Cela suffit amplement : il est urgent que tout le monde arrête de fumer, de boire et de manger de la viande. D’ailleurs, à quand l’interdiction parfaitement justifiée des œufs de Pâques ? Filet Pur fait le point sur les occasions manquées de la semaine alimentaire écoulée.
Perte de chiffre d’affaires garantie
Il aurait également voulu limiter la vente de sodas, de chocolat, de chips et de viande hachée, mais le ministre Vandenbroucke sait mieux que personne que, en politique, il vaut parfois mieux se contenter d’un compromis honorable. Et il a peut-être obtenu en partie gain de cause : le parlement a approuvé son projet de loi sur la santé presque à l’unanimité. Seuls certains démocrates-chrétiens radicaux francophones se sont timidement opposés, brandissant le slogan de mai 68 « Il est interdit d’interdire » : après tout, les gens doivent avoir la liberté de s’empoisonner s’ils le souhaitent. Que dire ?
En résumé, les supermarchés peuvent s’attendre à une perte de chiffre d’affaires de l’ordre de 7 à 9 % à partir du 1er avril 2025. Ils espéraient encore que c’était une plaisanterie, mais non. Tous les produits du tabac seront interdits. Comme chez nos voisins du nord, où une telle interdiction entrera bientôt en vigueur. Avec un effet secondaire inattendu : refusant d’accepter cette perte de revenus, les franchisés ouvrent maintenant leurs propres bureaux de tabac dans un mouvement général. Ce n’était bien sûr pas le but. Dans notre pays, ça n’ira peut-être pas jusque-là. Les marchands de journaux se sont plaints toute la semaine dans les médias, car ils n’ont pas la vie facile. Pour eux, l’interdiction dans les supermarchés est du pain béni.
Annonce choc de la semaine
Si le ministre ne parvient pas à faire passer l’interdiction de la vente de côtelettes et de filets purs, c’est au secteur de prendre les devants, a dû se dire le distributeur de Veghel. En effet, au-delà de notre santé, c’est l’avenir de toute la planète qui est en jeu. Qui viendra nous sauver ? Annonce choc de la semaine : Jumbo est la première chaîne de supermarchés à mettre fin aux promotions chocs sur la viande. Voilà. Les organisations de défense des animaux applaudissent, les agriculteurs n’ont pas encore réagi. Ils sont peut-être confrontés à un dilemme cornélien : ils réclament depuis longtemps des prix équitables pour la viande, mais ils ont du mal à digérer le passage à une gamme plus végétale. Bref, il y a toujours quelque chose…
Nous ne rechignons pas à faire état des mauvaises passes que traverse le Danger Jaune, mais nous soulignons aussi les points positifs : voilà une initiative plus que louable qui fait preuve de courage et de responsabilité, non ? Vous voyez bien : il suffit d’un peu de bonne volonté. Reste maintenant à savoir qui lui emboîtera le pas.
Pas un eldorado
Ce ne sera certainement pas Intermarché. Cette semaine dans la brochure : trois oiseaux sans tête achetés, trois gratuits. Et 40 % de réduction sur les filets de poulet et les mignonnettes de porc. Entre autres. Les Mousquetaires ont un brevet sur ce qu’ils appellent les « kiloknallers » aux Pays-Bas : de la viande en grande quantité et bon marché. Mais est-ce un modèle d’entreprise rentable ? Plus de la moitié des magasins Intermarché sont déficitaires, semble-t-il. Voilà ce qui arrive quand on vend de la viande presque gratuitement. Et ce ne sont pas les seuls.
Car ceux qui pensaient que le modèle de franchisage serait le salut des supermarchés en difficulté ont été confrontés à un dur reality check la semaine dernière : plus d’un tiers des magasins franchisés francophones sont dans le rouge, selon les chiffres de l’organisation sectorielle Aplsia. Plus de 15 % présentent des capitaux propres négatifs et sont donc au bord de la faillite. Et ce en Wallonie, où les supermarchés ne sont pas confrontés aux nouveaux acteurs néerlandais et où les prix du leader du marché sont en moyenne 5 % plus élevés que dans le nord. Un eldorado pour les exploitants de supermarchés, se dirait-on. Eh bien non.
C’est peut-être la raison pour laquelle les Mousquetaires renoncent à conquérir le marché flamand. Question de priorités : le triangle marginal n’est peut-être pas la meilleure zone de test. Quoi qu’il en soit, le magasin de Tirlemont va fermer. Colruyt, qui possède déjà un supermarché de l’autre côté de la ville, serait intéressé par une reprise. Les chances qu’il devienne un CRU semblent plutôt minces. Pronostic : Aarschot, le seul Intermarché subsistant en Flandre, ne devrait pas faire long feu.
Les habitués
L’heure est à la fête, y compris chez Delhaize : à la même époque l’année dernière, le détaillant alimentaire avait d’autres chats à fouetter que de séduire les clients musulmans mais, dans un esprit de fraternité, un assortiment spécial Ramadan rejoindra pour la première fois cette année les innombrables œufs de Pâques addictifs, pour autant que le ministre les autorise. Avec les habitués : dattes, couscous, épices, bouillon… mais aussi les fameuses sauces andalouse et samouraï belges. On est musulman intégré ou on ne l’est pas, ont-ils dû se dire à Kobbegem. Génial.
Les assortiments sont moins modestes dans les hypermarchés Carrefour, avec de grosses promotions sous la devise « Spécial Ramadan ». Colruyt affiche les ingrédients nécessaires à la préparation de baghrirs, des sortes de crêpes marocaines. Lidl, Aldi, Albert Heijn, Jumbo et les autres proposent également des brochures et des offres spéciales Ramadan. Il faut bien subtiliser un peu de chiffre d’affaires aux magasins ethniques spécialisés. L’inclusion, c’est aussi une question de business.
Bon, à moins que nous ne nous croisions au Tavola lundi : à la semaine prochaine !