« Pour faire face à la charge du commerce de détail en ligne, il faut y aller à fond », estime Gilles Jourquin, PDG de Newpharma. Voilà qui explique le succès international de la pharmacie en ligne liégeoise.
Oser renoncer à l’ancien
Dès qu’un nouveau décret royal a autorisé la vente de médicaments en ligne en 2009, Newpharma a pris le train en marche. Un pharmacien liégeois et deux informaticiens, il n’en fallait pas plus pour démarrer. Aujourd’hui, le groupe détenu depuis le mois de juin à 100 % par Colruyt Group opère dans six pays et touche 4,5 millions de clients.
« Pour exploiter pleinement les atouts des nouvelles technologies, il faut oser renoncer à l’ancien modèle », observe Gilles Jourquin, PDG de Newpharma depuis 2021. En tant qu’ancien directeur d’une chaîne comptant une centaine de pharmacies physiques, il est bien placé pour le savoir. Elles aussi ont essayé de se numériser, mais elles sont restées fidèles au modèle traditionnel. « La nouvelle génération de pharmaciens est ouverte à cette transition mais considère souvent le e-commerce comme une extension du modèle existant. C’est pourquoi beaucoup échouent. »
Sa force ? Newpharma n’a pas hésité à renoncer à l’ancien modèle, à la notion même de pharmacie physique. « Pour faire face à la charge du commerce de détail en ligne, il faut y aller à fond », a déclaré Jourquin. Lors de l’avant-programme Trends in E-commerce lors de la RetailDetail Night, le PDG partagera ses points de vue et ses expériences sur un marché en ligne de plus en plus hostile.
En ligne, le bruit est assourdissant
Se faire connaître en ligne est de plus en plus difficile, observe Jourquin. « Aujourd’hui, se faire une place en tant que nouvel arrivant est effectivement impossible. Le bruit, le brouhaha, a augmenté si brusquement après le coronavirus qu’il est impossible de se faire entendre. En outre, le marketing numérique est devenu tellement cher que le retour sur investissement est insignifiant. »
Newpharma continue néanmoins à investir dans le marketing. « Nous avons un bon mélange entre les canaux en ligne et hors ligne, en particulier aujourd’hui grâce aux synergies avec Colruyt Group. Nous pouvons être présents sur tous les points de contact, des médias sociaux à la télévision en passant par les supermarchés. » En effet, une sélection de produits de parapharmacie est désormais commercialisée dans les rayons de Colruyt. « Chez nous, ce n’est pas un essor fulgurant. Grâce à notre écosystème, nous renforçons notre présence progressivement et de manière saine sur le plan financier. »
Les « corona-clients » ne sont pas acquis
Lorsque les consommateurs se sont massivement tournés vers le e-commerce en raison de la pandémie de coronavirus, le secteur a certes connu un essor. Mais un essor qui s’est avéré être de plutôt courte durée. « L’inconvénient de cet essor, c’est que les consommateurs n’ont pas choisi les achats en ligne par pur désir. Donc, après la pandémie, une partie de ces clients ont à nouveau disparu. Jusqu’en 2019, nous avons connu une croissance linéaire et avons touché un groupe de consommateurs qui souhaitaient réellement acheter en ligne. Beaucoup d’acteurs du commerce électronique ont misé sur la fidélisation de ces nouveaux clients et ont investi trop rapidement », explique Jourquin, qui analyse beaucoup de données et qui a très vite constaté que le comportement d’achat s’écartait de la normale. « Nous sommes donc restés prudents. »
Une croissance prudente et durable, c’est également le mot d’ordre chez Colruyt Group. « Notre mission est d’atteindre une croissance durable et à long terme. C’est pour cette raison que nous avons également renoncé délibérément à saisir certaines opportunités, par exemple. Heureusement, car de nombreux acteurs sont à bout de souffle maintenant que la crise ne semble pas être courte et aiguë. »
Attendre la bonne vague
À long terme, Newpharma entend donc s’imposer comme le leader du marché dans ses principaux pays d’activité. Très certainement en France, où la pharmacie en ligne belge est l’un des principaux acteurs. Dans les pays d’Europe du Sud, le commerce en ligne est moins mature et la fragmentation est plus grande, mais Newpharma attend de saisir sa chance. « Nous sommes prêts, nous attendons de pouvoir surfer sur de belles vagues. Un autre avantage est que nous ne sommes pas une boutique en ligne de parapharmacie mais une pharmacie numérique. Ce n’est pas seulement chaque transaction du panier d’achat qui nous intéresse. We care. »
On ignore encore si, à terme, Newpharma ouvrira des points de vente physiques. « Je ne dis pas non, mais nous devons d’abord réfléchir à la manière de faire mieux. Si nous passons au phygital, ce sera différent. Je ne vois pas la valeur ajoutée de deux modèles fonctionnant en parallèle. De plus, nous devrions redistribuer tous nos coûts et stocks aujourd’hui centralisés. Il ne s’agira pas seulement d’ouvrir des magasins. Mais Colruyt Group est très actif dans le R&D, pensez par exemple au magasin sans personnel Okay, donc tout est possible. »
Comment continuer à innover dans le e-commerce ? Gilles Jourquin, de Newpharma, en discutera en profondeur lors de l’avant-programme « Trends in e-commerce », qui aura lieu le 24 novembre à midi, avant la RetailDetail Night. D’autres intervenants, parmi lesquels des représentants de eFarmz, INNO et Casa, seront également de la partie. Au programme de la soirée : plusieurs orateurs internationaux, un débat avec cinq PDG belges du secteur de la vente au détail, les RetailDetail Awards et un délicieux dîner de networking. Un événement à ne pas manquer pour les détaillants !