Tous les citoyens ne sont pas égaux devant la loi, comme nous avons pu le constater cette semaine. Du plus, l’univers du food retail a été marqué par des intrigues corsées et des rebondissements salés. A déguster dans ce résumé hebdomadaire de RetailDetail Food !
Grosses têtes
Le département marketing et communication de Colruyt Group en a fait des heures supplémentaires cette semaine. Toutes les grosses têtes ont été convoquées sur le site de Wilgenveld, où les workshops et brainstormings se sont enchaînés, entrecoupés ici et là par quelques exercices respiratoires et sessions de yoga, afin d’ouvrir les esprits aux idées créatives. Car le défi était de taille : comment faire croire que vous avez gravi le Oude Kwaremont dans le groupe de tête, alors qu’en réalité vous avez honteusement été doublé par le peloton tout entier. Mouais. Ils ont eu beau brûler des bâtonnets d’encens, faire vibrer des bols chantants, réciter des mantras, … mais aucune idée lumineuse ne leur est venue. Le désespoir commençait à gagner les esprits, jusqu’à ce qu’une collaboratrice qui passait par là se glisse timidement dans l’entrebâillement de la porte.
« Hello. Je m’appelle Emma. Avouez, qui se soucie de l’avis d’une femme de ménage ? Mais il s’agit ici de mon avenir, c’est pourquoi je veux faire entendre ma voix. Regardez : voici un filet à linge. On en vend chez Action pour moins que rien. Réutilisable jusqu’à 100 fois, très pratique pour les soutiens-gorge et les collants, mais également très approprié, à mon avis, pour les pommes ou les tomates. Si nous les vendons à un demi-euro pièce, cela nous rapportera un fameux gain, qui plus est si nous ne laissons pas le choix aux clients. Pas vrai ? » Un silence dérangeant s’est installé dans la salle de réunion. Tous les regards se sont tournés vers un seul homme, qui regardait dans le vague, impassible, jusqu’à ce qu’un bon coup de coude le rappelle à l’ordre : « C’est à vous que cela s’adresse, Jef. » Emergeant de ses rêveries le grand patron a levé sereinement le pousse vers le haut, suscitant quelque étonnement : « Euh, c’est de la craie sur votre pouce, monsieur Colruyt ? Ou est-ce ce que je pense ? »
Un sac dans un sac
Mais admettons : le plan a fonctionné à merveille. Les médias nationaux et internationaux se sont montrés super enthousiastes. Sur les réseaux sociaux le retailer a été inondé de likes, petits cœurs, smileys et autres compliments. Que les sachets en plastique pour fruits et légumes ne représentent en réalité qu’une part homéopathique des déchets ? Aucune importance ! Qu’il y ait toujours des gobelets en plastique au stand de dégustation de vin ? Détail futile ! Que d’autres chaînes de supermarchés aient déjà apporté une solution un an plus tôt ? Insignifiant ! Bref, nous avons assisté une fois de plus à une guerre de perception de la plus pure espèce.
Les concullègues n’ont pas apprécié, mais ont sagement évité de balancer leurs commentaires sarcastiques dans les médias. C’est à cela que sert Filet Pur, tout compte fait. Mais entretemps des citoyens vigilants s’interrogent : Pourquoi Colruyt ne vend-il pas ces sachets au meilleur prix ? Le polyester vaut-il mieux que le coton bio ? Pourquoi préférer les sachets réutilisables aux sachets biodégradables ? Et lorsqu’on doit s’en débarrasser après les avoir réutilisés 100 fois, dans quel sac les jeter ? Nous non plus, nous n’avons pas de réponses à ces questions. Mais tout de même : belle initiative.
