Les consommateurs sont des fainéants, l’e-commerce est réservé aux losers, le bio est trop cher, le plastique est superflu et les hypermarchés font partie du passé : voilà en bref ce que vous propose le résumé hebdomadaire de RetailDetail Food.
Vaines illusions
Cette semaine rebelote : des vendeurs de vent vantards nous ont bombardés de leurs bilans bancals. Le livreur de box repas HelloFresh racole de plus en plus de clients, mais est loin de faire du bénéfice. D’ailleurs ce n’est pas le but, tant que des pourvoyeurs de capital-risque continuent de mettre la main au portefeuille. C’est un modèle d’entreprise comme un autre. De même pour le supermarché online Picnic, qui grâce à l’ouverture de nouveaux centres de distribution espère réduire les listes d’attente à Eindhoven et Rotterdam, villes où les ménages sont à ce point occupés qu’ils n’ont plus le temps de se rendre au supermarché. Et quant à bol.com, sa forte croissance a servi à camoufler les ventes décevantes de Delhaize.
Oh mais attendez, mettons les points sur les i : ce ne sont pas de vrais retailers, mais des vendeurs de vaines illusions, des administrateurs d’une chaîne pyramidale, dont l’objectif principal est de brûler l’argent des investisseurs, non ? Jusqu’à présent un seul homme dans ce pays a su lever le voile sur ces croissances digitales miraculeuses et douteuses. Un seul homme, d’une grande intelligence, a osé dire la vérité : le business model d’Amazon & co est bâti sur le sable et le gros paresseux de consommateur ne doit pas s’imaginer que tout cela vu durer. Le doigt sur la plaie. Cependant : inspiré sans doute par quelques politiciens, Jef Colruyt désormais opte lui aussi pour la tactique du changement d’avis.
Un montant réaliste
Eh oui : une étude de marché approfondie a démontré que même les clients de Colruyt ont un poil dans la main. Désormais Collect & Go viendra leur livrer les courses devant leur porte, pour la modique somme de 15 euros. Nettement plus que la concurrence. Bref, le concept du ‘meilleur prix’ fait place au ‘montant réaliste’. C’est pourquoi ils testent le service dans les quartiers aisés de la périphérie est de Bruxelles. La zone pilote idéale.
D’ailleurs ce n’est pas la première fois que Colruyt saute sur un train en marche. Chez le discounter on ne prend jamais de décision à la va-vite : introspection et méditation, vous savez bien. Et si livraison à domicile il y a, elle sera durable, assure Jef Colruyt : les camionnettes rouleront au gaz naturel, et peut-être même à l’électricité et à l’hydrogène d’ici peu. Le vélo par contre n’est pas une option pour le retailer vu les nombreux emballages ‘format famille’. Quoique : si Delhaize parvient à approvisionner des magasins entiers avec des vélos-cargos à remorque, cette solution devrait convenir aussi aux ménages biactifs avec 1,64 enfant. Nous venions à peine de diffuser cet article sur notre site, que déjà notre rédaction fut contactée par des lecteurs, curieux de savoir où ils pouvaient se procurer cette petite remorque extrêmement pratique. Qu’ils s’abstiennent, l’autoroute pour vélos d’Anvers est déjà suffisamment embouteillée avec tous ces triporteurs électriques de paresseux branchés.
Négationnistes avares
Que les Wallons seraient des êtres plus paresseux que d’autres, n’a pas encore été prouvé scientifiquement. Mais que les Flamands sont des négationnistes climatiques avares a été clairement démontré par les chiffres récemment publiés par l’Office Flamand d’Agro-Marketing (VLAM). Les habitants du nord, généralement aisés, n’ont que faire de cet engouement pour le bio. Durable ? Trop cher surtout, estiment-ils. La croissance du secteur bio dans notre pays est donc entièrement attribuable aux citoyens francophones.
Faites le calcul : la part de marché du bio en Flandre est de 2,5%, contre plus de 6% dans le sud du pays. Ça donne à réfléchir. A moins que le sud soit synonyme de la riche périphérie bruxelloise, où des expatriés surpayés cherchent à se donner bonne conscience. Toujours est-il que les marchés bios continuent de pousser comme des champignons dans la région bruxelloise, qui vient tout juste d’en accueillir encore un près de Tour & Taxis.
Champion du plastique
La semaine dernière encore nous nous amusions des préservatifs pour concombres chez Albert Heijn, champion du plastique. Cette semaine le retailer semble avoir fait volte-face : toute cette matière synthétique n’est finalement pas aussi indispensable que ça. Après un test de plusieurs semaines, Appie a finalement constaté que pour préserver la fraîcheur des légumes il suffisait d’avoir un ingénieux système de nébulisation. Ils auraient pu tout bonnement s’inspirer de Cru ou de Carrefour, mais ont préféré faire le test eux-mêmes. On n’est jamais mieux servi que par soi-même.
Parlant de Carrefour : les hypermarchés déficitaires de la chaîne semblent encore plus déficitaires qu’on ne le pensait. En France le distributeur envisagerait trois fois plus de licenciements que prévu initialement. Sur base volontaire certes, mais quand même. Cela témoigne du peu de confiance que le retailer accorde à l’avenir de ce format, qui ne cesse de se réduire jusqu’à ne plus mériter le nom d’hyper. Mais cette stratégie réductrice n’est en fait qu’un sursis avant l’exécution finale : l’hyper de Genk, transformé en Market de plus petit format, devra finalement fermer ses portes, parce qu’incapable de faire face à la concurrence accrue. L’ancienne cité minière est un véritable champ de bataille commercial. Et Jumbo n’a pas encore débarqué. Ça promet !
Un puits sans fond
Eh oui, les consommateurs paresseux n’ont plus envie de parcourir des kilomètres et de passer des heures dans ces énormes magasins ‘tout sous un seul toit’. De même chez Makro, qui certes n’est pas un vrai hyper, mais un concept hybride qui incarne de manière inimitable tous les inconvénients de l’hyper. Résultat : un puits sans fond qui jamais ne pourra être comblé. La maison-mère Metro cherche à s’en débarrasser, mais qui en voudrait ?
Malgré cette situation désastreuse, certains continuent de croire dur comme fer à l’avenir de l’hypermarché. Une partie d’entre eux travaillent à Jumet, au siège social de Cora, qui cette année fête ses 50 ans. Les 2.200 autres employés remplissent les rayons d’un des neuf points de vente belges et luxembourgeois de la chaîne. Et ils le font depuis longtemps car la rotation du personnel est quasi inexistante, affirme fièrement le retailer dans un communiqué de presse. Hmmm, vous pensez ce que je pense? Je pense que oui. En tout cas, aucune fausse note dans les jolis spots télé du retailer. Ce qui n’est pas le cas de la campagne pour la fête des mères de l’enseigne allemande Edeka : sexisme de mauvais goût pour les uns, la meilleure publicité que soit pour Rewe, Aldi et Lidl, pour les autres. J’aurais aimé faire une petite remarque sur les Allemands et leur humour, mais je m’abstiendrai : la paresse intellectuelle est la pire forme d’indolence, comme l’illustre ce spot. Par contre paresser tout au long du weekend avec un bon bouquin, c’est ce qui s’appelle de l’épanouissement personnel. Je m’y mets sans attendre et vous laisse donc. A la semaine prochaine !
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