Laissons tranquillement le pays dériver sans gouvernail, pendant que des esprits éclairés du secteur FMCG nous montrent le cap à suivre vers un brillant avenir. Le sauvetage est en vue, en partie grâce à la plume corrosive de votre seule et unique tête de liste, Filet Pur.
Légumier en détresse
Pas besoin de deux informateurs pour constater que notre magnifique secteur du food retail, une fois de plus, donne le bon exemple par une série d’initiatives conciliantes, qui du coup rehausse la barre pour les autres industries de notre nation divisée. Prenez Greenyard. Alors que des politiciens choqués n’arrêtent pas de lancer des points de rupture sur table, le légumier en détresse conclut d’aimables accords avec les mêmes supermarchés, qu’il considérait l’an dernier encore comme les principaux responsables de ses chiffres rouges, vu leurs exigences au niveau des prix. Apparemment tout est pardonné et oublié.
Le fournisseur de la cour d’Albert Heijn a d’abord fait des avances à Carrefour, ensuite à Tesco, et maintenant à Delhaize. A chaque fois ils promettent d’investir dans une collaboration intense, voire même dans de nouveaux centres de distribution. Alors que chacun sait qu’ils croulent sous les dettes. Mais dans leurs communiqués jamais ils ne précisent d’où vient l’argent. Des propositions qui visiblement n’ont pas été chiffrées par le Bureau fédéral du Plan. Mais qui s’en soucie ?
Sur prescription médicale
Autre modèle à suivre : celui des managers responsables de la durabilité chez Mondelez International, qui dit être dans les temps pour atteindre d’ici 2020 les objectifs climatiques annoncés. Là au moins ils savent s’y prendre : avec son programme de blé durable le fabricant sauve à lui seul la population entière de papillons et d’abeilles de notre planète et les biscuits Prince et Oreo contiennent d’ores et déjà si peu de sucre et de graisse que bientôt ils seront disponibles uniquement sur prescription médicale. Vous en pensez ce que vous voulez, mais au moins ils ont un plan.
Le secteur agroalimentaire belge lui aussi innove. En Campine, par exemple, le premier soja de culture locale a été récolté, pour en faire un spaghetti national révolutionnaire. Un projet amateur de l’infatigable entrepreneur Wim Heylen. Un visionnaire, qui depuis longtemps a pressenti qu’il nous fallait devenir autosuffisants dans une Europe qui se décompose en raison d’une surdose de sceptiques.
Trois démocraties
Bio-Planet est sur la même longueur d’onde : l’enseigne soutient un projet pilote en vue de cultiver du soja subtropical dans nos contrées, comme ingrédient de base pour la fabrication de substituts de viande bios. En outre le retailer écolo a bien compris que l’univers du bio, lui aussi, se trouve face à trois démocraties : Bruxelles qui donne le ton, la Wallonie qui s’accroche courageusement et la Flandre qui suit à distance, à contre-cœur. Par conséquent cette année la chaîne ouvrira des nouveaux magasins exclusivement au sud de la frontière linguistique. Follow the money, ou du moins la pensée verte.
Reste à voir si Bio-Planet parviendra à réaliser ses hautes ambitions de croissance, sachant qu’Aldi s’est fixé pour objectif de devenir le leader du marché bio. C’est déjà le cas en Allemagne, et l’Europe ne tardera pas à suivre. Et ensuite la Chine. La tactique est simple : attirer d’innocents bio-acheteurs occasionnels avec des prix planchers, dans l’espoir qu’ils achètent également d’autres produits. Des appâts bios, en d’autres termes. Sachant que Carrefour nourrit plus ou moins la même ambition, il se pourrait donc que dans le secteur bio aussi l’on assiste à ‘une course vers le bas’. Attachez vos ceintures.
Un modèle bancal
Egalement sur la bonne voie : le supermarché 100% en ligne Picnic, qui imperturbablement poursuit sa stratégie ‘tache d’huile’ et s’attaque maintenant à Bochum (Allemagne) pour ensuite conquérir toute la région de la Ruhr, une région très peuplée et prospère où le foyer moyen dispose d’au moins trois grosses voitures, dont ils ne se servent évidemment pas pour aller au supermarché. Et sur son marché domestique Picnic fait son entrée à Apeldoorn. Un beau pied de nez aux nombreux experts qui continuent de prétendre obstinément que l’e-commerce n’a pas d’avenir dans le secteur food. Mais le business model avec livraison gratuite est à ce point bancal que l’entreprise continue de faire face dans différentes villes à de longues listes d’attente de candidats-clients impatients. On dirait le gouvernement.
Pourtant pour l’instant la traversée très attendue vers la Belgique n’est pas à l’ordre du jour. Trop complexe, probablement. Trop incertain aussi, pour le moment. Mais entretemps secrètement, par la porte arrière, un autre concurrent, et non des moindres, se glisse sur le marché. Pourquoi diable s’inquiéter de l’arrivée de Jumbo ? Sachez que le retailer allemand Rewe est environ dix fois plus grand. Just saying. Avec la reprise de Conway les Allemands s’implantent donc sur notre territoire. Curieux de voir ce que cela donnera sur le marché en pleine croissance du ‘convenience’.
Une histoire d’abeilles
Pour terminer un peu de psychologie. Nous attirons votre attention sur la notion de synchronicité, imaginée par Carl Gustav Jung pour désigner des situations où deux événements surviennent plus ou moins en même temps dans une corrélation significative, bien qu’il n’y ait pas de lien de causalité. Nous pourrions illustrer cette notion par une histoire de gentilles abeilles, qui en guise d’action d’épargne enfantine et écologique ont fait leur apparition simultanément tant chez OKay que chez Delhaize. Oups ! Une fâcheuse coïncidence qui pourtant s’explique simplement : les grands esprits ont souvent les mêmes idées et les deux entreprises ne manquent pas de grands esprits. Alors qu’ailleurs par contre …
Don’t worry, bee happy, voilà donc notre conseil à tous les lecteurs qui ces derniers jours se sont demandé quelle mouche avait bien pu piquer leurs clowns (en néerlandais ‘paljas’, nom dont Bart De Wever a traité le leader du Vlaams Belang, ndlr.) de compatriotes. Eh oui, les avis c’est comme les trous de culs : tout le monde en a un, mais toute le monde considère que c’est celui des autres qui pue. Je vous laisse méditer ces paroles philosophiques et vous dis : à la semaine prochaine !
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