Le Saint Graal
Mais bon, aucune honte à ne pas être le premier, ce qui compte c’est d’être le meilleur. Tel fut également le raisonnement de Delhaize, qui à son tour lance une application mobile de self-scanning et de paiement. Le système rappelle tant l’app de Spar que le concept tap to go d’Albert Heijn et l’idée semble claire : laissez les clients utiliser leur propre smartphone et vous n’aurez plus à investir dans les scanettes, les check-out et les caissières. Le magasin sans caisse reste le Saint Graal du retail, mais pour l’instant personne n’arrive à la cheville d’Amazon Go.
Et comme si le monde n’était pas encore assez confus, voilà que le consommateur crédule a découvert cette semaine que les frites étaient meilleures pour la santé que le saumon et les pizzas surgelés aussi saines que les salades au quinoa – du Colruyt bien évidemment. Oui, ce fameux nutri-score a beau être basé sur des critères scientifiques, il affiche parfois des résultats surprenants. Et suscite des réactions mitigées : des fabricants grommelants et des retailers satisfaits, en grandes lignes. Une simple analyse des points forts et faibles démontre que la force de ce label, qui est sa simplicité, est en même temps sa plus grande faiblesse, car trop simple. Eh oui, rien n’est jamais parfait.
Crampes défensives
Quant à savoir quel label obtiendra le nouveau, awesome et incredible burger de Nestlé, nous ne savons pas encore. Toujours est-il qu’il crépitera et saignera comme un vrai hamburger, promet le producteur. Mais malgré – au plutôt à cause de – sa grande ressemblance avec le vrai steak haché, il se pourrait que d’ici peu le burger végétal ne puisse plus porter le nom de ‘burger’. Les ministres européens de l’agriculture sont en effet pris de crampes défensives en contemplant cet engouement végan qui envahit le monde occidental. Pour une raison mystérieuse ils estiment que les éleveurs de bétail ont le droit d’être défendus face aux cultivateurs de légumes.
Donc d’ici peu les mots composés du style burger végan, steak au soja ou encore saucisses végétales ne seront plus autorisés. Really. Et qu’en est-il d’un burger au poisson ? Le secteur de la pomme de terre va-t-il bientôt protester contre les frites de légumes ? Et combien de temps encore cette magnifique rubrique pourra-t-elle garder son nom, puisqu’aucune goutte de sang n’est versée au cours de son processus de production pourtant artisanal ?
Mais pourquoi ont-ils besoin de créer des problèmes qui n’existent pas, pour ensuite inventer une mesure idiote pour calmer le jeu ? La chance qu’un shopper inattentif à la recherche d’un burger Angus rentre à la maison avec une rondelle de tofu est totalement inexistante.
Ragots et potins
Et pour terminer ceci : pour les ragots, potins, commérages, intrigues et tromperies dans le food retail, une seule adresse : Aldi, à Essen, qui cette semaine une fois de plus a fait honneur à sa réputation. Je m’explique. La veuve du co-fondateur Theo Albrecht semble être sortie de sa tombe comme une méchante sorcière pour se venger de sa belle-fille décadente, qui refuse de mener une vie modeste et modérée. Apparemment elle doit s’adonner à des orgies, ou du moins c’est ce que nous imaginons : des soirées de débauche arrosées de champagne Veuve Durand (raffiné et élégant, finement pétillant, au goût frais et fruité, de qualité identique à la marque A, sauf que meilleur marché). Enfin bref, sa belle-mère dans son testament l’a exclue de tout poste au sein de cette splendide entreprise familiale.
Eh oui, ‘la vengeance est un plat qui se mange froid’, comme l’écrivait mon cher ami Pierre Choderlos de Laclos dans son chef-d’œuvre ‘Les Liaisons Dangereuses’. Un exemple à ne pas suivre pour quelqu’un qui ambitionne une vie modeste et modérée. Mais pourquoi serait-ce notre ambition ? C’est vendredi : temps de passer à l’apéro. A la semaine prochaine !
Vous souhaitez recevoir chaque vendredi un résumé de l’actualité FMCG dans votre boîte mail ? Inscrivez-vous ici pour la newsletter gratuite de RetailDetail Food.