Eh ben dis donc. Quelle misère. La flore intestinale du client Colruyt se porte à merveille, mais qu’en est-il des autres ? Vous le découvrirez dans l’aperçu relativement déprimant (mais pas complètement) de l’actualité RetailDetail Food !
Poker menteur
Les plus anciens coureurs de bars d’entre nous, qui connaissent encore les règles du noble jeu de cartes ‘Whist à la couleur’, savent ce que veut dire ‘Misère sur Table’ : vos cartes sont tellement mauvaises que cela ne vaut même pas la peine de commencer le jeu, donc vous jetez vos atouts inexistants sur la table pour provoquer vos adversaires. En tant que perdant, vous risquez quand même de gagner le jeu, quelle ironie ! Tentons maintenant d’extrapoler. Quels ont été les soi-disant perdants qui, malgré d’importants contrecoups, ont quand même réussi à s’emparer du butin cette semaine ?
Était-ce peut-être la direction du groupe wallon de supermarchés Mestdagh qui, au départ semblait à nouveau sortir perdant des négociations mais qui après une réunion marathon très tardive, a quand même pu annoncer la conclusion d’un accord social ? Pour atteindre ce résultat, la direction a dû promettre une prime aux collaborateurs qui s’engagent à devenir plus polyvants, et brandir un as de trèfle qui donne droit à une retraite anticipée très convoitée dès l’âge de 56 ans pour ceux qui le souhaitent. Une tournée à nos frais à tous, pour être clair, mais bon. Il ne faut surtout pas croire que les syndicats sont satisfaits, mais le temps presse et ils ont dû abandonner leur petit jeu de poker menteur.
Un château de cartes
Ou était-ce Jeroen Meus, le célèbre chef cuisinier qui passe à la télévision et qui, à distance, a vu sa création Würst sombrer. Elle s’est effondrée comme un château de cartes, pour ainsi dire. On pourrait croire qu’il s’en fout puisqu’il avait déjà gagné la partie depuis longtemps en vendant ses actions. Mais quand même, il n’en reste pas moins qu’il s’agit de sa création et que sa photo figurait dans tous les articles sur l’entreprise en faillite. Les experts horeca (vous les reconnaissez à leur embonpoint et à leur nez légèrement rougi) préviennent qu’il existe d’autres concepts à la mode qui risquent de se casser la figure. Aïe, où allons-nous pouvoir déjeuner dans notre belle ville branchée? Encore une fois, les problèmes semblent moins prononcés en dehors d’Anvers.
Ou est-ce Marc Croonen, qui s’est fait un renom dans le développement durable, qui avait de meilleures cartes en main ? Le dernier Belge a été gentiment escorté vers la sortie d’Ahold Delhaize par Frans Muller en personne. Vous vous souvenez très certainement de ce fameux hold-up de catégorie A qui a eu lieu en 2015. Ahold et Delhaize l’avait appelé ‘la fusion d’égaux’ à l’époque. Et souvenez-vous lorsque ces dirigeants jouaient l’indignation au moment où l’ensemble de la presse économique belge s’en était bien moqué. Ces gros bonnets étaient de toute façon assurés d’obtenir leur bonus. L’année prochaine, ils viendront nous annoncer d’un air amusé qu’à y regarder de plus près, Albert Heijn ne devrait peut-être pas être intégré dans l’organisation Delhaize. Tout était calculé d’avance, ne l’oubliez pas. Ces prochaines semaines, l’enseigne à la petite fabrique bleue ouvrira d’ailleurs quatre nouveaux magasins en Belgique.
Rayé de la carte
Quoi qu’il en soit, ni les producteurs de pommes de terre ni les cultivateurs de champignons n’ont vécu une bonne semaine, et certainement pas un été réconfortant – contrairement à la plupart des brasseurs (mais pas tous). La chaleur brûlante a fait en sorte que les pommes de terre sont restées petites et leur taille misérable équivaut à celle d’une belle de ping-pong. Impossible d’en faire de belles longues frites, et le compost est d’une qualité tellement médiocre que les champignons parviennent à peine à transcender le statut de moisissure. Ce qui va coûter très cher au pauvre consommateur. Nous vous avions prévenu : c’est la misère totale !
Cette semaine, nous ne devions pas non plus nous rendre chez le célèbre inventeur du bâton de chocolat, la stupéfaction y est complète. L’usine de la Chocolaterie Jacques va devoir fermer ses portes, et sans tarder. Il est difficile de comprendre comment une telle entreprise qui a marqué l’histoire, est obligée de fermer après quasi cent ans de bons et loyaux services. Inimaginable, non? Ou peut-être que si : les ennuis ont commencé lorsqu’ils ont arrêté de distribuer ces belles images dans les emballages. Une mesure d’économie dont ils paient les pots cassés aujourd’hui. C’est ce qui arrive lorsque vous laissez les autres regarder dans votre jeu.
Carte sur table
Jouer cartes sur table, cela n’effraie pas les garçons et les filles écologiques d’Ecover. Ils ne sont pas non plus opposés à un échantillon de marketing guérilla puisqu’ils vont ouvrir un magasin éphémère à Anvers (qui l’aurait deviné ?) où les consommateurs recevront une consigne en échange de bouteilles vides en PET. Un flacon de leur produit vaisselle écologique sera offert en prime. Disponible en délicats parfums tels que citron ou pomme grenade et figue. Et 450 ml, c’est tout de suite vide.
