Dix ans après l’arrivée d’Albert Heijn, les rapports sur le marché belge de la distribution alimentaire ont été bouleversés. Le leader du marché hollandais oblige ses concurrents à placer la barre toujours plus haut.
Scepticisme non fondé
Lorsque le premier Albert Heijn a ouvert ses portes à Brasschaat, en Flandre, le 16 mars 2011, les chances de réussite du détaillant avaient été largement remises en doute. Offre trop hollandaise, culture d’entreprise trop directe, les franchisés locaux n’accepteraient jamais ce carcan de couleur bleue. Brasschaat, une semi-colonie hollandaise, était un point d’entrée facile, mais la conquête de la Flandre occidentale était vouée à l’échec. Dix ans plus tard, on ne peut que constater que les critiques se sont largement trompés.
Non pas qu’Albert Heijn ait fait un sans faute. C’est un fait, les Belges n’aiment pas la réglisse ni le lait frais. En outre, AH n’est jamais réellement parvenu à attirer des « renégats » de la concurrence. Mais le détaillant alimentaire a fait preuve d’une grande volonté d’apprendre et a adopté un ton agréable dès le départ : toujours complice, jamais arrogant. Aujourd’hui, le challenger a gagné le respect.
Remise en question
L’arrivée d’Albert Heijn a secoué le marché belge de la distribution alimentaire, qui somnolait sous le joug de Colruyt. Avec des prix compétitifs et des promotions sensationnelles 1+1 gratuit, mais aussi avec une gamme contemporaine qui offrait, et offre encore, plus de commodité que la plupart de ses concurrents. Et avec une plus grande diversité. Et une meilleure expérience d’achat. Et, dernier mais pas des moindres, un niveau d’exécution inédit. Certes, en tant que nouveau venu, vous avez l’avantage des nouveaux locaux et des équipes jeunes.
Mais quand même : AH a obligé tous les détaillants locaux à se remettre en question. Ils ont dû relevé la barre à tous les niveaux. Ce n’est pas un exercice facile pour les grosses organisations qui traînent un lourd passé et qui doivent remettre à jour un parc commercial désuet. Aujourd’hui, le consommateur est le grand gagnant : presque toutes les chaînes de supermarchés se sont vues contraintes de rafraîchir leurs formules, d’actualiser leur offre et de repenser leur stratégie commerciale. Albert Heijn a toujours été un moteur de l’innovation sur son marché national et, ici aussi, il remplit ce rôle avec brio. Et ce n’est pas tout : le concept de magasin continue à évoluer. AH XL arrive, ainsi que de petits magasins AH to go automatisés dans les bureaux. Parallèlement, les activités en ligne connaissent une forte croissance.
Étonnante complémentarité
La fusion entre Ahold et Delhaize a manifestement constitué un tournant important dans la conquête de la chaîne hollandaise. Après avoir tâtonné, les enseignes Delhaize et Albert Heijn ont trouvé une étonnante complémentarité sous le drapeau du groupe fusionné : elles peuvent coexister, chacune avec son public. Un message fort, surtout quand on repense aux nombreuses prédictions qui vouaient Albert Heijn à disparaître du marché après l’opération. Avec l’ouverture du premier supermarché AH par un franchisé de Delhaize, une autre étape importante a été franchie.
Et maintenant ? Selon les observateurs, une implantation en Belgique francophone est inéluctable à long terme, mais Albert Heijn ne franchit pas encore le pas. Il y a encore suffisamment de potentiel en Flandre : avec un rythme d’expansion de dix nouveaux magasins par an, l’objectif de 100 magasins d’ici quatre ans est en vue. Cora, Match et Intermarché devront alors également commencer à s’inquiéter. Ce train bleu semble bel et bien inarrêtable.