Une taxe sur la malbouffe est-elle utile ? Au Mexique apparemment oui, comme en témoigne une étude scientifique récente. Mais l’impact mesuré peut-il réellement faire la différence ?
Surpoids
En janvier 2014 le Mexique a instauré une taxe sur les sodas de 1 peso par litre (environ 10%) et une taxe santé de 8% sur les aliments riches en calories (avec un apport énergétique supérieur à 275 kcal/100g, notamment les friandises, les snacks, les céréales pour petit-déjeuner, les biscuits, les sauces et les repas préparés). Avec raison, car au Mexique 70% des adultes et 33% des enfants sont en surpoids.
Mais une telle taxe est-elle utile ? Les chercheurs du Mexican National Institute of Public Health et de l’Université de Caroline de Nord ont analysé les chiffres de Nielsen entre janvier 2012 et décembre 2014. Les résultats ont été publiés cet été dans PLoS Medicine.
Baisse significative
Les chercheurs ont constaté qu’en 2014 le volume de vente des produits taxés avait diminué de 25g par personne par mois, soit une baisse de 5,1%. Pour les produits non-taxés aucun changement significatif n’a été observé. A noter toutefois que les chiffres varient selon les classes sociales : dans les ménages à bas revenus l’achat d’aliments malsains a diminué de 10,2%, pour les classes moyennes la baisse est de 5,8%, alors que le comportement d’achat des groupes à hauts revenus est resté inchangé.
L’étude confirme donc qu’une taxe santé relativement modérée peut avoir à court terme un effet significatif sur le comportement d’achat. Les ménages fragiles surtout achètent moins de junkfood. Quant à savoir si ce changement profite à la santé publique, aucune étude ne l’a encore démontré. La baisse mesurée de 70 à 110 kcal par personne par mois reste finalement très limitée.
Par ailleurs les ventes via des canaux alternatifs, souvent meilleur marché (comme les marchands ambulants) n’ont pas été reprises dans les chiffres – peut-être les Mexicains ont-ils tout simplement acheté leur snacks ailleurs ? Tant les adeptes que les adversaires de la taxe santé trouveront dans cette étude de quoi étayer leur point de vue.
Et qu’en est-il ailleurs ?
En Belgique l’instauration de la taxe sur le sucre semble avoir eu très peu d’effet sur le comportement d’achat, sauf peut-être sur les achats transfrontaliers. Pourtant bon nombre de pays envisagent d’introduire une taxe sur les aliments malsains. Au Royaume-Uni une taxe sur les sodas entrera en vigueur en 2018, a décidé le gouvernement. Une canette de cola y coûtera dix cents en plus. A la grande joie du chef cuisinier Jamie Oliver, qui depuis longtemps plaide pour une nourriture saine.
La France a introduit une taxe sur les boissons rafraîchissantes de 7 centimes d’euro par litre et prévoit une augmentation en 2017. La Finlande ne se contente pas d’une taxe sur les sodas (22 centimes d’euro par litre), la taxe concerne aussi les friandises et la glace. La Hongrie et la Roumanie ont également une taxe santé. Au Danemark les taxes sur les graisses et le sucre se sont avérées un échec et ont été supprimées. Aux Etats-Unis, Philadelphie est la première ville à avoir instauré une taxe sur les sodas.
Et depuis le mois dernier l’État indien du Kerala a introduit une taxe sur les graisses de 14,5% pour les snacks malsains, comme les hamburgers, les donuts et les pizzas. Le gouvernement vise avant tout les chaînes de restauration rapide comme McDonald’s, Burger King, Domino’s et KFC. Les Indiens semblent abandonner massivement leurs habitudes alimentaires traditionnelles au profit de la malbouffe occidentale des fastfoods.