Le producteur originaire de Malle ne se fera toutefois pas beaucoup d’amis chez son partenaire retail qui, comme vous le savez, est radicalement opposé à la consigne. Comme leurs collègues fabricants de sodas d’ailleurs. Et le gouvernement qui a d’autres priorités que la soupe de plastique. Heureusement que nous avons encore l’UE qui vient de décréter une interdiction totale du plastique jetable. Et c’est exactement à ce moment-là que Carrefour nous invite à jeter le plastique. Comment? Dans une poubelle située à la sortie de l’hypermarché de Hasselt, pour être précis. Allons-y tous !
Cartographié
Par contre, Colruyt joue la carte des flexitariens, un groupe cible de sceptiques qui connaît un véritable boom. Près de 15% des clients du discounter achètent de temps en temps un produit de la gamme végétarienne, peut-on lire dans un communiqué de presse publié suite à la parution de leur nouveau livre de recettes végétariennes. De plus, un client sur trois achète parfois des lentilles, des pois chiches ou des fèves. La flore intestinale du client moyen de Colruyt est en parfaite santé !
25% des clients achètent parfois des avocats. Ce sont eux qui vont se réjouir de l’arrivée à Bruxelles du restaurant très branché originaire d’Amsterdam, The Avocado Show. On ne retrouve qu’un seul ingrédient principal sur la carte, bien entendu sous forme de dizaines de préparations différentes, allant jusqu’aux desserts et aux cocktails. Aucune idée si c’est bon, mais c’est d’ores et déjà un véritable succès sur Instagram. Encore un nouveau concept horeca dont on lira prochainement dans le journal qu’il n’a pas fonctionné ? Faites vos paris !
Les cartes sont mélangées
Les foodretailers dans l’Europe entière sont en colère contre … l’Europe. La semaine n’a pas été très bonne, pour eux non plus. Le Parlement européen a approuvé une directive sur les pratiques commerciales déloyales dans la chaîne alimentaire. Rien de mal à ça, me diriez-vous. Cependant. La proposition ne protège pas uniquement le pauvre petit cultivateur et la PME sans défense, mais également les grandes méchantes multinationales. Les cartes sont fameusement mélangées dans le secteur retail. Prenons un exemple, les acheteurs ne seront plus autorisés à utiliser des moyens de pression pour forcer leurs fournisseurs à offrir de meilleures conditions. C’est sûr que cela les affaiblit. Nous ressentons leur douleur. Si, par hasard, vous êtes key accountmanager dans une grande entreprise : soyez un peu indulgent lors des prochaines négociations annuelles, c’est nécessaire !
Bref, tout notre espoir de vous proposer une histoire foodretail attrayante était fondé sur ce tout nouveau concept de proximité dont Delhaize nous a donné l’eau à la bouche depuis quelques semaines. Ils nous avaient assurés que cela allait être révolutionnaire, étonnant et innovant. C’est possible. On a pourtant quelques doutes à ce sujet puisque nous n’avons pas vraiment constaté de grands changements, en fait. Ce tout nouveau concept de proximité Fresh Atelier était surtout très petit. Lors de la conférence de presse, le groupe de journalistes s’est retrouvé compressé sur à peine 80 mètres carrés n’ayant pas d’autre solution que de regarder le plafond en tentant d’agripper un zakouski qui passait de temps en temps par là. Très petit, pour être honnête, mais soit. Tout avait l’air très joli sur les photos, ça oui. Enfin, sur les photos où n’apparaissait pas le bourgmestre bruxellois Philippe Close. Avouons : 200 nouveaux magasins en trois ans de temps, ça c’est vraiment rapide. Ce Xavier Piesvaux n’a certainement pas le temps de jouer une petite patience.
Tirer la carte de la franchise
Nous avons d’ailleurs une autre anecdote liée à ce magasin urbain révolutionnaire. Fresh Atelier se soucie de notre santé et propose de beaux fruits au lieu des traditionnelles sucreries qui servent de produits d’achat impulsif. Une banane, une pomme, une poire, un kiwi : un euro complet par fruit, s’il vous plaît. Certes bio, mais quand même très révolutionnaire en termes de perception des prix. Notre mauvais caractère n’a pas pu résister à l’envie de poser la question dans un message amical sur Instagram. Et il semble qu’ils l’ont lu ! Le lendemain, le prix avait déjà été abaissé à 80 cents. Toujours beaucoup d’argent, mais quand même un pas en avant. Grâce au Filet Pur, votre joker dans le jeu de cartes foodretail ! Avec plaisir, pour vous les navetteurs bruxellois ! Qui sait, le prix a peut-être à nouveau diminué à un 60 cents tout à acceptable ? Ce serait possible : les étiquettes de prix électroniques, c’est rapide, vous devez le savoir.
Hmm, si jamais j’envisage un changement de carrière, la fonction d’Abaisseur de Prix Professionnel me conviendrait. Il semblerait que j’ai du talent pour ce poste. Constater qu’on a de l’influence, même minime, vous procure une certaine satisfaction. Mais pour l’instant, je vais combiner ce job-ci avec celui de rédacteur en chef, de reporter volant, de photographe, de chroniqueur, de rédacteur, de traducteur, de correcteur, de conférencier, de présentateur, de porte-parole, de manager médias sociaux, de guide inspiration tour, de spécialiste taco et de maître de la brosse à WC dans la magnifique entreprise RetailDetail légèrement à l’étroit. Cela vaut également pour tous mes précieux collègues, soit dit en passant. En termes de polyvalence, ces négociateurs à Gosselies pourraient en tirer des leçons. C’est comme ça, nous jouons quotidiennement à la grande misère, à l’abondance et au solo-chelem en même temps. Qu’en est-il pour vous ? A la semaine prochaine !
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