Après une carrière internationale qui l’a notamment menée chez Douwe Egberts et Mondelez, Véronique Hombroekx a endossé avec beaucoup d’enthousiasme la fonction de CEO d’Imperial Meat Products en octobre dernier. Sa mission ? Initier un processus de transformation en profondeur.
Redonner envie aux gens
« Imperial est une entreprise riche d’une belle histoire dont les origines remontent à 1953. Nous avons donc 63 ans d’expérience à notre actif. C’est bien, mais il faut aussi savoir s’adapter aux nouvelles conditions du marché », affirme Véronique Hombroekx.
Jusqu’il y a peu, la technologie était le principal moteur de croissance du producteur de charcuteries, mais cela ne suffit pas, et notre interlocutrice le sait. « La technologie constitue un ticket d’entrée, mais elle ne vous garantit en rien la victoire. Nous devons évoluer d’un modèle industriel vers un modèle orienté consommateur. Le consommateur doit retrouver une place centrale au cœur de nos activités. »
Imperial sort d’une période difficile, admet-elle. À présent, il s’agit de redonner envie aux gens de s’investir afin de redevenir une organisation performante.
Consommateurs avertis
Générer de la croissance sur le marché de la charcuterie est loin d’être évident. Pratiquement tout le monde mange de la charcuterie chaque semaine : le taux de pénétration dépasse 99 % et la fréquence d’achat est de 50 fois par an. Mais le marché se trouve sous pression. Les consommateurs soucieux de leur santé réduisent leur consommation de viande.
Le jambon cuit représente environ un quart du marché de la charcuterie. Le saucisson est un autre segment important, mais sa part diminue légèrement. Or, il s’agit d’un groupe de produits stratégique pour Imperial Meat Products. Le segment enregistrant la plus forte croissance est la charcuterie de volaille, en progression de 7,7 % pour atteindre une part de 9 %. Un résultat dû à l’image plus saine de la volaille.
Le comptoir de coupe traditionnel (chez le boucher ou au supermarché) perd du terrain, alors que le succès du rayon en libre-service se confirme. « Les hard discounters ne progressent toutefois pas sur la charcuterie. C’est bien la preuve que le consommateur accorde toujours beaucoup d’importance à la valeur ajoutée. »
Les bouchers sont à la peine : leur chiffre d’affaires recule de 10 % chaque année. « Même s’il y a une pénurie de bouchers, ils représentent encore 30 % du marché. Le boucher reste mon héros », déclare Véronique Hombroekx. « Le boucher exerce un métier difficile, mais il connaît ses clients et sa passion fait la différence ! » S’ils veulent survivre, les bouchers n’auront d’autre choix que de se démarquer et de se spécialiser.
Foi dans les marques
Un axe marquant de la stratégie d’Imperial Meat Products est sa foi dans la force des marques A sur un marché de la charcuterie pourtant dominé par les marques de distributeurs : les marques totalisent 21 % des ventes de charcuterie (31 % sur le marché ouvert).
« Les marques dynamisent le marché et sont source d’innovation. » Véronique Hombroekx fait référence à la marque Aoste, qui vient d’être relancée et enregistre une croissance constante. « Les produits Aoste sont fabriqués en Belgique à partir de viande 100 % belge. Nous sommes une entreprise locale. » Les consommateurs ne le savent pas assez. L’identité d’Aoste mérite d’être clarifiée.
Citons encore Marcassou, la marque ardennaise qui célébrera prochainement son 50e anniversaire. Les produits bénéficient d’une ‘indication géographique protégée’. Cette marque sympathique fait intégralement partie du patrimoine belge.
Moins mais mieux
Quelles sont les motivations du consommateur de charcuterie ? Qualité et fraîcheur sont des critères de base. Les shoppers considèrent la charcuterie comme un produit à risque. 62 % accordent de l’importance au fait que l’emballage soit refermable. Les consommateurs exigent aussi une garantie de saveur et sont prêts à payer un peu plus cher pour un goût naturel et authentique.
Plus de la moitié des consommateurs belges préfèrent manger moins de charcuterie, au profit d’une meilleure qualité. Ils veulent éviter les antibiotiques, les additifs et les colorants. La transparence quant à l’origine de la viande – de préférence belge – est très importante pour eux. Une part non négligeable de consommateurs privilégie une teneur réduite en sel et en graisse.
Le potentiel est là. En Belgique, les consommateurs mangent essentiellement de la charcuterie à la maison, sur leurs tartines. En France, la charcuterie est davantage servie dans le cadre des repas. Il est donc possible de multiplier les moments de consommation. Une piste à exploiter…
Autre point à considérer : « Le marché est moins sensible au prix qu’on pourrait le croire. Il existe bien sûr une catégorie d’acheteurs attentifs au prix, mais pour quantité de consommateurs, ce sont le goût, la qualité, l’origine belge, etc. qui priment. Chez le boucher, les clients peuvent commander un nombre précis de tranches, découpées à l’épaisseur voulue. Le prix n’est dans ce cas pas un obstacle. »
Analyser les comportements d’achat
Imperial souhaite trouver les moyens d’optimiser le rayon charcuterie en concertation avec les enseignes de distribution. « Les shoppers prennent leur décision d’achat en quelques secondes alors que le choix en rayon est énorme. Les comportements d’achat méritent d’être décortiqués : que trouve-t-on sur la liste des courses ? Comment organiser l’offre en fonction du profil de client de chaque enseigne ? Vu le taux de pénétration et la fréquence d’achat élevés, les plus petits supermarchés ont eux aussi intérêt à plancher sur ces questions. »
L’ambition de Véronique Hombroekx est claire. Imperial doit renouer avec une croissance durable. « Nous voulons être le premier choix pour nos collaborateurs, nos fournisseurs, nos clients et les consommateurs. Cela va nécessiter un changement de mentalité, mais nous allons y arriver, petit à petit. »
À propos d’Imperial
Imperial Meat Products commercialise plusieurs marques de charcuterie : Aoste, Marcassou, Justin Bridou, Leielander et les licences Disney et Weight Watchers. L’entreprise dispose de cinq sites de production en Belgique. Lovendegem accueille le siège principal ainsi que l’usine de production de saucisson et de salaisons (jambons et salami). Dacor à Zwijnaarde fabrique les jambons cuits et le pâté. Cornby à Gand est spécialisée dans les produits cuits à base de volaille. Amando à Destelbergen s’occupe de la découpe, du conditionnement et de la distribution des produits. Enfin, c’est à Champlon que sont fabriqués les authentiques produits ardennais de Marcassou.
Imperial fait partie de Sigma Alimentos, une multinationale alimentaire ayant son siège au Mexique et des implantations dans 17 pays. Le groupe Sigma, qui réalise un chiffre d’affaires de 5,8 milliards de dollars avec un effectif de 40 000 collaborateurs, est actif dans le domaine de la charcuterie, des produits laitiers et d’autres denrées alimentaires (repas, snacks…). Sigma appartient lui-même au groupe Alfa, un holding coté en Bourse qui opère sur des secteurs industriels très variés. « Nous bénéficions des avantages d’un grand groupe international tout en restant un acteur local jouissant d’une grande autonomie », souligne Véronique Hombroekx.
Consommation de charcuterie : chiffres clés
Marché en volume | 113.167 tonnes |
Marché en valeur | 1,3 milliard € |
Taux de pénétration | 99% |
Fréquence d’achat | 50 fois / an |
Volume par acheteur | 26,5 kg |
Volume par visite | 0,53 kg |
Dépense par acheteur | 305 € / an |
Part dans le panier FMCG | 5,8% |
(source: GfK)