La gestion des catégories est également plus pertinente que jamais dans le commerce de détail non alimentaire, mais il existe un fossé entre les attentes des détaillants et ce que les fournisseurs offrent en retour, comme cela a été révélé la semaine dernière lors du Category Management Congress.
« ChatGPT dit que oui ! »
Le category management est-il toujours d’actualité après 30 ans ? Luc Desmedt de LD&Co a posé la question à ChatGPT, donnant le ton pour le reste de l’après-midi, car il n’y avait pas une présentation qui ne mentionnait pas l’IA. Dans tous les cas, la réponse a été claire : oui ! Mais les outils et la technologie évoluent.
Une enquête menée auprès de 15 détaillants de produits non alimentaires a montré que le category management est bien vivant ici aussi, même s’il existe souvent un fossé entre les cadres supérieurs et les cadres moyens. Il y a également du travail à faire en termes de compétences, ainsi que d’intégration omnicanale. Une trop grande attention portée aux prix et aux promotions peut nuire à la coopération, même si cette bataille fait encore plus rage dans le secteur alimentaire.
Selon les détaillants, les fournisseurs manquent souvent de vision des catégories, d’analyse des prix, de connaissance des consommateurs, de conseils en matière de commerce électronique, de meilleures pratiques d’autres pays… Les écarts sont énormes. Il y a un besoin d’expérience et de connaissances. Il est difficile de trouver et de conserver des category managers.
« Un seau qui fuit »
Qu’est-ce qui distingue les marques gagnantes ? La pénétration, selon le meilleur livre de marketing à ce jour (How Brands Grow de Byron Sharp, qui a plus de 20 ans et n’est pas du tout dépassé). L’essentiel est que vous regardiez au-delà de la part de marché et de la part équitable : il s’agit de votre potentiel et de votre conversion. Vous devez continuer à recruter de nouveaux acheteurs parce que vous en perdez toujours – c’est l’image familière du seau qui fuit.
Comment savoir quels acheteurs vous recrutez et comment les fidéliser ? Il existe un nouvel outil pour cela : le Penetration Growth Driver, explique Davy Van Raemdonck de Consumer Panel Services GfK, qui fera partie de YouGov dans quelques mois.
Aldi, par exemple, a constaté qu’il perdait des clients dans la catégorie du beurre et des graisses animales au profit de Lidl et de Colruyt. Cela représentait un potentiel inexploité de 1,3 million d’euros, car certaines références n’étaient pas disponibles. En introduisant de nouvelles références, la fuite pourrait être colmatée.
« Une relation amour-haine avec Ikea »
« Mon chien – un golden retriever – fait parfois plus d’efforts pour me comprendre que mon partenaire », explique Pascal Deckers, de LD&Co, qui est également passionné de voitures rapides. Sa troisième passion est la gestion des catégories. La catégorie est l’endroit où les détaillants et les marques se rencontrent.
« J’aime visiter les magasins. Pas pour faire des achats, pour regarder. Éliminez les obstacles à l’achat. Rendez les choses aussi simples que possible. Par exemple, j’ai une relation amour-haine avec Ikea. Je n’aime pas y aller, mais quand j’y vais, j’ai toujours de belles choses avec moi. On achète toujours plus que ce que l’on voulait. Ils parviennent à éliminer ces barrières ».
Il souligne le paradoxe du choix : si on leur offre trop de choix, les acheteurs n’achèteront rien. Si une promotion est confuse, elle ne fonctionnera pas. « Tuez vos chouchous, car moins il y a de choix, plus il y a de ventes. Concentrez-vous sur les héros de la gamme, sur les points d’ancrage du territoire. Travaillez avec des segments de prix clairs et un plan de promotion sain. Beaucoup d’argent est gaspillé. Et une étagère virtuelle est aussi une étagère. »
« Soyez un caméléon »
La présentation de Bart Pelgrims et Julie De Buck de Coca-Cola Europacific Partners a commencé par une image atmosphérique de feuilles d’automne. « Nous y reviendrons », ont-ils déclaré. Le fabricant de boissons rafraîchissantes dessert près de 100 000 points de vente « hors domicile » en Belgique, ce qui n’est pas une mince affaire, car ce canal est extrêmement fragmenté et les données sont rares. Mais ce n’est pas parce que l’on ne dispose pas de données que l’on ne peut pas faire de gestion par catégorie.
La marque capitalise sur les moments de consommation pour stimuler l’achat non planifié de boissons. Fanta s’avère être un bon accord avec les tacos. Pour Burger King, l’entreprise a développé la saveur exclusive « King’s Lemonade ». Une campagne comme « Costa Monday » vise à créer de nouvelles habitudes en matière de café.
