Carrefour Belgique est sur la bonne voie mais ne sera pas encore rentable cette année, prévoit le CEO Geoffroy Gersdorff. Un franchisage des hypermarchés n’est pas à l’ordre du jour, pas plus qu’une reprise de Louis Delhaize.
Des actions pouvoir d’achat réussies
Hier soir, Carrefour a pu présenter des chiffres trimestriels solides, la Belgique affichant même la croissance la plus rapide au sein du groupe. Les bons résultats ne sont pas uniquement dus au fait que Carrefour a pu profiter des troubles chez Delhaize, selon le CEO Geoffroy Gersdorff: « Même avant les problèmes chez Delhaize, la tendance était bonne : le premier trimestre était également positif. Il est important de noter qu’en cette période d’inflation, nous constatons que nos volumes augmentent également, dans nos trois formats. De toutes les enseignes, ce sont les hypermarchés qui augmentent le plus leur part de marché en Belgique. C’est un signal important : les clients comprennent de mieux en mieux notre raison d’être et notre dynamique commerciale répond à leurs attentes, y compris en matière de pouvoir d’achat ».
Les actions pouvoir d’achat ont été un succès, en partie grâce à l’accent mis sur la marque Carrefour, qui est 30 % moins chère que les marques nationales. « Nous avons bloqué plus de 200 prix, nous en sommes à la troisième vague de baisses de prix et ce n’est pas fini. » Aujourd’hui, Carrefour mène une politique promotionnelle différente pour les hypermarchés et pour les supermarchés. « Les supermarchés sont là pour les achats hebdomadaires, les hypermarchés pour les achats mensuels ou moins fréquents. Cela nécessite des promotions différentes avec des dynamiques différentes. »
Amélioration de la productivité
Dans les magasins, Carrefour améliore ses performances grâce à la « méthode Maxi », inspirée des expériences menées en Argentine, en Espagne et, entre-temps, en France. « Nous révisons notre assortiment, nous réduisons la gamme et nous présentons les produits sur des palettes et dans des suremballages prêts à la vente. Nous réduisons ainsi nos ruptures de stock et améliorons notre productivité. Nous présentons nos produits Carrefour et Simpl en masse. Pour les clients, l’offre devient plus lisible, le choix plus facile. Nous le faisons à la fois dans les hypermarchés et les supermarchés, dans l’alimentaire et le non-alimentaire. D’ailleurs, nous avons toujours l’assortiment le plus large de Belgique ».
Carrefour travaille sur des produits de niche tels que la cuisine du monde et se différencie davantage entre le nord et le sud : après tout, la dynamique en Flandre n’est pas la même qu’en Wallonie. « Au nord, nous sommes en concurrence avec Albert Heijn, au sud avec Intermarché. Les attentes des clients sont différentes et notre réponse ne peut donc pas être la même. C’est sur ce point que nous avons procédé à des ajustements. »
« L’inflation va baisser »
Pendant ce temps, les fabricants de grandes marques publient d’excellents chiffres trimestriels et continuent d’augmenter leurs prix. Quelles sont les évolutions attendues par le PDG ? « Au second semestre, nous verrons certainement l’inflation diminuer. En regardant les comptes de résultats de nos principaux fournisseurs, je vois le potentiel de nos discussions à court et moyen terme. Nous attendons deux choses de nos fournisseurs. Premièrement, une évolution de leurs prix d’achat en raison de la baisse des prix des matières premières. Deuxièmement, une augmentation de leur niveau de service : il y a trop de ruptures de stock aujourd’hui. »
Ces négociations se poursuivent non seulement en Belgique, mais aussi au niveau européen via la centrale d’achat Eureca en Espagne. « Le poids du groupe devrait améliorer nos conditions d’achat. Mais il n’y a pas que le prix d’achat qui est important, il y a aussi la dynamique commerciale. Obtenir le meilleur prix sans dynamique commerciale, cela n’a pas de sens. C’est là qu’il faut trouver l’équilibre. Aujourd’hui, dans tous les pays où Carrefour est présent, nous avons la possibilité de faire évoluer positivement les marques nationales ou les marques propres. »
Des promotions personnalisées
Car c’est aussi ce que souligne Geoffroy Gersdorff : l’intensification de la coopération au sein du groupe Carrefour profite considérablement aux activités belges. « Grâce à nos relations avec l’Espagne, l’Argentine, le Brésil ou la France, nous avons accès à une mine d’idées et de bonnes pratiques. Pensez au commerce électronique, à la numérisation ou à la réduction de nos folders en papier : comment pouvons-nous mieux informer nos clients ? Nous passons d’une communication de masse à une communication personnalisée. Nous avons de très bons exemples en Roumanie ou en Espagne, par exemple, avec l’application, avec des promotions personnalisées basées sur la carte de fidélité. »
En France, Carrefour franchise certains de ses hypermarchés. Est-ce une piste pour la Belgique ? « Non. Nous travaillons sur d’autres leviers. Nous concentrons nos efforts sur la dynamique commerciale, notre raison d’être, notre identité, le confort du client… Après, on verra. Nous connaissons bien la franchise pour les supermarchés et les commerces de proximité, mais pour les hypermarchés, nous travaillons sur d’autres leviers. »
Trop tôt pour les bénéfices
En Roumanie et en France, Carrefour a repris les activités de Louis Delhaize. L’avenir de ce distributeur en Belgique est un grand point d’interrogation, mais un rachat n’est pas imminent, affirme M. Gersdorff : « Les situations française et belge ne sont pas comparables. Il existe une réelle complémentarité en France. Je me concentre sur notre parc actuel de plus de 700 magasins. Nous avons d’autres défis à relever. »
Conclusion ? « La direction est bonne, les premiers résultats sont là, nous devons maintenant travailler à une croissance rentable. En fin de compte, nous devons encore nous améliorer. Ce n’est qu’une première étape, nous avons encore beaucoup de travail à faire. » Devenir rentable cette année sera difficile, admet le dirigeant, notamment en raison de l’indexation automatique des salaires, de l’évolution des coûts de l’énergie et de la distribution… « La tendance est bonne, mais pour 2023, ce sera un peu trop tôt. »