Fini l’ambiance de Noël : un froid glacial souffle sur les commerces et les tables de négociation. L’ambiance est en dessous de zéro. Pourquoi ? Filet Pur fait son reportage exclusif depuis les catacombes de la distribution alimentaire…
Où est cette caisse de bavardage ?
« Arrivez bien à l’heure, car si beaucoup de gens se présentent, nous pourrions ouvrir plus tôt », prévenait l’invitation à la presse. C’était un faire preuve d’optimisme. Il y avait du monde, mais ce n’était pas la cohue. Il faut dire que les Anversois en connaissent un bout lorsqu’il s’agit de faire du shopping. Mais il faut bien l’admettre : ce nouveau Jumbo City est un beau magasin urbain. Intérieur chaleureux, offre abondante de plats à emporter, le but premier de la cuisine fraîche. Pas de caisse de bavardage à l’horizon, mais une batterie de caisses en libre-service. Si vous voulez papoter, vous n’avez qu’à aller chez Den Engel sur le Grote Markt.
Bref, le péril jaune débarque. Et tout cela à un emplacement de choix, où un flux constant d’acheteurs affamés passe chaque jour sur le chemin de la gare centrale au Meir. Il faut dire qu’ils n’ont pas lésiné sur les dépenses… Pourtant, il ne s’agit que d’un test de la formule du magasin urbain : le détaillant ne veut pas encore entendre parler d’un déploiement. Il est déjà assez difficile d’en ouvrir 15 par an. Les fonctionnaires municipaux et les voisins rouspètent, dans un paysage de supermarchés déjà saturé. Mais cela s’applique à toutes les chaînes de supermarchés, bien sûr.
Pas un Aldi de chez Aldi
Ce n’était pas la seule inauguration de magasin remarquée cette semaine. Nous avons également pu visiter le tout nouveau magasin Aldi à Herenthout. Et on ne peut vraiment pas dire qu’il s’agit d’un Aldi de chez Aldi. Le détaillant donne le ton avec un vrai marché du frais à l’entréeDe plus, les rayons familiers ont presque tous changé de place pour semer la pagaille parmi les acheteurs fidèles – euh, je veux dire, pour rendre le shopping encore plus facile.
Il est vrai qu’aujourd’hui, rares sont les supermarchés – à l’exception du leader du marché – qui n’ouvrent pas sur le rayon des fruits et légumes et on peut donc difficilement qualifier ce changement de choquant. On ne s’attend de toute façon pas à des révolutions de la part d’Aldi, la lutte contre les prix est plutôt une constante à toute épreuve. Mais l’idée d’étendre la logique du dépliant récemment primé au magasin est loin d’être stupide. D’ailleurs, malgré des administrations communales récalcitrantes, le discounter ouvrira cinq nouveaux magasins l’année prochaine. Ce n’est pas rien pour une chaîne déjà présente partout.
Adieu l’ambiance et la convivialité
En termes d’ambiance et de convivialité, il faut bien dire que malgré les illuminations de Noël omniprésentes, ce ne sont pas les meilleures semaines pour le commerce alimentaire. Les vendeurs sont fatigués et frustrés. Les équipes sont en sous-effectifs en raison de l’absentéisme et des quarantaines, et ce dans une période de forte affluence avec des clients qui donnent libre cours à leur irritation parce qu’ils en ont assez. Sans compter qu’ils doivent écouter Mariah Carey s’égosiller dix fois par jour pendant tout le mois. Il y a des limites.
Lundi, les syndicats ont donc fermé certains magasins Delhaize et Albert Heijn. Les plaintes sont exactement les mêmes que celles de tous les autres supermarchés où des grèves ont éclaté ces derniers mois : sous-effectifs, mauvaise organisation du travail et trop de travailleurs temporaires. Les auteurs ont promis de faire mieux. En attendant, la fédération professionnelle Comeos demande également des mesures urgentes pour faire face aux pénuries imminentes de personnel. Il faudra donc quand même faire appel à des travailleurs temporaires.
Un monde merveilleux
C’est vrai, la grève est un droit. Je suggère à ceux qui qualifient la Belgique de pays de singes d’aller jeter un coup d’oeil au pays modèle de l’autre côté de l’Atlantique. Aux États-Unis, au moins, ils savent comment gérer ces piquets de grève : chez Kellogg ‘s, ils ont simplement jeté dehors 1400 employés en grève avec un grand coup de pied au cul, juste avant Noël. Voilà. Fin de la grève. Sérieusement, qu’est-ce qu’ils espéraient ? Après l’annonce de la nouvelle, le prix de l’action a augmenté. Un monde merveilleux.
