Quelle semaine ! Les retailers les uns après les autres sont placés sous curatelle et un triangle inversé met le secteur food sens dessus dessous. Mystérieux non ? Voici votre résumé hebdomadaire de l’actualité FMCG par RetailDetail Food.
Une visite de courtoisie
Non, Alexandre Bompard, le nouveau ‘big boss’ de Carrefour ne perd pas de temps. Il envisage des mesures draconiennes afin de relancer les hypermarchés français. Pour ce faire il pense notamment à des fermetures, des ouvertures dominicales et le transfert de certaines filiales sous franchise. Et quand il pleut à Paris …
Cette semaine le grand patron a fait une brève apparition au salon de fin d’année de Carrefour Belgium, qui fut bien plus qu’une petite visite de courtoisie. La composition du comité exécutif a été entièrement revue et François-Melchior de Polignac, CEO de Carrefour Belgium, a été envoyé direction France, où il travaillera pour son prédécesseur Gérard Lavinay. Guillaume de Colonges, nommé Directeur Exécutif Europe du Nord et de l’Est, assurera la direction opérationnelle de Carrefour Belgium depuis la France.
Que penser de tout cela ? Après que Delhaize ait été placé sous curatelle des Hollandais d’Albert Heijn, voilà maintenant qu’un scénario similaire se produit chez Carrefour, où le groupe renforce son emprise. Un signe de satisfaction concernant la situation actuelle ? Ou la Belgique est-elle trop petite pour un CEO à part entière ? Ce ne sont que des questions …
D’ailleurs, parlant de Carrefour : sachant que le fameux Albert Heijn de la Groenplaats à Anvers est voué à disparaître, le retailer a décidé d’investir dans le Carrefour Market, situé sous cette même Groenplaats. Le supermarché a été entièrement rénové et propose désormais un service surprenant : les clients peuvent y laisser leurs courses, pour ensuite les faire livrer à domicile endéans l’heure. Encore une tendance qui nous vient de Paris. Just saying.
Trop c’est trop
Comme si Colruyt avait voulu marquer le coup après avoir lu notre article sur les promotions 1+1, le weekend dernier les produits gratuits, avec en grandes lettres la mention obligée ‘réaction concurrent’, trônaient bel et bien dans les rayons. Enfin, au moins dans un magasin. Eh oui, nous avons de fidèles lecteurs à Hal.
La plupart des fabricants déplorent ce phénomène, car ils paient la majeure partie de la facture. Mais on aurait pu penser que les consommateurs seraient unanimement heureux de cette tendance qu’ont les retailers à offrir des produits gratuits. Eh bien non, les avis sont partagés. Pour certains la gratuité n’est pas suffisante, alors que pour d’autres trop c’est trop. Ils n’ont plus de place dans leur armoire à provisions et regrettent de gaspiller inutilement. Jeter un paquet de jambon périmé, c’est comme payer double, même si le jambon vous a été offert gratuitement.
C’est également ce que pense une mère célibataire de Hasselt qui a adressé une lettre ouverte à Delhaize : « Que dois-je faire de deux melons prêts à consommer et de deux sacs de pommes de terre ? », se demande-t-elle. Les promotions 1+1 ne tiennent pas compte des célibataires et des séniors, qui paient la note alors que les ménages en tirent profit. Bref, rien n’est jamais parfait. Pour certains groupes-cibles la gratuité est synonyme de cherté. D’ailleurs vous savez bien : quand un service est gratuit, le consommateur est le produit. C’est valable aussi pour vous, cher lecteur de cet article gratuit (!).
Des citrons hors prix
Chez Aldi la gratuité ce n’est pas leur truc, eux ils savent compter. Alors que les fabricants de marques s’inquiétaient déjà du durcissement des négociations d’achats avec le groupe fusionné Ahold Delhaize, voilà qu’un autre souci vient s’y ajouter. De fait, le discounter Aldi Nord a décidé de centraliser l’achat des marques A en Europe afin d’obtenir des prix plus intéressants des grandes multinationales. Fini les discussions conviviales à Erpe-Mere. A Essen ils sont prêts à serrer la vis.
Pas question non plus de gratuité chez Spadel, dont les ventes d’eaux aromatisées ont augmenté à tel point que le groupe est obligé d’installer d’urgence une nouvelle ligne d’embouteillage. L’eau aromatisée a la cote, mais est loin d’être gratuite, comme en témoigne le calcul effectué par quelques collègues du journal De Standaard : 17,32 euros par citron. C’est pas donné ! Tout comme les marques A en général d’ailleurs, dont les prix en Belgique ont augmenté de 4,2% en moyenne, un record européen, paraît-il. Cette année la hausse des prix sera moins marquée, parce qu’Aldi met la pression. Et Colruyt suit le mouvement.
