Le départ soudain de Rudi Petit-Jean, directeur de l’enseigne Gamma Belgique, suscite bon nombre de questions concernant l’avenir de la chaîne de bricolage, déjà secouée par des discordes entre les actionnaires.
« C’était écrit dans les étoiles »
Pour les initiés le départ de Rudi Petit-Jean n’est pas vraiment une surprise. « C’était écrit dans les étoiles », nous dit-on. Depuis un certain temps déjà il était dans une position délicate, entre la direction du groupe d’une part et les franchisés belges d’autre part.
Que se passe-t-il chez Intergamma ? Récemment RetailDetail vous a déjà informés des conflits parmi les actionnaires. Le groupe irlandais CRH, qui détient près de 50% des actions du groupe de bricolage, veut vendre ses actions. Bricorama aussi veut céder ses actions (3%). Les exploitants de magasin indépendants (43,9%) et la direction (6%) n’arrivent pas à se mettre d’accord.
Selon des sources bien informées, Rudi Petit-Jean avait mis au point un projet innovant pour l’avenir de la chaîne DIY. Mais les entrepreneurs n’ont pas accroché. Le secteur du bricolage ne serait-il pas encore mûr pour l’innovation ? Poser la question, c’est y répondre …
Nouveau défi
RetailDetail a demandé l’avis de quelques collègues et initiés concernant cette information surprenante. « Rudi est un collègue très apprécié. Son départ sera certainement une perte pour Gamma Belgique », estime Erwin Van Osta, administrateur délégué de Hubo. « Lorsque le capitaine quitte le navire, l’équipage est toujours un peu perdu. Nous pourrions peut-être les guider? D’autre part personne n’est irremplaçable et l’organisation prendra rapidement un nouveau capitaine à son bord. Mais cela ne sera pas une sinécure. »
Mais ce départ cache-t-il autre chose ? « Je ne suis pas au courant de la cuisine interne, mais dans le secteur et dans la presse la rumeur circule selon laquelle il y aurait des brouilles avec les franchisés de Gamma. Je peux comprendre la décision de Rudi. Après plus de 20 ans il recherche probablement un nouveau défi. Et ces dernières années n’ont pas été ses années les plus heureuses dans le business. De toute manière je lui souhaite bonne chance. »
« Rudi manquera non seulement à Gamma, mas à tout le secteur du DIY », affirme Dieter Struye, general manager de Brico & Brico Plan-IT. « C’est un homme chaleureux et humain, qui a fait en sorte que tous les partenaires au sein du secteur continuent de dialoguer, tant les fournisseurs que les collègues retailers. Il a pris diverses initiatives qui ont favorisé la collaboration dans l’ensemble du secteur. » Son successeur n’aura pas facile, car l’âge d’or du DIY est révolu. « Aujourd’hui il faut se battre pour croître. Sans une grande passion pour le bricolage, il est impossible de s’en sortir, mais les relations humaines restent également importantes. »
Adhérents peu maniables
Eddy Priem, qui fut directeur de Gamma Belgique entre 1993 et 1998, connaît Rudi Petit-Jean depuis très longtemps : « Je l’ai engagé lorsque j’étais directeur général chez Expert. Il venait de terminer ses études. Ensuite il m’a suivi chez Gamma. Nous avons travaillé en étroite collaboration durant des années. C’est une grande perte pour Gamma. Chapeau à Rudi d’avoir tenu le coup aussi longtemps dans cette entreprise très politique. Il a été un médiateur, un réconciliateur. Il a beaucoup accompli chez Gamma, mais a été freiné par des adhérents peu maniables du groupe. Il aurait donc pu atteindre encore davantage, mais la discorde parmi les entrepreneurs est un grand handicap pour la chaîne. »
Quelle orientation l’enseigne Gamma doit-elle prendre à présent ? « Le DIY doit rechercher un nouvel équilibre entre le retail physique et l’e-commerce. Aux Pays-Bas un quart des franchisés ne gagnent plus d’argent. Il y a trop de magasins. Il faut miser davantage sur l’online et d’autres concepts de magasins. Les magasins à l’agonie doivent fermer. Mais ce genre de mesures requiert une structure ferme, qui n’existe pas aujourd’hui. Le successeur de Rudi se trouvera devant une mission politique difficile. Continuer comme avant n’est pas une option. »
Direction food ?
« Si vous parvenez à faire collaborer un coq néerlandais comme Harm-Jan Stoter et un coq français comme Jean-Claude Bourrelier, vous avez incontestablement des qualités exceptionnelles », estime l’expert en retail Jorg Snoeck de RetailDetail. A-t-il une idée du secteur où Rudi Petit-Jean pourrait faire son apparition d’ici peu ? Rudi Petit-Jean lui-même n’a fait aucun commentaire à ce sujet …
« Dans les couloirs on chuchotait qu’il avait été approché par un groupe de DIY allemand, qui depuis les Pays-Bas souhaite également s’étendre vers la Belgique. Cela aurait été une belle opportunité. Mais je pense plutôt qu’il optera pour son autre grande passion : l’alimentaire ! C’est un véritable foody, donc l’homme idéal pour diriger une belle entreprise alimentaire belge. Il aurait également sa place chez un retailer : le groupe fusionné Ahold Delhaize pourrait certainement avoir recours à un homme avec ses qualités. Ou encore une entreprise comme Sligro qui nourrit de hautes ambitions en Belgique et qui a besoin d’une personne expérimentée dans le retail, connaissant la différence entre la culture d’entreprise néerlandaise et belge. Oui, je le vois bien là. »