Colruyt et Coke se disputent le magot. Milka et Oreo doivent faire pénitence. Mais quand Delhaize redeviendra-t-il champion ? Frits est-il amoureux ? Jef va-t-il prendre sa retraite ? Un seul fil conducteur dans ce spécial Saint-Valentin de Filet Pur : l’amour, qui ne passe pas uniquement par l’estomac.
Bataille de géants
L’espace d’un moment, nous nous sommes crus à Wuhan. Mais ce n’était que le Colruyt de Wommelgem, dont les rayons paraissaient désespérément vides. Les clients à la recherche de leur shot quotidien de caféine en étaient pour leur peine : pas de café, pas de coca. Une surprise ? Non, Filet Pur avait déjà annoncé l’affrontement il y a trois semaines. Bien sûr, le discounter agit par amour. Amour du client, qui peine à joindre les deux bouts et a donc droit aux meilleurs prix. Qui barrera la route à l’odieux fabricant de produits de marque qui veut à nouveau augmenter ses tarifs ? Allez, tous en chœur : merci, Jef !
Cette bataille des géants a immédiatement alerté les rédactions du monde entier. La radio a appelé : « Un tel boycott profite-t-il vraiment aux consommateurs ? » Bonne question. La réponse courte est non, la réponse longue est : le consommateur n’a rien à voir. C’est juste une question de fric. L’étonnement du journaliste face à cette étrange tradition était assez mignon. Manifestement, il ne savait pas que les acheteurs avaient pris l’habitude de passer chaque année tous leurs fournisseurs sur le gril afin d’en extraire le dernier centime. Un rituel. Du folklore. À quand le classement au Patrimoine mondial de l’humanité ?
Une nouvelle définition de la folie
« La folie, c’est de faire toujours la même chose et de s’attendre à un résultat différent. » La citation est attribuée à Albert Einstein, et qu’elle soit apocryphe ou non ne change rien à l’affaire : si l’alliance de distribution Agecore s’est systématiquement cassé les dents face à Nestlé, PepsiCo, Mars et les autres, ce serait pure folie de chercher noise à la plus grande marque au monde. Mais si nous n’en savons rien et ne le saurons sans doute jamais, nous avons quand même l’impression qu’ils ont pu, quelque part, d’une manière ou d’une autre et au moins partiellement, obtenir satisfaction.
Quoi qu’il en soit, le conflit se résoudra de lui-même d’ici quelques semaines : après tout, ceux qui savent – ou du moins le pensent – affirment que ces bouteilles en PET sont condamnées. En fin de compte, les marques d’eaux et de sodas vendent plus de plastique que de boissons. Derrière ces dizaines de mètres de rayons se cache en en effet une industrie polluante et une quantité ridicule de transports : pas très durable, et donc intenable à long terme. L’avenir est au robinet. S’ils étaient un peu visionnaires, les producteurs pourraient profiter de cette transition radicale pour révolutionner leur modèle d’affaires et se passer de ces empêcheurs de tourner en rond que sont devenues les enseignes de supermarchés. Mais comme souvent, ils vont s’accrocher à leur modèle obsolète jusqu’à ce qu’ils n’aient vraiment plus le choix.
La triche comme principe de vie
Plus encore : ces marques sont tellement acculées qu’elles sont obligées de tricher pour survivre. Voyez Mondelez : si ce qu’ils ont fait précisément n’est pas encore très clair, cela ne fait en tout cas pas rire l’Europe. On pourrait penser que la commercialisation d’une substance brun clair et bien trop sucrée sous la dénomination fallacieuse de chocolat était déjà un acte assez navrant en soi, mais il semble que les faits soient encore plus graves. Wait and see.
Leurs collègues d’Unilever donnent-ils l’exemple ? La bouche en cœur, ils nous affirment en tout cas qu’ils ne jurent plus que par le marketing responsable. Les influenceurs ? Terminé. Les personnages de bandes dessinées sur l’emballage ? À la poubelle ! Plus de publicité pour les enfants, sur la totalité des 360 degrés. Quoique… 180 degrés suffiront, car au moment de vérité – à l’endroit où se prend la décision d’achat –, absolument rien n’a changé : dans les magasins, les wobblers, les présentoirs et surtout ces produits si alléchants restent disposés à la hauteur des yeux des enfants. Hé, ils ne sont pas fous non plus.
