Malgré les tentatives de nombreux retailers alimentaires pour camoufler leur actualité morose, Filet Pur est néanmoins parvenu à la débusquer. Voici le résumé hebdomadaire, quelque peu douloureux mais toujours très instructif, de RetailDetail Food!
Extrêmement pointu
Annoncer de mornes nouvelles ? On préfère toujours le faire en catimini, lorsque personne n’y prête attention. Pendant un match de Coupe du Monde des Diables Rouges, par exemple. Le football comme paratonnerre. Tel a dû être le raisonnement du prestigieux cabinet conseil en communication auquel Makro a fait appel pour annoncer sa énième nouvelle stratégie. C’est donc pourquoi ils ont organisé une rencontre avec la presse juste avant le match contre le Panama, espérant que quasi personne ne viendrait leur poser des questions embarrassantes. Pas de chance : la première mi-temps peu passionnante a laissé suffisamment de temps aux journalistes pour diffuser quelques articles pointus sur le web.
Pourtant ils ont veillé, avec habilité, à faire passer le message-clé comme une bonne nouvelle : car en effet il n’y aura pas de nouvelle restructuration, mais un plan commercial indolore qui vise à inverser la tendance avec des grands emballages (mais également des petites portions), avec des produits professionnels (mais également des produits quotidiens), pour les clients qui habitent à proximité (mais aussi pour ceux plus éloignés). Bref, des choix stratégiques extrêmement pointus, qui ne conduiront pas à un break-even avant trois ans, admet le CEO.
Un méchant commentaire
Mais qu’en est-il exactement ? Les actionnaires accordent à Makro un délai jusqu’à fin 2019 pour montrer des signes de redressement. Et si Makro n’y parvient pas ? Fin de l’histoire ? Non, n’exagérons rien, car Makro et Metro, paraît-il, ne peuvent se passer l’un de l’autre. Attendons voir. Mais rappelez-vous, il y a deux ans nous avons publié un méchant commentaire destructeur concernant les options stratégiques de Makro. Nous aurions pu republier ce même article cette semaine, car il est toujours d’actualité (d’autant plus que selon certains nous sommes les maîtres du journalisme copy/paste).
Mais nous ne l’avons pas fait. Notre mauvais caractère a ses limites, même si c’est difficile à croire. D’ailleurs qui ne pourrait avoir de sympathie pour Vincent Nolf dont la volonté de sauver les meubles est remarquable. L’homme est déterminé, mais les bookmakers ne lui attribuent pas la moindre chance de marquer un but. Et vous ?
Fauteurs de troubles
Colruyt Group était-il lui aussi content de la foot-mania qui règne en ce moment ? Bizarre quand même que la presse financière quelques jours avant la publication des chiffres annuels ait joué les fauteurs de troubles : ils prévoyaient de faibles résultats. Les marges du retailer auraient fondu comme neige au soleil, à cause de Lidl, Action et surtout Amazon, qui anéantissent la fameuse stratégie du meilleur prix du discounter. Oui, il nous a semblé lire une pré-analyse du journal HLN concernant la défense bancale de notre équipe de foot nationale. Mais ces prévisions se sont avérées inexactes. Le chiffre d’affaires, la part de marché et les marges sont au beau fixe. Donc, 3-0 pour Jef et son équipe. Le cours de l’action est monté en flèche à la bourse : un milliard en plus.
En outre les ventes en ligne chez Colruyt représentent déjà 5% du chiffre d’affaires retail. Pas mal pour un pays où l’e-commerce alimentaire se limite à 1% ou tout au plus 1,5% sur l’ensemble du marché. Le food online a donc bel et bien un avenir, à condition de bien s’y prendre. Mais trop tard pour Wink, le supermarché en ligne de Louis Delhaize qui vient de jeter l’éponge. En cinq ans celui-ci n’est pas parvenu à dépasser les 1000 commandes par semaine. « Le marché est trop petit », affirment-ils. Mauvaise excuse. Voilà ce qui arrive lorsqu’on gâche systématiquement toute opportunité de but. Bref : une carte rouge méritée pour une simulation un peu trop explicite.
Les lecteurs attentifs auront sans nul doute relevé un autre point important dans le communiqué de presse de Colruyt : la part des marques maison a augmenté suite aux hausses de prix des marques nationales. Jef ne pouvait être plus clair. La Fevia aussi confirme une fois de plus que la cherté de l’alimentation pousse les consommateurs à faire leurs achats au-delà de la frontière. En fait, pour faire des économies il suffit d’aller chez Intermarché : l’enseigne intensifie encore ses promotions : 2+4 bouteilles gratuites de Montepulciano d’Abruzzo. Qui dit mieux ? Bientôt on vous donnera de l’argent quand vous irez au supermarché.
Pas un milligramme de fraises
FrieslandCampina aussi tente de faire passer un message négatif sur un ton optimiste. La marque belge Joyvalle sera désormais « intégrée à Campina », lit-on dans le communiqué de presse officiel du fabricant de produits laitiers. Dans la pratique cela se traduira par un emballage affichant en grand le logo Campina, avec en-dessous Joyvalle en petites lettres. Vous savez comme nous qu’un ‘double branding’ de ce type est temporaire et annonce inévitablement la fin définitive de Joyvalle. Mais quel consommateur s’en souciera ?
Mauvaise nouvelle pour Kellogg’s, réputé comme fabricant de bombes de sucre aux vitamines ajoutées : les pinailleurs de Test-Achats ont découvert que les barres de céréales aux fruits rouges Special K ne contenaient pas un milligramme de fraises, alors que l’emballage montre au moins deux demi-fraises. C’est donc une arnaque. Au SPF Economie d’agir.
Vive la vie rurale
S’il y a bien un secteur qui durant l’année écoulée a connu un tourbillon de mauvaises nouvelles, c’est le secteur de la viande. Les abattoirs commencent à comprendre qu’il est temps de passer à l’action avant qu’ils ne doivent tous fermer leurs portes. Désormais ils s’engagent solennellement pour un entreprenariat éthique responsable, respectueux de la sécurité alimentaire et du bien-être animal, sous le slogan « Viande pour l’avenir ». Et nous qui pensions que la viande de laboratoire était la viande du futur. Ou la pseudo-viande, comme ces fameux steaks végétaux don Carrefour est si fier. Plus besoin d’abattoirs. Mais nous avons peut-être un peu trop anticipé …
Restons dans l’ambiance agraire : en ce moment certains retailers alimentaires ont la nostalgie de la vie rurale. A l’exemple d’Albert Heijn aux Pays-Bas, Carrefour Express lance une action permettant de se constituer son propre petit potager. Delhaize pour sa part veut faire découvrir aux enfants d’où vient leur nourriture avec son action estivale ‘Les Fermidables’. Ruben Dewaele, un exploitant indépendant de six supermarchés Delhaize en Campine, va encore plus loin et invite les enfants à venir cajoler sa vache Punkie sur le parking de ses magasins. Quant à savoir si Punkie terminera comme filet pur ou steak haché dans les rayons, l’annonce ne le dit pas. Cela offre pourtant des possibilités au niveau éducatif, non ?
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