Il n’y a pas de marchés saturés, juste des commerçants paresseux. Et qui sont ces losers ? Nous le révélons dans une édition tout sauf noire de Filet Pur, votre oasis d’objectivité dans ce désert de misère virale.
Pas d’objections aux réserves
Delhaize a transmis un message étonnant aux médias cette semaine. La teneur en était plus ou moins : « N’oubliez pas de faire des réserves. » Avec un secteur de la restauration fermé et des fêtards obligés de cuisiner – ou du moins de réchauffer – pour leur cercle intime, l’enseigne de grande distribution craint d’être débordée pendant les fêtes. D’où le conseil amical de ne pas différer les achats de fin d’année et de faire des réserves de pâtes, de champagne et de papier toilette dès maintenant. Mais c’est sans doute aussi une façon de mettre en avant ses promotions de Noël.
Pour encore mieux nous servir en ces jours d’affluence, le détaillant va même ouvrir ses portes dès 7 heures du matin. Pas pour les paresseux, visiblement. Aux Pays-Bas, ses collègues d’Albert Heijn font encore mieux : ils resteront ouverts jusqu’à minuit. Authentique. C’est vrai au fond : pourquoi ne gâter que les lève-tôt ? Comme leur directeur Wouter Kolk veut une collaboration beaucoup plus étroite entre Delhaize et AH, ils pourraient carrément se relayer avec une équipe de jour et une équipe de nuit, non ?
Des légumes sains
Lieven Vanlommel, le fondateur de Foodmaker – qui affirme ne pas avoir besoin de plus de de deux à quatre heures de sommeil par jour –, n’est certainement pas à ranger parmi les paresseux. Grâce à une alimentation saine et riche en légumes, évidemment. Ce véritable lapin Duracell qui a annoncé cette semaine une extension de ses activités e-commerce aux Pays-Bas a reçu jeudi un trophée à l’effigie de Mercure, le dieu romain du commerce : une récompense bien méritée pour quelqu’un capable de métamorphoser une chaîne de restaurants en une plate-forme de vente ligne en quelques semaines seulement. Faut le faire !
Muriel Bernard, la directrice du marché fermier en ligne eFarmz, n’est pas non plus une marmotte. Tripler son chiffre d’affaires ? Pas de problème… La plate-forme a juste dû revoir son fonctionnement de fond en comble pour répondre à l’explosion de la demande et est maintenant prête à doubler à nouveau ses ventes l’année prochaine. Les détaillants non food belges ont peut-être raté le train de l’e-commerce, cela n’arrivera pas aux acteurs du secteur alimentaire, clame-t-elle haut et fort. Y a-t-il encore des experts pour affirmer que les produits alimentaires (frais) ne conviennent pas à l’e-commerce ?
Alcool
D’autres ont effectivement été un peu paresseux. Comme les boss de Danone, à en croire les investisseurs. Le groupe français n’a pas réussi à atteindre les taux de croissance demandés ces dernières années, et la rentabilité est à la traîne. Le virus n’a bien entendu fait qu’empirer les choses. Tout doit partir, a donc annoncé PDG Emmanuel Faber : les filiales non rentables seront vendues et quelque 2000 collègues non rentables seront gentiment mais fermement escortés vers la sortie. Une plus grande autonomie locale doit à présent sauver l’entreprise (et accessoirement la peau du grand patron). À voir.
Côté consommation d’alcool, tout va bien. Maintenant qu’ils ne peuvent plus aller au café, de plus en plus de consommateurs transforment leur salon en un authentique bar à cocktails. Et Bacardi propose même des livraisons à domicile. L’e-commerce doit donc également sauver les spiritueux. En attendant, la grande distribution continue à tirer profit du confinement, qui est loin d’être terminé pour l’horeca. Comme personne ne devra faire le Bob à Noël, on pourra allègrement se bourrer la gueule dans sa bulle – du moins c’est qu’on y prévoit. Un succès commercial qui s’annonce.
Le couteau entre les dents
Il n’y a pas de marchés saturés, juste des commerçants paresseux. C’est pourquoi le discounter Lidl n’hésite pas à engager le corps à corps avec la concurrence. Notamment sur le champ de bataille de Pelt : le couteau entre les dents, ils déménagent leur supermarché vers le parc commercial où leurs collègues de Jumbo, Albert Heijn et Aldi se tirent déjà la bourre depuis une bonne année. Nous l’avons déjà dit à plusieurs reprises : l’ambiance est top dans la grande distribution. Et comme le dit si bien Lambic : celui qui a peur a déjà perdu.
Ils suivent sans doute le même raisonnement à Clichy, où se trouve le siège social de la chaîne française Monoprix, filiale de Casino. Le spécialiste des magasins de proximité a contacté la rédaction la semaine dernière. Une petite exclu, ça vous intéresse ? Pas de refus, évidemment. Et en effet : le détaillant prévoit une grande offensive européenne qui devrait inclure la Belgique. Si vous avez un bas de laine à investir et de l’esprit d’entreprise : ils vous cherchent ! Parce qu’ils ne comptent pas se salir les mains : le sale boulot, il le laisse aux franchisés.
Beau geste
Y a-t-il encore de la place pour une nouvelle enseigne de supermarché sur le marché belge ? S’ils veulent le conquérir au même rythme débridé que ces faignants de Franprix (qui font partie du même groupe, d’ailleurs) avec leurs deux mini-épiceries dans trois ans, cela devrait bien se passer. Mais sait-on jamais… Et tout le monde le reconnaitra : leurs magasins sont beaux. Dans des circonstances plus favorables, nous aurions bondi dans le Thalys pour aller admirer leur nouveau flagshipstore de Montparnasse. Ça attendra.
À Halle, on se la joue cool, visiblement. Cette légère baisse des parts de marché n’inquiète pas du tout Jef Colruyt. Au contraire, il en remet une couche : histoire de permettre à ses employés de faire la grasse matinée, il fermera purement et simplement ses supermarchés le 2 janvier. Un beau geste… surtout à l’égard de la concurrence : après tout, ils feraient mieux de suivre l’exemple inspirant du leader du marché. Delhaize offre donc lui aussi une journée de congé à ses employés, mais ils auront le choix de la date. Les magasins resteront ouverts. Vous ne le feriez pas, vous ?
Des vacances ? Un concept tout à fait étranger aux rédacteurs de RetailDetail. Après tout, l’actualité ne prend jamais congé. Allez, on va quand même essayer de prendre deux jours. Cette idée d’un cocktail à la maison, ça me dit bien. Pas vous ? À la semaine prochaine !
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