Parfois le journalisme dédié au retail prend des allures de reportage de guerre, certes avec un risque minime de balles perdues. Mais notre approche reste toujours constructive. La preuve dans ce résumé hebdomadaire servi par RetailDetail Food.
Ils ne peuvent s’en prendre qu’à eux-mêmes
Récemment plusieurs personnes m’ont demandé si je pensais que Delhaize déclencherait réellement une bataille des prix dans notre pays, comme Dick Boer l’avait laissé entendre. Généralement j’ai tendance à relativiser en arguant qu’en Belgique il est impossible de gagner une guerre des prix face à Colruyt. Pourtant à Hal ils ne semblent plus si sûrs de leur coup et ils n’hésitent pas à sortir l’artillerie lourde : l’importation parallèle par exemple (le cas Heinz, vous vous souvenez ?) ou carrément le retrait de certains produits des rayons, comme c’est le cas en ce moment pour Pepsico. Une mesure qui ne peut être considérée comme un acte d’agression, car comme dit Colruyt dans une réaction officielle : « Nous voulons aborder ce problème de manière constructive. Nous trouverons une solution. »
Quoiqu’il en soit les médias se sont régalés et les rédacteurs en chef se sont montrés très inventifs dans leurs titres. Cette semaine le ‘RetailDetail Creativity Award’ est décerné au journal Gazet van Antwerpen qui titrait : ‘Colruyt wil chipsleverancier kraken’ (‘Colruyt veut croquer son fournisseur de chips’). Félicitation ! Et les experts prévoient d’autres conflits, tout cela suite à la menace d’Ahold Delhaize et aux hurlements des fabricants de marques envers Aldi et Lidl. Ils ne peuvent s’en prendre qu’à eux-mêmes. Mais tout cela est dû aussi à la période de l’année. Le temps des discussions constructives, resserrant les liens entre les partenaires commerciaux en vue d’un business plan fructueux qui générera une croissance commune en 2018. Une vraie ambiance de Noël !
Digestion
Toutefois la science prétend que dans un tel conflit les deux camps sortent perdants et que le supermarché généralement subit les plus gros dommages. Serait-ce exact ? Tout dépend du point de vue duquel on se place. En effet, Colruyt envoie un message clair à l’adresse du consommateur (« nous irons jusqu’à l’extrême pour vous garantir le meilleur prix ») ét une menace à l’adresse des fournisseurs (« prenez garde que cela ne se retourne pas contre vous »). Bref, cette guerre des prix ? Elle bat déjà son plein.
Ou peut-être cette mesure de Corluyt s’explique-t-elle par la chute du cours de l’action en début de semaine ? En cause : un avis négatif de la Deutsche Bank qui craint une baisse des marges et un potentiel de croissance limité suite à …. la forte concurrence avec Aldi, Lidl et Ahold Delhaize. Eh oui, Colruyt devait riposter, pas de chance pour PepsiCo. Et ce n’est pas tout. La famille Colruyt se diversifie à fond, histoire de répartir les risques. Ainsi Korys Management devient administrateur de la société Microbial Resources Management Technologies. Très sérieux tout cela, direz-vous ? Think again. Cette entreprise étudie le système digestif humain dans des conditions de laboratoire, mais a surtout servi de source d’inspiration au célèbre artiste Wim Delvoye pour créer son chef-d’œuvre Cloaca, alias ‘la machine à caca’. Voilà donc à quoi s’occupe Jef actuellement.
Cadeau de Noël
Cette semaine les retailers ont reçu un beau cadeau de Noël de l’Europe : des arguments en faveur de l’importation parallèle, grâce au méga brasseur AB InBev. Durant des années le géant brassicole a gonflé artificiellement les prix de la bière en Belgique en empêchant les retailers d’aller s’approvisionner au-delà de la frontière. Des pratiques sournoises, sans plus ! Voilà donc la vraie raison pour laquelle les prix à la consommation en Belgique sont plus élevés que dans nos pays voisins : c’est la faute aux fabricants de marques. Et pas seulement d’AB InBev, car ‘ils le font tous’, crie Comeos. Mais probablement plus pour longtemps, car si la Commission européenne obtient gain de cause, l’importation parallèle deviendra une pratique courante. Vous êtes prévenus. Ce n’est plus d’une bataille de prix qu’il s’agit, mais carrément d’une guerre totale.
Difficile à digérer aussi, le rachat de notre fabricant de glace préféré IJsboerke par des Hollandais. L’investisseur détient déjà quelques marques de chocolat belges dans son portefeuille, mais tient à se développer afin de renforcer sa position dans les négociations avec les supermarchés. Le harcèlement transfrontalier s’intensifie également entre la France et la Grande-Bretagne. Monoprix, propriété du groupe Casino, a conclu un accord avec le pure player britannique Ocado, afin que la chaîne française puisse utiliser la technologie de commande novatrice de l’e-tailer. En outre l’enseigne française va proposer des marques maison premium de Waitrose – chaîne qui elle aussi collabore avec Ocado. Une jolie relation est-elle en train de naître ou le Brexit y est-il pour quelque chose ?
Aliment-réconfort
Au cas où cela vous aurait échappé : cette semaine était ‘la semaine de la frite’ et avec un peu de chance 2018 sera pour le secteur de la pomme de terre ‘l’année de la frite’. Explication : en ces temps incertains les consommateurs recherchent souvent des aliments réconfortants, malgré la tendance ‘santé’ qui règne actuellement dans le secteur food. Bonne nouvelle donc pour les friteries locales et pour le secteur du chocolat aussi, à la grande joie notamment des actionnaires de Barry Callebaut, qui ont décidé d’augmenter la capacité de production des sites de Wieze et Hal, afin de répondre à la demande croissante.
Les aliments réconfortants, d’accord mais sans excès. Prenons plutôt exemple sur l’histoire de Noël d’Intermarché, où deux enfants estiment que le Père Noël a un IMC bien trop élevé et décident de lui faire manger plus de fruits et légumes. Pas question de surpoids par contre dans le dernier spot publicitaire de Noël de Delhaize passant en revue les repas de Noël des années ’20 à aujourd’hui. Une réussite !
Et pour terminer ceci : si vous vous demandez ce qui nous motive dans notre quête quotidienne d’actualité, voici la réponse. Nous sommes restés pantois en lisant ce titre dans la page culturelle du journal De Standaard, pourtant un journal de qualité. ‘Breaking news lijkt op een orgasme’ (‘Les flashs infos, c’est comme un orgasme’). Holà, est-ce à dire que RetailDetail est dans l’érotisme ? Dans ce cas, grand temps d’élever nos tarifs. Il est vrai que la semaine a été riche en rebondissements. Aussi nous sommes un peu fatigués, mais satisfaits. A la semaine prochaine !
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