Si vous lisez ceci, il y a de fortes chances que vous soyez actif dans le secteur alimentaire. Vous êtes donc un escroc. Ce n’est pas RetailDetail Food qui le dit, c’est un verdict scientifique. L’édito hebdomadaire vous explique pourquoi.
De la prévoyance
On ne saurait trop insister : malgré son ton ironique – c’est plus fort que nous – cette rubrique ne contient pas d’affabulations, et certainement pas de fausses nouvelles. Plus encore : Filet Pur dévoile parfois des faits avant même qu’ils ne se soient réellement produits. Vous pouvez vérifier.
La semaine dernière, nous nous sommes posé la question de savoir si la nouvelle entreprise Essity, la division consommateurs de SCA, allait devenir un chasseur ou une proie d’acquisition. La réponse ne s’est pas fait attendre : un consortium de deux fonds d’investissements a émis une offre de plus de 20 milliards d’euros. Certainement après la lecture de cet édito. Et comment a réagi le cours boursier ? Exactement ! Pour utiliser les mêmes mots qu’un ancien slogan du journal d’affaires De Tijd : la prévoyance des affaires.
N’avons-nous pas dévoilé le problème d’image dont souffrent les numéros E il y a à peine une semaine ? Or dans la foulée, la microbiologiste néerlandaise Rosanne Hertzberger a publié son livre qui porte le titre remarquable ‘Ode aan de E-nummers’ (« Un hommage aux numéros E », ndlr.). Comme si tout avait été arrangé au préalable.
En résumé : au lieu de bannir les numéros E, les supermarchés feraient mieux de retirer le sucre, la graisse, l’alcool et le tabac de leurs rayons, parce ces produits sont bien réellement mortifères. Par contre, il n’y a rien de mal à la technologie alimentaire. Mais il fait continuer à surveiller les fabricants alimentaires de près, précise-t-elle, parce que « ce sont des escrocs qui contournent les réglementations pour augmenter leurs ventes. » C’est ce qui est écrit littéralement et oui, elle parle de vous. Vous vous sentez visé ? J’en étais convaincu ! De plus, cette même dame affirme que, de nos jours, cuisiner est tout au plus un hobby agréable, mais que cela n’est pas vraiment indispensable : rien de plus facile que d’acheter un repas préparé. La plupart des gens ne tricotent plus leurs propres pulls eux-mêmes, que je sache.
Une obsession saine
Aujourd’hui, la petite bouteille d’eau minérale est devenue un accessoire de mode très tendance avec laquelle les femmes (principalement) aiment se promener pour montrer qu’elles prennent soin d’elles, comme il se doit. En effet, il est essentiel de boire de l’eau, mais c’est une aberration de prétendre que cela fait maigrir. C’est ce qu’ils ont compris chez Contrex. Le nouveau positionnement de la marque ne se concentre plus sur une silhouette fine, mais sur un style de vie sain pour la femme active, avec le hashtag très combatif #noussommesinvicibles.
Entre temps, les collègues chez Coca-Cola ont fait savoir que la consommation de coca sans sucre ne cesse d’augmenter, et certainement depuis le repositionnement réussi du Coca zero sugar. Près de la moitié de toutes les variantes Coca-Cola vendues en Belgique, ne contiennent plus de sucre. C’est pour cette raison que l’entreprise va lancer pas moins de sept nouveaux goûts de sodas sans sucre avant l’été.
Je me fais dès lors la réflexion suivante : aucun article n’évoque l’impact de cette tendance sur l’industrie sucrière, mais bien l’aspect psychologique de l’affaire. L’orthorexie, tel est le mot utilisé lorsque manger et boire sainement devient une obsession. La situation est bien pire que prévue : même le marché du chocolat continue sa dégringolade, même si Barry Callebaut arrive quand même à faire grimper ses ventes. Vraiment : un marché du chocolat qui fond. Comment en est-on arrivé là ? C’est également la question que se pose le Japonais moyen : il est confronté à une pénurie de chips suite à une mauvaise récolte de pommes de terre. Des consommateurs désespérés offrent déjà jusqu’à 12 dollars pour un paquet de chips au paprika.
