Le rythme de croissance internationale de Lidl ne ralentit pas : cette année deux nouveaux pays viendront s’ajouter au réseau. Le retailer parvient à maîtriser les coûts et se focalise davantage sur l’e-commerce et la durabilité. C’est ce que révèle une analyse approfondie des résultats financiers tout juste publiés.
Croissance à deux chiffres
L’intention de Lidl, comme annoncé récemment, d’ouvrir une cinquantaine de magasins par an en France, n’a pas de quoi surprendre : à l’international le discounter appuie toujours plus fort sur l’accélérateur. C’est ce qui ressort également du dernier rapport annuel de Lidl Stiftung & Co KG, l’entreprise qui chapeaute les activités internationales du discounter : c’est-à-dire toutes les activités en dehors de l’Allemagne, qui représentent plus de 60% du chiffre d’affaires total. Des analystes de Barclays ont examiné à la loupe les chiffres tout juste publiés de l’exercice comptable 2018, clos en février 2019.
Une fois de plus, Lidl a réalisé une belle croissance à l’international : le chiffre d’affaires a progressé de 10,3% à 50,85 milliards d’euros, soit une augmentation de 4,8 milliards d’euros en chiffres absolus. Des performances qui dépassent les attentes, précise Lidl : tous les pays ont fait mieux que prévu, grâce à une combinaison d’ouvertures de nouveaux magasins et d’agrandissements de magasins existants. L’entreprise ne communique pas de résultats par pays, mais nous savons néanmoins que le chiffre d’affaires en Espagne a bondi de pas moins de 11,5% à 4 milliards d’euros et qu’en Italie le discounter a ouvert plus de quarante nouveaux magasins. En outre fin 2018 le retailer a fait son entrée en Serbie et a repris 27 points de vente Best Market aux Etats-Unis, afin de renforcer sa présence à New York, Long Island et New Jersey. Rappelons que Lidl a débuté son expansion internationale en 1988 et est aujourd’hui actif dans trente pays.
Chiffre d’affaires international de Lidl
Maîtrise des coûts
A noter que le groupe pour la première fois depuis longtemps a su améliorer sa marge EBITDA (flux de trésorerie opérationnel) : celle-ci a atteint 6,5%, malgré l’érosion de la marge brute à 26,1%. Ce résultat est attribuable à la maîtrise des coûts salariaux (actuellement 9% du chiffre d’affaires) et des autres coûts opérationnels. Une performance respectable vu l’expansion dynamique, estime Barclays : preuve que le retailer est capable d’une stricte maîtrise des coûts et même d’une augmentation de la productivité. Le chiffre d’affaires par équivalent plein temps (EPT) a augmenté de 352.000 euros à 375.000 euros par an. Par contre la marge d’exploitation (EBIT) a chuté à 3,84%, en raison de frais de démarrage – la chaîne a ouvert près de 400 nouveaux magasins – et de dévaluations.
Chiffre d’affaires par EPT – Lidl International
Les capex (dépenses d’investissement) de Lidl ont également légèrement augmenté (+2,4%) ) à 4,15 milliards d’euros, dont la majeure partie a été consacrée à l’immobilier : de nouveaux magasins et centres de distribution. En outre les magasins existants sont continuellement modernisés, par exemple en y ajoutant une boulangerie. Ces investissements représentent 8,2% du chiffre d’affaires, un pourcentage élevé comparé aux autres enseignes du secteur.
Néanmoins on observe des signes d’une gestion plus stricte : ainsi le retailer a tempéré ses ambitions en ligne et ses projets d’expansion américains. Pour l’exercice à venir Lidl se montre confiant : l’entreprise s’attend à une croissance modérée du chiffre d’affaires et des revenus nets stables, conformément à l’année précédente. Lidl continuera d’étendre et de moderniser son réseau de magasins. Pour ce faire le retailer vise deux nouveaux marchés : l’Estonie et la Lettonie.
Capex / chiffre d’affaires – comparaison
Durabilité et e-commerce
Bien que Lidl continue de se focaliser sur les prix bas, les analystes constatent néanmoins un léger changement dans le modèle d’entreprise. Ainsi l’entreprise accorde plus d’attention aux aspects écologiques et sociaux : le retailer a élargi sa gamme bio et parvient ainsi à attirer des clients ayant un pouvoir d’achat plus élevé. De plus le bio justifie des prix un peu plus élevé et assure donc de meilleures marges. Dans bon nombre de catégories le retailer opte pour le commerce équitable : café, thé, cacao, huile de palme … Les magasins et centres de distribution sont construits selon des standards plus durables, ce qui à son tour réduit les besoins énergétiques.
Les ventes en ligne de Lidl ont augmenté de 56% au niveau mondial, mais la part de l’online dans le chiffre d’affaires reste faible : environ 1%. Les pays où Lidl vend du food et du non-food en ligne sont de plus en plus nombreux. Durant l’exercice écoulé le retailer a ouvert un webshop en Pologne, tandis qu’en Espagne il a conclu un accord de collaboration avec le supermarché en ligne Lola Market, qui livre à domicile l’assortiment complet de Lidl, y compris les produits frais, et ce endéans l’heure. En Italie et en Irlande aussi le discounter a conclu des partenariats similaires. Par ailleurs Lidl poursuit le déploiement de son app de fidélité Lidl Plus et de son application de paiement Lidl Pay.
Acquisitions tactiques
Pour Lidl il reste encore un gros potentiel de croissance aux Etats-Unis : le discounter apprend vite et a donc américanisé son concept de magasin. Le retailer y ouvre des magasins de plus petit format à des endroits très fréquentés et recherche des acquisitions tactiques afin d’accélérer sa croissance. Fin 2020 la chaîne devrait compter plus de 100 magasins dans neuf états. Pourtant il faudra encore une décennie avant que l’entreprise n’atteigne une envergure significative outre-Atlantique, sachant que son rival Aldi dispose déjà de 1900 magasins aux Etats-Unis et vise la barre des 2500 d’ici fin 2025.
Autre changement de cap à signaler : une intégration verticale accrue dans le domaine des emballages et du recyclage. Depuis la reprise de l’entreprise de traitement de déchets Tönsmeier, la maison-mère Schwarz Group est la cinquième entreprise de recyclage en Allemagne. En Autriche aussi le groupe a racheté la société de recyclage Sky Plastic : une stratégie intelligente vu la réglementation européenne toujours plus sévère en matière de déchets d’emballages.