Colruyt qui ne reste jamais les bras croisés, a lancé une nouvelle plate-forme numérique qui fournit toutes sortes d’informations sur les produits alimentaires des marques maison du groupe. Pourtant les analystes d’ABM Amro qualifie Colruyt de ‘paresseux’, en termes financiers : dans le bilan il y a trop d’argent, dont le groupe ne fait rien. Un capital qui ne rapporte donc rien, tout comme votre livret d’épargne. Non Jef, développer des apps ne suffit pas, il faudrait d’urgence envisager une grosse reprise ou autre chose. Des suggestions ?
Une foi hésitante
La foi des retailers alimentaires dans l’e-commerce reste hésitante, tout comme ceux qui croient qu’il doit forcément y avoir ‘quelque chose de plus’ entre ciel et terre, sans pour autant vouloir se convertir à une religion. De la même manière les supermarchés ne veulent pas se ruiner à investir dans l’online et en même temps ils n’entendent pas rater le train du e-commerce.
Carrefour Belgium par contre croit dur comme fer au e-commerce. Pour preuve en septembre le retailer a ouvert 15 nouveaux points de retrait pour les commandes passées via drive.be. Dès lors les e-acheteurs peuvent venir retirer leurs commandes dans 152 drives différents, à moins qu’ils préfèrent se faire livrer à domicile par PostNL ou Bringr.
Pourrait-on également y retirer les colis de bières commandés chez Beerwulf, la plate-forme online pour bières spéciales qui peut compter sur l’appui financier de Heineken ? Nous en doutons. Après un lancement réussi aux Pays-Bas, ce webshop fait son entrée en Belgique et veut conquérir toute l’Europe, grâce à sa plate-forme qui compte déjà 150 brasseurs affiliés. Espérons pour les initiateurs que le géant brassicole néerlandais continue d’investir des fonds, même après le désengagement partiel de l’actionnaire mexicain Fomento Economico Mexicano, qui a fait chuté le cours de l’action à la bourse.
Manger ou être mangé
Blurring, ou l’estompement de la frontière entre le retail et l’horeca, est une tendance qui persiste depuis quelques années déjà dans le retail alimentaire, bien qu’essentiellement en théorie. Mais cela commence à changer, nous semble-t-il. Deux retailers belges ont entrepris des actions concrètes. D’une part Carrefour Express qui, à l’exemple du français Carrefour Bon’App, mise de plus en plus sur la consommation immédiate et qui à ce titre remet en question les heures d’ouverture limitées des commerces alimentaires. Et d’autre part le grossiste Spar, Lambrechts, qui avec sa nouvelle enseigne Spar Good Food intègre des éléments horeca dans le supermarché de proximité. Au du moins dans deux magasins pilotes pour commencer.
Oui, dans les secteur FMCG il est plus que jamais question de manger ou d’être mangé. C’est ce qu’a pu constater l’entreprise belge Ecover, pionnière écologique, qui il y a quelques années encore réalisait une belle reprise aux Etats-Unis, mais qui à son tour s’est fait engloutir par un concurrent américain beaucoup plus grand.
Humus gras
Les jeunes se convertissent massivement au végétarisme, titrait le magazine Humo. Les scandales des abattoirs ne les laissent pas indifférents. Mais pour combien de temps ? Même la nouvelle pyramide alimentaire inversée présentée par le ‘Vlaams Instituut Gezond Leven’ privilégie très nettement l’alimentation végétale. Le végétal, c’est l’avenir, comme RetailDetail Food l’a déjà souvent prédit. Non pas que tous les acteurs de l’industrie alimentaire s’en réjouissent. L’expert en nutrition Patrick Mullie met le doigt sur la plaie : « Les produits à hautes marges bénéficiaires, comme les sodas et le fastfood, sont déconseillés, et les produits à faibles marges, comme les légumes et les pommes de terre, sont promus. »
L’industrie de la viande et le Boerenbond sont en colère : l’humus est plus gras que le jambon, disent-ils. La Fevia elle aussi estime que l’enfer est pavé de bonnes intentions : le modèle est-il scientifiquement fondé ? Certaines catégories de produits sont abordées de manière négative, « malgré les efforts considérables fournis ces dernières années », indique le communiqué. Le VLAM n’aurait pu choisir de meilleur moment pour le lancement de sa campagne en vue de promouvoir la viande de bœuf. D’autres par contre sont heureux. Danone par exemple, qui dans un communiqué de presse se félicite que les produits laitiers, bien que non végétaux, soient bien représentés dans la pyramide. Apparemment ils s’attendaient à pire.
Précisons tout de même qu’il s’agit ici de la pyramide alimentaire flamande et que donc les Francophones pourront sans réserve continuer à dévorer leur portion quotidienne de steak blanc bleu. Préparé avec du bon beurre, cela va de soi ! Avec des frites cuites dans la graisse de bœuf et une bonne cuillérée de mayonnaise … et quelques feuilles de salades en accompagnement. Bon appétit et à la semaine prochaine !
Vous souhaitez recevoir chaque vendredi un résumé de l’actualité FMCG dans votre boîte mail ? Inscrivez-vous ici pour la newsletter gratuite de RetailDetail Food.