Lunch Garden est sur le point de redémarrer sous l’égide du fonds d’investissement anversois CIM Capital. Mais y a-t-il encore quelque chose à sauver pour cette chaîne de restaurants ? Comment ce classique belge peut-il se réinventer ?
« La base est corrigée »
« L’entreprise, qui semblait progressivement péricliter avec ses clients – des personnes âgées retraitées qui aiment sortir dîner mais ne disposent pas de gros budgets – semblait vouée à l’échec », écrivait RetailDetail. Mais aujourd’hui, « la base est corrigée » : Lunch Garden a modernisé ses restaurants, réduit ses coûts salariaux et proposé une offre à la fois plus qualitative et cohérente. « Nous avons engagé le dialogue avec nos clients existants et potentiels », déclarait le PDG.
Cela semble-t-il une projection vers 2030 ? Pas du tout, c’est un retour en arrière : nous écrivions cela en… novembre 2019. « Aujourd’hui, la transformation vers une entreprise prête pour l’avenir est presque achevée », pouvait-on lire. Et ce, quelques mois avant que la pandémie dévastatrice de Covid-19 ne frappe. Quelques mois aussi avant que la famille C&A Brenninkmeijer se retire de la chaîne de restaurants et que le fonds d’investissement Freshstream évince la PDG Annick Van Overstraeten.
La pandémie a aussitôt frappé la formule horeca de plein fouet. Des économies drastiques ont été nécessaires : un emploi sur dix a disparu, bien que cette restructuration était déjà prévue avant la pandémie, selon l’ancienne PDG. En 2021, la chaîne de restaurants est finalement tombée entre les mains du créancier Intermediate Capital Group, qui devait alors encore régler une facture de 77 millions d’euros. Malheureusement, la montagne de dettes n’a fait que croître ces dernières années.
Plus de ventes et plus de pertes
La nouvelle PDG, Ann Biebuyck, a misé sur un rajeunissement du public cible : les jeunes familles devaient venir pour des classiques flamands, du vol-au-vent au carbonnade, à petit prix. Les plats à emporter, une collaboration avec Deliveroo et également la digitalisation en coulisses devaient moderniser la formule horeca vieille de 60 ans. Une centralisation accrue, moins de gaspillage et plus de franchises ont par ailleurs permis de réduire les coûts.
Cependant, les bénéfices n’ont pas suivi : après un modeste EBITDA de 200 000 euros en 2022, malgré un doublement du chiffre d’affaires, Lunch Garden a replongé dans le rouge en 2023 avec une perte de 5,4 millions d’euros. Les coûts ont augmenté de 15 % pour atteindre 108 millions d’euros, en raison de la hausse des prix des denrées alimentaires, des salaires, des loyers et des factures énergétiques.
Bien que les restaurants aient attiré plus de visiteurs et que le chiffre d’affaires ait augmenté de près de 20 %, le propriétaire ICG a resserré les cordons de la bourse en échange d’une restructuration de la dette. La nomination de Stephan Brouwers, directeur financier, au poste de PDG a confirmé le sérieux de la situation.
Un plat de riz à 3 euros ?
CIM Capital peut-il inverser la tendance ? Le fonds d’investissement, fondé par Marc Van Hool, a déjà plusieurs succès à son actif, notamment celui de l’autre classique belge, Veritas. Pourtant, le fait que l’histoire semble se répéter à l’identique chez Lunch Garden soulève des questions : comment la chaîne de restaurants peut-elle surmonter le vieillissement de son public et se moderniser suffisamment pour attirer un consommateur diversifié ?
La tendance du « fast casual » fait fureur : des hamburgers aux poké bowls, les formules horeca proposant une restauration rapide « de qualité » ou « plus saine » se multiplient. Rapide et abordable, mais aussi Instagrammable ou adapté à TikTok – ce qui manque chez Lunch Garden. Même Ikea réussit à rester une destination attrayante pour manger, avec des promotions agressives mais aussi en restant à l’écoute des tendances alimentaires. Au menu : « steak » végétal, plantdogs et – tenez-vous bien – en janvier, un « plat de riz avec mélange de légumes et épices orientales » pour seulement 2,95 (!) euros. Le plat du jour de Lunch Garden coûtait 9,99 euros.
Tout est une question de réseau
Bien sûr, Lunch Garden ne dispose pas des moyens financiers colossaux d’Ikea, mais pourquoi ne pas établir des partenariats pour davantage de variété, d’inspiration et de diversité ? Le chef télévisé Wim Ballieu a encore déploré dans un communiqué de presse que son concept Balls & Glory n’ait jamais eu l’occasion de collaborer avec la chaîne, alors que cela semblait un partenariat idéal. Considérez cela comme une candidature libre.
Les cuisines sont en tout cas suffisamment grandes pour développer les options de plats à emporter et de livraison – un axe déjà exploré par Biebuyck après la pandémie. En collaborant avec des services de livraison comme Deliveroo et en investissant dans des repas préemballés, Lunch Garden visait déjà à attirer un public plus jeune et urbain.
CIM Capital possède un flair avéré pour attirer des PDG compétents et sait comment rendre les entreprises rentables à nouveau. L’investisseur dispose non seulement d’une expertise, mais également d’un réseau impressionnant. Des noms connus tels que Marc Coucke, Tom Waes et la famille De Clerck investissent dans le fonds. En termes de puissance financière et de vision stratégique, le fonds semble donc bien positionné pour insuffler une nouvelle vie à Lunch Garden.