise, selon la devise ‘votre marque est notre marque’. Ils sont le gage de coûts réduits et de meilleurs résultats. »
« Si nous faisons notre travail correctement, il arrive que le propriétaire décide de reprendre le contrôle de sa marque », ajoute Ludo Sleurs. « Cela fait partie du jeu… »
Proximité vis-à-vis du consommateur
« Si les multinationales font appel à nous, c’est parce que nous sommes capables de développer des marques moins réputées », estime Ludo Sleurs. « Nous sommes à l’origine du succès de Maille, la marque de moutarde premium d’Unilever. Nous sommes aussi en mesure d’accorder l’attention nécessaire aux plus petites catégories. Prenez l’exemple de Kikkoman : cette marque était très confidentielle en Belgique, mais enregistre aujourd’hui une croissance à deux chiffres. La sauce soja profite du succès des sushis. Nous apportons de la valeur à la catégorie grâce à notre connaissance du marché local, à notre flexibilité et à notre approche ‘feet on the street’. Nous sommes constamment à la recherche de nouvelles opportunités et cultivons la proximité vis-à-vis du consommateur. Dans la catégorie de l’alimentation pour bébé, nous avons développé un produit spécialement destiné au marché belge pour Hero Baby : des panades aux authentiques biscuits Betterfood. »
David O’Neill cite l’exemple de la catégorie des smoothies, qui a connu une croissance très soutenue au cours de la dernière décennie. « Le succès phénoménal de la gamme Innocent a même su susciter la convoitise de Coca-Cola. Mais l’entreprise continue de faire confiance à PAB pour cette catégorie spécifique. »
Et c’est tout bénéfice pour le consommateur. « Nous sommes persuadés qu’un tas de bonnes idées ne seraient jamais parvenues jusqu’au consommateur sans notre intervention. Comment sortir du lot parmi les 20 000 références proposées en supermarché ? Comment faire remarquer votre petite marque parmi l’offre gigantesque présentée sur un salon professionnel comme le SIAL ? Vous aider à relever ces défis est notre mission ! »
À propos de l’ESMA
L’ESMA, en toutes lettres European Sales and Marketing Association (Association européenne de vente et marketing), a été fondée en 1977 et compte actuellement plus de 120 membres originaires de 34 pays d’Europe. Globalement, ceux-ci réalisent un chiffre d’affaires de 9 milliards d’euros. En tant que courtiers, agents ou importateurs, ces entreprises commercialisent plus de 1 000 marques sur le marché européen. Outre PAB Benelux, la Belgique est entre autres représentée par Pietercil Group et Solinest.
Le réseautage et le partage de connaissances sont notamment de mise lors du congrès annuel de l’association. « L’ESMA met en relation les producteurs à la recherche de nouveaux marchés et les distributeurs en quête de nouvelles marques. Notre association est unique en Europe. Devenir membre n’est pas donné à tout le monde. Nous privilégions la qualité plutôt que la quantité. Les candidats doivent être crédibles et financièrement stables. »