Cette année, les discussions annuelles entre les détaillants alimentaires et leurs fournisseurs ont été un peu moins cordiales que d’habitude, vous l’aurez compris. Et pas seulement chez nous. En Allemagne, la situation s’envenime : le leader du marché, Edeka, retire l’ensemble de la gamme PepsiCo de ses rayons. Pas de demi-mesure ici, en parlant de la Deutsche Gründlichkeit . La moitié de la gamme L’Oréal bénéficie également d’un boycott. Ils n’ont décidément pas froid aux yeux.
Robin des Bois
C’est – que pensiez-vous ? – Gianluigi Ferrari en personne qui est derrière tout cela, l’autoproclamé Robin des Bois de la vente au détail. L’homme qui a aiguisé ses talents de négociateur chez AgeCore, l’alliance de la vente au détail,sous le regard approbateur de Colruyt, porte désormais l’approche du « couteau sur la gorge » à des niveaux sans précédent chez Epic Partners, l’alliance d’achat. Qu’elles ne se risquent pas à parler de « hausse des prix », ces multinationales gâtées. A quoi pensent-elles ?
Toujours sympa, ce genre de reportage de guerre, et bon pour les clics aussi. Après tout, des mots comme « querelle », « boycott » ou « épreuve de force » sont du pain bénit pour le lecteur en quête de sensations. Mais dans les bureaux Edingensesteenweg de Halle, quelqu’un ronge son frein depuis les premiers rapports sur la disparition de certains pots de Nutella des rayons des magasins. Et puis les choses ont empiré : la goutte d’eau qui a fait déborder le vase a été un article paru dans le journal économique De Tijd, habituellement sérieux, qui brossait un tableau plutôt caricatural des négociations en cours.
Extorsion et intimidation
Eh bien, un article ? Un fatras d’absurdités fabriquées de toutes pièces, alimenté par des « sources anonymes » du monde des produits de grande consommation, trop heureuses de pouvoir enfin se laisser aller. Vous connaissez la chanson : histoires d’extorsion et d’intimidation, invectives, guerre psychologique et boycotts impitoyables. Mais ce faisant, vous marchez sur l’âme de la direction du site de Wilgenveld. Et mieux vaut l’éviter. Il faut mettre un terme à l’encadrement de l’abus de pouvoir. L’homme n’a pas pu tenir plus longtemps et a attrapé son téléphone.
À l’autre bout du fil, une oreille attentive. « Que puis-je faire pour vous, M. Hofman ? Une réaction, M. Hofman ? Tout de suite, M. Hofman ? Bien sûr, M. Hofman. Je m’en occupe, M. Hofman. Toujours à votre service, M. Hofman ! » Quand le numéro deux du Groupe Colruyt est dans le pétrin, il sait qu’il peut toujours venir pleurer sur les épaules solides du capitaine du commerce de détail, qui est après tout le soutien et l’ancrage de tous les détaillants bien intentionnés du Benelux.
La pression à son comble
C’est ainsi que le cadre supérieur a eu tout le loisir de raconter sa version de l’histoire : à Halle, les conversations sont « animées, mais respectueuses ». Les key account managers ont d’abord droit à un petit café, avant d’être gentiment mis sous pression. Tout cela dans une seule perspective : les intérêts du consommateur, qui risque d’être victime de hausses tarifaires abusives. Car le détaillant constate « des différences importantes et inexplicables entre producteurs de produits similaires » En outre, lorsque les prix de l’énergie baisseront à nouveau, Halle souhaite que cela se reflète dans ses tarifs. C’est clair.
Ce qu’un simple coup de fil peut faire, non ? Si cette histoire nous enseigne une leçon, c’est celle-ci : à chacun son métier. Que la gazette rose saumon s’en tienne aux chiffres bruts. Il vaut mieux laisser les caricatures à Filet Pur. Et la vente, c’est tout à fait dans les cordes de notre Grand Timonier, qui n’a pas pu s’empêcher d’attirer l’attention du directeur des opérations sur une autre question importante : « À propos M. Hofman, cette commande de notre magnifique nouveau livre The Future of Food, je peux la confirmer ? » À la semaine prochaine !
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