Dans la philosophie de Bi’OK, qui vient d’ouvrir son quatrième magasin à Grez-Doiceau, la passion prime sur le bénéfice à tout prix. RetailDetail Food a rencontré Adrienne Rigo et Pauline Henrion, têtes pensantes et âmes du concept.
Un saut dans l’inconnu
En matière de supermarchés bio, les habitants du Brabant Wallon sont particulièrement bien lotis. Le haut niveau de revenus de la région n’y est sans doute pas étranger. Bi’Ok n’est pas le moins intéressant des retailers bio, loin s’en faut. L’enseigne possède aujourd’hui quatre implantations : à Corbaix, Thorembais, Bois-de-Villers et, depuis le 4 juin, Grez-Doiceau. La PME a récemment franchi un nouveau palier sur le plan de professionnalisation mais sans rien perdre de l’esprit qui a présidé à sa création.
L’aventure a commencé par hasard en 2006, dans la foulée du travail de fin d’études d’Adrienne Rigo à l’ICHEC Management School. Cherchant de nouveaux débouchés pour une ferme, elle est arrivée à la conclusion qu’un magasin dans la ferme n’était pas viable même si, parallèlement, il existait un grand intérêt des consommateurs pour des produits agricoles locaux. Voyant là une opportunité, Adrienne s’est lancée dans l’aventure : elle a ouvert son propre magasin. « Mon expérience du retail était assez limitée. Mon papa était franchisé Delhaize et j’avais travaillé comme étudiante dans ses Proxy. »
Le saut dans l’inconnu s’est révélé un pari gagnant : la clientèle ne cesse de s’élargir et, depuis ses débuts, Bi’OK peut se prévaloir d’une belle croissance organique. Les nouveaux points de vente répondent à une demande de la clientèle. Et la rencontre avec Pauline Henrion – véritable ‘âme sœur’ – a encore accéléré les choses : « Nous travaillons de manière très intuitive, nous laissant guider par nos rencontres » confie Pauline.
Ne pas vendre son âme
Le grand intérêt de candidats partenaires-franchisés a incité les entrepreneuses, avec l’aide d’un consultant, à formaliser le concept Bi’OK dans un ‘road book’. « En fin de compte, nous avons refusé tous les candidats. Leurs motivations étaient exclusivement commerciales alors que nous voulons faire les choses différemment. Nous sommes guidées par la passion. » Attirés par la success story, beaucoup d’investisseurs ont également montré leur intérêt. « Mais nous ne tenons pas à grandir à tout prix. Nous ne vendrons pas notre âme au diable. »
La vision de Bi’OK va plus loin que la rentabilité pure et dure. « C’est là notre valeur ajoutée car nous ne pouvons pas être concurrentielles sur le plan strict des prix. Nos clients trouvent chez nous quelque chose de plus ‘profond’, de plus ‘humain’. Et ils nous aident à nous améliorer sans cesse. »
Une grande élasticité des prix
Le fait d’être plus cher que les supermarchés courants ne pénalise pas Bi’OK. « Nous constatons une grande élasticité des prix. Notre clientèle ne pas doit trouver chez nous des produits bio identiques à ceux de la grande distribution. Nous ne vendons pas de produits industriels distribués à grande échelle. Tous nos produits ont une histoire. L’offre doit être cohérente. Même s’ils se vendent bien, nous ne souhaitons pas commercialiser de produits qui ne correspondraient pas à notre philosophie. Tous les magasins bio n’ont pas la même démarche. »
Bi’OK achète autant que possible local. Mais l’offre belge n’est pas toujours suffisante, surtout en ce qui concerne les produits transformés. Il faut donc se tourner vers la France ou vers l’Allemagne, pays réputé pour la qualité de ses produits bio.
Une alimentation authentique
Pour Bi’OK, il ne s’agit pas tant de vendre exclusivement des produits bio que, dans un cadre plus large, proposer de ‘manger juste’, c’est-à-dire dans le respect de la terre, des producteurs, des employés. Autrement dit, de tendre vers une consommation responsable, ce que traduit parfaitement son slogan Pour un quotidien plus juste.
Sur la façade et à l’entrée des magasins, la déclaration d’intention est on ne peut plus explicite. « Si en 2006 nous étions l’un des premiers supermarchés bio, la concurrence s’est sérieusement intensifiée depuis. Cela nous oblige à nous différencier. C’est pourquoi notre signature émotionnelle est toujours bien présente. Parce que c’est précisément la raison pour laquelle les gens viennent faire leurs courses chez nous et pas ailleurs. »
Des matériaux naturels
Pour affirmer encore davantage son positionnement et le traduire dans un concept de magasin parfaitement clair, Bi’OK a fait appel à Carré Associates. Pour l’aménagement des magasins, l’agence a choisi des matériaux bruts et naturels ainsi que des couleurs de terre. L’ensemble est aéré, bien dans l’esprit de transparence qui caractérise Bi’OK. La communication in shop est sans ambiguïté, avec des codes couleurs pour les allergènes et des fiches qui renseignent le client sur les producteurs belges, les nouveautés et les ‘coup de cœur’ des deux entrepreneuses.
Le magasin compte près de 5000 références sur une superficie de 420 m². Impossible de passer à côté du rayon frais, parfaitement positionné dans le parcours client. « Nous voulons que Bi’OK soit considéré comme un magasin de produits frais. » Dernière innovation : une boucherie artisanale avec service au comptoir. « C’est une excellente décision car le comptoir est le cœur du magasin. Etant donné que beaucoup de produits sont ‘faits maison’, nos prix sont tout à fait concurrentiels. » Autre rayon qui attire la clientèle : la boulangerie. On y trouve notamment des pains sans gluten de Slowfoodbio, un boulanger de la région.
Un lien émotionnel
« Dessiner un parcours logique pour un magasin bio n’est pas chose aisée » explique Julie Vandenbrande de Carré Associates. « Il y a en effet plusieurs ‘mission shopper’. Certains clients cherchent des solutions à un problème spécifique, comme des allergies ou des intolérances. D’autres sont attirés par la qualité des produits ou par leur caractère local. En outre, les magasins disposent d’un personnel compétent pour guider la clientèle. »
Car ici, estime Adrienne, le contact humain est au centre de la démarche. « Nous avons un petit côté ‘café du commerce’. Les gens se rencontrent et prennent le temps de tailler une bavette. Notre personnel connaît pratiquement tous les clients pas leur nom. Nous construisons un lien émotionnel qui fidélise la clientèle. »
L’ouverture du nouveau magasin le 4 juin dernier a attiré près de 500 personnes. Et la clientèle commence à prendre de l’ampleur. « Les meilleurs jours sont les mercredis après-midi, vendredis et surtout samedis où, malgré nos trois caisses, il se forme régulièrement des files. » Et l’avenir ? « Nous avons bien quelques idées mais rien de concret pour l’instant. Nous verrons comment les choses évoluent. Nous devons en priorité consolider et enrichir ce que nous avons déjà construit. »