« L’IA va changer notre façon de travailler. Nous construisons un ‘lac de données’ et cette nouvelle technologie nous aidera à relier tous les points de données. Ce n’est pas une question d’années, mais de mois ! »
Et ces feuilles d’automne ? Elles se sont révélées être des caméléons. « Car, surtout dans le canal hors domicile, en tant que category manager, vous devez être un caméléon : vous travaillez avec des restaurants le matin, des magasins de pompes l’après-midi et des cinémas le soir. Les mentalités sont à chaque fois différentes et il faut faire preuve d’empathie ».
« Le Mick Jagger du category management »
Il y a près de 30 ans, il a inventé la méthodologie de gestion des catégories et, aujourd’hui encore, il transmet son message dans le monde entier : c’est ce qui fait de Brian Harris le Mick Jagger du category management, estime Luc Desmedt. Depuis Los Angeles, nous avons recueilli son témoignage.
« Le timing est essentiel : le moment était venu. En 1998, les détaillants ont commencé à voir la valeur des données sur les consommateurs et des cartes de fidélité. Ils voulaient devenir de meilleurs spécialistes du marketing et les données leur ouvraient de nouvelles perspectives. La croissance des discounters, des ‘category killers’ et des drugstores a également été un élément déclencheur. Coca Cola a été le premier à me soutenir, P&G a été la première entreprise à nommer un coordinateur de catégorie, après tout, ils avaient plusieurs marques dans une catégorie. Les premiers résultats étaient faciles à obtenir, avec des résultats souvent étonnants. Aujourd’hui, c’est beaucoup plus difficile. »
Aujourd’hui, les négociations éclipsent souvent le dialogue stratégique, en particulier en Europe, car aux États-Unis et en Asie, l’état d’esprit est davantage à la collaboration. « Mais la coopération se mérite, elle n’est pas un cadeau. Si vous n’avez pas de vision, vous n’avez pas le droit d’attendre une coopération de la part du détaillant. »
Quels sont les détaillants que nous devrions considérer comme les meilleurs de leur catégorie ? « Aux États-Unis, pas les plus grands, mais des acteurs comme HEB ou Wegmans, qui considèrent la gestion des catégories comme une plate-forme stratégique. En Europe, je suis un fan d’Albert Heijn et de Tesco. La Chine est également intéressante, car les détaillants peuvent partir d’une feuille blanche. »
L’IA accélérera encore l’évolution de la gestion des catégories, par exemple en connectant de grandes bases de données. Un véritable ciblage personnalisé deviendra alors possible. « Ne regardez pas hier, regardez demain », conseille M. Harris : « Où va la catégorie ? Cela dépendra de l’évolution des attentes des consommateurs, de la concurrence et de la disponibilité des données. »
« L’amour doit venir des deux côtés »
Enfin, un panel a débattu des principales conclusions du congrès. Une question urgente ? Les données, bien sûr. Mais aussi la volonté et la capacité de travailler réellement ensemble. « L’amour doit venir des deux côtés », pense Piet De Coninck de HIMA Benelux, la fédération des fournisseurs du secteur du bricolage. « Certains fournisseurs sont bornés, les détaillants ont des attentes. Nous sommes un secteur avec des rotations lentes. Il est difficile d’intégrer les petits fournisseurs dans cette histoire ».
Luc Verschueren, directeur des achats chez Oh’Green, partage cet avis. « Il y a un grand écart entre ce que nous aimerions discuter avec nos fournisseurs et ce que nous obtenons en retour. Je reste parfois sur ma faim. » Il a de l’expérience dans le secteur alimentaire, qui est déjà plus avancé en la matière.
Il en va de même pour Laurence Van De Putte de Multipharma : « Il y a une grande différence. Nous voulons établir davantage de partenariats pour développer nos catégories. La vision catégorielle des fournisseurs me manque. Chez nous, bien sûr, il y a le contraste entre la santé et la consommation. »
La collaboration ne repose pas uniquement sur des données ; elle commence par une bonne connaissance du client, explique Bart Pelgrims. « Il faut être à l’écoute : quelle est leur stratégie, où veulent-ils aller ? » En effet, Verschueren déclare : « Parfois, je dois demander à un fournisseur s’il a déjà visité nos magasins… » En ce qui concerne le plus grand défi, les quatre panélistes sont unanimes : « Il s’agit d’une affaire de personnes. La guerre des talents fait rage ».
Le prochain événement de RetailDetail aura lieu le 23 novembre. La RetailDetail Night, la fête annuelle de fin d’année du secteur du commerce de détail dans le Benelux, proposera quatre programmes d’accompagnement inspirants et un programme principal de haut niveau : Marit Van Egmond (CEO Albert Heijn), Erwin Van Osta (CEO HUBO) et Adgild Hop (Retail Lead Europe Deloitte). À ne pas manquer !