Une pratique de dopage
Non, donnez-moi plutôt une bonne petite bière. On ne rencontre que des visages heureux à la brasserie néerlandaise Bavaria. Depuis la reprise de Palm, les chiffres de vente explosent, tant sur le marché national qu’à l’international. Tous ensemble : pas étonnant puisqu’ils peuvent enfin vendre de la vraie bière. Oui, une petite blague gratuite, je l’avoue, mais parfois, c’est plus fort que moi.
Les chiffres trimestriels de Carrefour ont provoqué des sentiments mitigés. Une belle croissance du chiffre d’affaires, mais des problèmes persistants au niveau des hypermarchés français. Et ceci : des chiffres en baisse en Belgique. Nous avons voulu en savoir plus. Qu’avons-nous découvert ? L’année dernière, Carrefour a mené une grande action ‘courses gratuites’ dans notre pays. Donner des produits est une pratique de dopage souvent utilisée par les supermarchés qui ont un besoin urgent de propulser leur part de marché, mais ce n’est certainement pas une stratégie à long terme. Cette année, le retailer a décidé de clôturer son premier trimestre sans artifice.
Aurait-on également recours au dopage chez Tesco ? Après quelques années difficiles, la chaîne britannique a enfin réussi à renouer avec la croissance. Les chiffres positifs proviennent notamment de l’introduction de sept nouvelles marques de distributeur, peut-on apprendre. Cela nous semble parfaitement légal. Ou pas ? Par hasard, nous avons publié les résultats d’une enquête menée auprès de fabricants de marques de distribution cette semaine. Ils ont des difficultés à travailler avec Carrefour ou Tesco, et préfèrent la simple droiture d’Aldi et de Lidl. Comme beaucoup de consommateurs, d’ailleurs.
La fête tous les jours
Les idéalistes qui ont lancé le supermarché bio coopératif Färm prouvent qu’il est possible d’entreprendre avec succès en ayant des idées écologiques. La chaîne va ouvrir son cinquième et sixième point de vente, alors qu’un des magasins existants va déménager vers un endroit plus spacieux. Félicitations.
Selon nos informations, l’exploitant Delhaize Dieter Debaveye ne porte pas de chaussettes en laine de mouton. Par contre, il a ouvert le supermarché AD Delhaize le plus moderne du pays, à Opwijk, cette semaine. Un peu bizarre quand même : il avait repris l’ancien Red Market situé dans la même commune au moment où les travaux de construction de son nouveau magasin avaient déjà débuté et il l’a transformé en un AD Delhaize qui n’a servi que quelques mois, pour ensuite déménager définitivement dans son nouvel établissement. L’ancien Red Market se retrouve à nouveau vide. Difficile à suivre par moments.
Cela ne les empêche pas de dormir chez Delhaize. L’entreprise n’a qu’une seule priorité cette année : faire la fête comme des forcenés. Durant quatre jours ! Effectivement, à l’occasion de son 150ième anniversaire. Et tous les 15.000 employés participeront aux festivités. Une telle fête ne peut évidemment pas avoir lieu dans la salle paroissiale de Zellik. Le retailer a donc décidé de louer le parc de Laeken. Cela vaudra le déplacement : foodtrucks, spectacles, roue géante, feu d’artifice, … Il n’y a qu’un seul petit problème : le parc est un domaine public et n’est donc pas à louer. Cela tombe bien, estime-t-on chez Delhaize : le prix de la location sera donc de zéro euro. La Région bruxelloise se donne encore le temps de la réflexion, mais les invitations auraient déjà été envoyées. Ah bon, nous ne l’avons pas encore reçue. Vous oui ? Vous êtes donc bien un escroc ! A la semaine prochaine !
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