Si le gratuit était vraiment gratuit, les brochures n’en seraient pas remplies. Et si les prix ne baissent pas, ils montent, à moins qu’ils montent secrètement pour prétendument baisser ensuite. Vous suivez toujours ? Filet Pur non plus.
Rideaux de fumée
Non, votre fidèle reporter de guerre n’a heureusement pas été battu la semaine dernière, pas plus qu’il n’a reçu de balle dans la jambe. Ce ne sont pourtant pas les affrontements qui ont manqué. L’analyste des brochures du Het Nieuwsblad a relevé quelque 158 « 1+1 gratuit », vingt « 2+3 gratuit » et dix « 1+2 gratuit » dans les prospectus de nos chaînes de supermarchés toujours aussi zélées. De plus en plus de gratuit : bien joué ! De quoi amener De Standaard à se demander qui payait réellement toutes ces réductions. La réponse est simple : le client, en remplissant son caddie d’articles essentiels qui, eux, ne sont pas en solde.
Car réfléchissez-y deux secondes : 188 promotions-chocs dans neuf chaînes de supermarchés dont la plupart ont plus de dix mille produits en rayons, ce n’est pas excessif, pas vrai ? Nous le savons tous : il ne s’agit que d’écrans de fumée destinés à détourner l’attention des clients de l’évolution réelle des prix. La plupart des consommateurs ne sont pas des foudres en calcul mental, et les retailers seraient bien stupides de ne pas en profiter. Pendant ce temps, les prix du beurre s’envolent, comme ceux de l’huile d’olive (encore) et de la bière, entre autres.
Gourmandise
Mais il y a aussi des baisses. Aldi ne se contente pas de baisser les prix du sucre et ajoute quatre promotions « Week-end Supermalin » à partir d’aujourd’hui. En particulier pour les produits frais, qui sont souvent achetés le vendredi et le samedi. Frais n’est d’ailleurs pas synonyme de sain : un gâteau est aussi un produit frais, souligne le communiqué de presse. C’est noté ! Ben oui, les Belges ne sont pas seulement de grands gourmands, ils sont aussi très sensibles aux promotions, affirme le discounter. C’est ainsi qu’ils ont été élevés, en particulier depuis l’arrivée d’Albert Heijn sur le marché flamand. Raf Van den Heuvel, Bébert en chef, observe en souriant ses concollègues s’affronter à coup d’actions-chocs, de légumes bonbons, de pain presque gratuit et d’imitations de colis frais. On est le challenger ou on ne l’est pas.
Et tout va si vite pour la petite usine à promotions bleue que son plus grand franchisé n’a plus de temps pour ses loisirs : le groupe Peeters-Govers vend donc son entreprise de gros pour l’horeca Délidis à nul autre que le leader du marché himself. Alors que la concurrence s’intensifie encore dans le foodretail, Colruyt Group cherche à se développer ailleurs : sur le marché du B2B, où la véritable vague de consolidation n’a pas encore déferlé et où le plus grand concurrent néerlandais est encore trop concentré sur lui-même et ses systèmes informatiques pour présenter une menace sérieuse. Pour l’instant.
Exorbitant
Quelques semaines après l’inauguration de son premier Foodmarket belge, Jumbo a ouvert son douzième foodwalhalla autoproclamé à Scheveningen, le Blankenberge de la côte néerlandaise. Mais vous n’y trouverez pas de viande maturée à un prix exorbitant dans les rayons, a-t-on appris. Pas de clientèle pour. À Gand non plus, d’ailleurs : le fameux boucher des célébrités anversois ne semble pas y rencontrer un grand succès, entend-on de bonne source. Sommes-nous surpris ? Pendant ce temps, les entrepreneurs se plaignent des rayons vides pour cause de querelles avec des fabricants récalcitrants. Eh oui, cela coûte du chiffre d’affaires. Mais bon, la guerre des prix avec Albert Heijn est prioritaire.
Pour ne rien arranger, le Test-Achats néerlandais accuse le Péril Jaune de pratiques trompeuses. La chanson habituelle : d’abord augmenter les prix, puis annoncer des promotions-chocs. Dirk et Aldi sont également sur bancs des accusés. Et bien entendu, tous nient en bloc : « Nous ne le faisons pas exprès, il s’agit simplement d’erreurs humaines. » Mais qu’ils fassent attention. Selon la Cour européenne de Justice, les détaillants ne doivent en effet pas seulement indiquer le prix le plus bas des 30 derniers jours en cas de promotion : le pourcentage de réduction indiqué doit également se rapporter au prix le plus bas des 30 derniers jours. Une récente condamnation d’Aldi Süd le rappelle. Vous êtes prévenus. Est-ce la raison pour laquelle Colruyt se laisse volontiers séduire par la mode du gratuit ? Après tout, c’est nettement plus sûr.
Cadeau
Se vend bien actuellement : le chocolat belge. Aux investisseurs en tout cas. Les truffes de Gudrun passent sous pavillon espagnol, bien qu’il y fasse généralement beaucoup trop chaud pour les chocolats. Et Boerinneke, la fière réponse locale au Nutella, va même tomber dans l’escarcelle de la famille royale marocaine. Chic ! Il y aura également du chocolat au FMCG & Category Management Congress de LD&Co et RetailDetail de la semaine prochaine. Un petit cadeau de Lidl et Fairtrade, qui viendront expliquer comment ils évitent l’embarras du choix aux consommateurs qui hésitent devant les rayons tout en rendant le monde un peu plus beau.
Saviez-vous que le PDG de Carrefour Geoffroy Gersdorff sera également présent à cet événement pour parler de la coopération avec ses fournisseurs, du potentiel des médias retail, du prix des données clients et de bien d’autres choses encore ? Si oui, vous feriez bien de réserver un billet rapidement. Question d’arriver bien informé à la table des négociations. Où les détails font toute la différence, n’est-ce pas ?
Flou
D’ailleurs, c’est ce détaillant qui est à l’origine de la grande nouvelle de la semaine. Le premier de ces cinq sensationnels lingots d’or offerts a déjà un nouveau propriétaire : l’heureux élu est client du Carrefour Market de Saint-Nicolas. Un homme qui souhaite rester anonyme, si l’on en juge par le floutage de la photo à l’endroit où l’on s’attendrait à trouver sa tête. À moins qu’il n’ait de bonnes raisons de dépenser son gain en chirurgie plastique, ce qui est également possible. Ou qu’il s’agisse d’un criminel recherché ?
Nous ne le saurons sans doute jamais. Mais pas d’inquiétude, des tonnes de pâtes gratuites, de moules gratuites et de vin gratuit nous attendent dans n’importe quel magasin au coin de la rue. Je m’en vais de ce pas faire des réserves. Vous non, peut-être ? À la semaine prochaine !