Bande de losers
Gagner des parts de marché sans vendre plus: Chez Delhaize, c’est possible. Chapeau Une explication ? Peut-être : la concurrence est une bande de losers pathétiques. C’est du moins l’opinion Frans Muller, même s’il préfère un langage plus châtié : « Certains acteurs ont du mal à résister. » Un euphémisme comme un autre, mais le discours est convaincant. Tout est dans l’exécution. Pour lancer ensuite : « Les ventes en ligne présentent toujours un fort potentiel de croissance en Belgique. »
Cette subtile ironie n’est-elle pas délicieuse ? Je ne m’en lasserai jamais. En tout cas, les chiffres sont éloquents. Chez Delhaize, les ventes en ligne ont progressé de 10 % au quatrième trimestre. Aux Pays-Bas ? 20%. Aux États-Unis : plus de 40 %. Un potentiel de croissance ? Tirez-en vos conclusions. D’ailleurs, Frans Muller pense aussi qu’il y a trop de magasins en Belgique. Exactement. Et pour y remédier, Albert Heijn va en ouvrir cinquante autres, à présent que ce premier modeste jalon a été atteint. Bingo ! Ben oui, il faut bien que quelqu’un s’y colle. Et si vous ne voulez pas aller au magasin, Albert viendra directement chez vous. Du moins si vous n’habitez pas dans le parking.
Fan de toi
Prêt pour un morceau de poésie 100% Filet Pur ? C’est parti : « Sais-tu combien je t’aime, je suis un vrai fan de toi ». « Je ne le dis peut-être pas souvent, mais nous aimons tellement te voir » D’accord, ça rime moyen, mais quand même : beau travail. L’auteur de la version néerlandophone est le PDG de Jumbo. Une flambée d’inspiration entre deux réunions du conseil d’administration, sans doute. Oui, la chanson d’amour est un des nouveaux dadas d’un Frits van Eerd manifestement heureux comme jamais, la pinte à la main. Après tout, les affaires tournent.
Ceux qui regarderont le clip en entier ne pourront sans doute pas s’enlever cette scie du crâne de tout le week-end, vous avez été prévenu. Mais où est l’intérêt, vous demandez-vous ? Pour notre part, nous y voyons surtout une déclaration d’amour au client belge qui, espère Frits, se précipitera en nombre dans ses beaux magasins. Une inauguration à Binche est sans doute au programme, soyez aux aguets.
Retraite anticipée
Au moins un bouddhiste zen comme Jef Colruyt ne risque-t-il pas de nous sortir une chanson de carnaval. D’ailleurs, Jef ne sortira bientôt plus rien du tout. Nous n’inventons rien : c’était dans un journal d’affaires généralement très sérieux. Oui : dans une interview particulièrement instructive parue dans De Tijd le week-end dernier, l’ancien directeur opérationnel Frans Colruyt évoque ouvertement les raisons pour lesquelles il se mettra en retrait du groupe Colruyt à partir du 1er février 2019. Mais le diable se cachait dans les détails. À la fin de l’article, le journaliste Piet Depuydt rappelle en effet que Jef Colruyt a institué une règle d’or dès 2013 : les membres du conseil d’administration sont actifs jusqu’à l’âge de 62 ans au plus tard. Et vous ne devinerez jamais: le célèbre PDG soufflera ses 62 bougies… cette année.
D’où la question qui nous brûlait les lèvres : allons-nous assister à la retraite anticipée de l’ancien PDG et à la nomination d’un successeur en 2020 ? « Il faudra demander à Jef », commente Frans Colruyt. « Je peux juste dire que la règle d’or est toujours d’application. (rires) Même s’il y a des exceptions. Nous avons déjà eu des directeurs que les circonstances ont contraints à continuer. »
Nez dégagé
Vous pouvez l’imaginer : c’était la panique au bureau. Que serait Filet Pur sans Jef ? Nous avons immédiatement appelé Halle. La réponse n’a pas tardé : « Jef Colruyt a déjà indiqué en 2018(également lors d’un petit-déjeuner avec De Tijd) qu’il se voyait encore continuer pendant cinq à sept ans, jusqu’à ce que la succession soit assurée. Cela fait seulement deux ans. Il continuera donc à travailler pendant un certain temps. » D’accord. Nous aussi dans ce cas. Quel soulagement !
D’ailleurs, un autre titre a attiré notre attention dans ce même journal : Il est plus facile de commander 1 gramme de coke qu’une pizza. C’était bien sûr à propos de la ville la plus tendance du moment : Anvers, le berceau de RetailDetail. Il fallait essayer. Et c’est vrai : le déjeuner n’a pas tardé ce midi. Pas très copieux, mais la sensation de faim avait disparu et c’est tout ce qui importait. Nous abordons donc le week-end avec le plein d’énergie le nez parfaitement dégagé. À la semaine prochaine !
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