Ce que Carrefour a à cacher, pourquoi Colruyt verse dans le sarcasme et ce que ces étranges Russes manigancent vraiment sur le marché belge : le meilleur de l’actualité food-retail, c’est en exclusivité dans Filet Pur, et nulle part ailleurs.
Achats de rattrapage
Il y a de l’espoir. Du moins si l’on s’en tient à ce qui vit Walmart aux États-Unis : avec une campagne de vaccination qui bat son plein, les consommateurs n’hésitent plus à sortir de chez eux et à brandir leur carte de crédit pour acheter tout ce dont ils se sont privés ces quatorze derniers mois. C’est un énorme mouvement de rattrapage qui va relancer l’économie. Si le plus grand retailer au monde le dit, ça ne peut qu’être vrai, non ?
D’autant que cette position a été officiellement confirmée la semaine dernière avec la publication du dernier hit-parade des 250 plus grands retailers mondiaux. Une position incontestée. Amazon peut être plus grand en termes de capitalisation boursière : ses ventes au détail restent loin derrière. Un classement bien intéressant d’ailleurs, où l’on note également qu’Ahold Delhaize, avec sa douzième place et son taux de croissance plus que respectable, n’est pas loin du top mondial. Chapeau bas, Frans ! Mais la phrase la plus remarquable du rapport Deloitte figure en petits caractères à la page 43 : « Carrefour S.A. a été exclu du rapport de cette année à la demande de l’entreprise »… Allons, monsieur Bompard, auriez-vous quelque chose à cacher ? Vous auriez pu figurer dans le top 10 !
Chez le docteur
Pour trouver de la fierté, il faut aller voir chez Spar, la plus grande chaîne de supermarchés du monde – du moins en termes de nombre de magasins. On y a enregistré une croissance de 12% en Europe l’an dernier, avec même un bond de 23,5% aux Pays-Bas. Des chiffres appréciables, grâce à une crise sanitaire qui a remis le magasin de proximité au goût du jour. Door Eendrachtig Samenwerken Profiteren Allen Regelmatig – l’acronyme de Spar, En coopérant harmonieusement, tout le monde profite régulièrement en VF : ils n’ont pas tort. Les Espagnols d’Eroski aussi sont heureux : après une profonde restructuration, la chaîne a renoué avec la rentabilité.
Depuis cette semaine, nous n’avons plus à chercher bien loin le responsable de tous ces kilos en trop accumulés pendant le confinement : Dr. Oetker a publié des résultats records. Manifestement, nous avons surtout combattu le virus en nous empiffrant de pizzas surgelées et des pâtisseries. Vous pensiez que c’était sain parce qu’il y avait Docteur sur l’emballage ? Malin, ce marketing, August ! Parce que, oui, c’est son vrai prénom. Avec Filet Pur, on en apprend tous les jours. Et vous n’y manquerez pas : ce bon docteur vient de lancer une campagne de bannières sur RetailDetail. Pour rappeler aux food-retailers que les fans de football n’auront pas le temps de cuisiner cet été et qu’ils vont donc… s’empiffrer de pizzas devant la télévision. Après les kilos du corona, les kilos de l’Euro.
Une bien piètre étude de marché
Toc toc, qui est là ? C’est Picnic ! Après un essai plutôt maladroit sous un pseudonyme assez risible, les Néerlandais de Picnic ont officiellement mis en service leurs camionnettes de livraison électriques à Valenciennes, dans le nord de la France. « La ville abrite de nombreuses familles qui aimeraient gagner du temps en se faisant livrer leurs courses à domicile », a conclu le cofondateur Michiel Muller (oui, le frère de) de deux ans d’études de marché. Beau travail, Michiel !
Une autre étude de marché qui a pris un peu moins de temps est arrivée à la conclusion surprenante que Coca-Cola est toujours la marque la plus achetée au monde. Ça alors ! Et que Dettol, Lifebuoy et Vim sont les grands gagnants du confinement. Sans blague…. Je ne l’avais pas vu venir… Mais une autre étude de marché met ces grandes marques en garde : un virage stratégique des supermarchés mainstream creuse l’écart de prix par rapport aux marques de distributeur. Au lieu de lutter contre les hard-discounters avec des marques premier prix, ils ont décidé de baisser les prix de leurs marques. Ce qui ne restera pas sans conséquence. Et ce n’est pas tout.
We want Mere
Car l’annonce de la semaine vient de ce discounter russe qui envisage une conquête éclair de l’Europe occidentale, y compris notre petite Belgique que dédaigne toujours Picnic. Nous avons eu tous les médias au téléphone : qui sont-ils, et que viennent-ils faire ici sur notre marché complètement saturé ? Bref… Tout d’abord, un marché saturé, ça n’existe pas. Tant que vous êtes distinctif et pertinent. Et des prix bas sont-ils pertinents en cette époque post-pandémique, avec une récession imminente et une possible vague inflationniste ? Comme dit l’autre : la question est vite répondue.
C’est cependant une bonne nouvelle pour Colruyt : ils n’auront bientôt plus les magasins le plus laids du pays. Car un Mere ressemble exactement à ce que vous attendez d’un discounter sibérien : un croisement entre un outlet délabré et un Aldi des années 1980. Un hangar avec quelques palettes, des rayons bas de gamme et une caisse. Si vous n’avez qu’un panneau à visser sur la façade, il n’est pas difficile de s’étendre rapidement. D’autant qu’il y a de la place au bas de l’échelle depuis que les hard-discounters allemands ont décidé à l’unisson qu’ils devaient de toute urgence se transformer en des supermarchés du frais conviviaux et chaleureux. Cela s’appelle the wheel of retailing et c’est une lecture obligatoire dans toute formation en retail. Pour une analyse des causes et des conséquences, c’est ici. De rien !
Jeff le sarcastique
Bon, ce n’est pas pour l’atmosphère et la convivialité qu’on s’y rend, et la qualité des produits d’importation proposés sur les palettes pose également question. Lais il n’y a finalement qu’une lettre de différence entre Mere et merde. Les fournisseurs locaux sont d’ailleurs gentiment invités à s’inscrire sur le site web belge de la chaîne, du moins dans la mesure où ils proposent de la camelote bon marché. Mais que les sceptiques se rassurent, quand Mere a ouvert son premier magasin allemand à Leipzig il y a deux ans, elle a dû le refermer presque immédiatement : le succès était tel que le rare personnel était incapable de réapprovisionner les rayons et que les fournisseurs ne pouvaient pas suivre. Simple rappel. S’ils étaient plus intelligents en marketing, ils ouvriraient bien entendu leur premier établissement à Mere, en Flandre orientale. Mais non : ce sera Opwijk.
Pour terminer : l’optimisme est un devoir moral et s’il n’y a rien de mal à faire une blague de temps en temps, il y a des limites à ne pas dépasser. Oui, Jeff, je parle de toi. Nous sortons de plusieurs semaines d’averses et de froid déprimants et le week-end ne promet aucune amélioration. Désespérés et transis, les propriétaires de restaurants referment les terrasses à peine rouvertes par manque de clients – et aussi parce que leurs parasols ont été emportés par le vent. Mais Colruyt ne trouve rien de mieux à faire que de remuer le couteau dans la plaie : l’enseigne nous a bombardés d’offres estivales pendant toute la semaine, sous le slogan « vos barbecues commencent ici ». Chers amis de la chaussée d’Enghien, pourriez-vous dorénavant laisser les sarcasmes à Filet Pur ? Chacun son métier, après tout. En vous remerciant ! À la semaine prochaine !
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