Le fait que le franchisage des 128 supermarchés intégrés de Delhaize ait réellement démarré permet à toutes les parties concernées d’y voir plus clair. Le détaillant alimentaire va en effet de l’avant, même si le rythme doit s’accélérer considérablement.
Soulagement
L’annonce de Delhaize, lundi dernier, a suscité des émotions diverses parmi les personnes concernées. Au siège, c’est le soulagement qui prévaut, car la grande opération de franchisage démarre enfin réellement. Après des mois de protestations plus vives que prévu et des pertes de chiffre d’affaires massives, ça donne du courage. Le détaillant peut désormais montrer que les acheteurs potentiels ne se laisseront pas décourager par les prétendus contrats d’étranglement et les menaces des activistes qui promettent de laisser pourrir les choses.
Le fait que la première liste d’acquéreurs avec cinq affiliés, cinq employés et cinq parties « externes » soit un reflet étrangement équilibré des trois types d’entrepreneurs sur lesquels Delhaize compte ne doit pas être une coïncidence. Il s’agit d’une communication intelligente qui prouve que le business case est solide. Et qui devrait renforcer la confiance. Elle pourrait aussi indiquer que Delhaize garde effectivement beaucoup plus en réserve, malgré les insinuations d’un « décrochage massif » des candidats. Nous le découvrirons dans les mois à venir.
Un défi de taille
Nous entendons la fierté et l’enthousiasme des repreneurs, qui sont très attachés à la marque Delhaize et sont convaincus du potentiel de « leur » magasin. Ils tiennent un langage conciliant aux employés concernés. Quoi qu’il en soit, il sera difficile de restaurer le moral et de motiver les équipes.
Fait remarquable, cette première liste comprend d’emblée certains des magasins les plus difficiles de tout le dossier : devant les portes de succursales bruxelloises comme Hankar et Flagey, les employés demandent depuis des mois aux clients de faire preuve de solidarité en boycottant le magasin. Le chiffre d’affaires s’est effondré, l’ambiance est totalement détruite. Ici, le défi est de taille. Ce qui n’empêche pas les entrepreneurs de s’y lancer. Ils ne se laissent pas intimider, ce qui prouve leur courage et leur confiance dans les magasins et la marque Delhaize.
Le bénéfice du doute
Du côté des syndicats, c’est bien sûr l’indignation qui prévaut. Ils avaient déjà perdu l’illusion que Delhaize serait disposé à discuter d’alternatives au plan de franchise, et ils pourraient également abandonner l’espoir d’un plan social pour les départs volontaires. Ils annoncent de nouvelles actions, mais la question est de savoir dans quelle mesure ces actions sont encore soutenues et ce qu’ils veulent en faire.
En effet, dans les magasins, les avis sont très partagés. Dans les supermarchés flamands, les équipes semblent prêtes à accorder le bénéfice du doute aux repreneurs, puis à en tirer le meilleur parti. Les premières réactions sont plutôt positives à Knokke et Ronse, lit-on dans la presse régionale. Elles semblent hésitantes à Izegem, Denderleeuw et Deurne. À Nivelles et à Bruxelles, la frustration et la colère ont retenti. Les portes s’y sont refermées (mais elles se sont rouvertes depuis).
L’avantage de la clarté
Bien sûr, ce n’est qu’un début. Vendre les 15 premiers magasins est un jeu d’enfant. Les 15 dossiers suivants seront également pratiquement terminés à l’heure actuelle. Pour les dernières filiales, c’est une autre histoire. En outre, à un rythme lent de 15 magasins tous les deux mois, cette opération ne sera pas terminée l’année prochaine. Il faut donc accélérer le rythme. Et c’est là que le travail commence vraiment : motiver les employés, reconquérir les clients, revitaliser les supermarchés après une longue période d’incertitude et de presse négative. Et ce, dans un marché turbulent où la concurrence ne fait qu’augmenter.
Bref, Delhaize n’a pas encore gagné la partie. Mais quoi qu’il en soit, cette nouvelle phase du plan d’avenir offre à toutes les parties concernées l’avantage de la clarté: il n’y a plus de retour en arrière possible.